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Facultés de médecine : l'impact à moyen terme de la grève prolongée

Le président du Syndicat national des médecins du secteur libéral, Ahmed Ben Boujida, ne cache pas son inquiétude quant aux conséquences de la crise qui paralyse depuis près d’une année les Facultés de médecine sur la qualité de la formation et sur l’avenir du secteur de la santé dans sa globalité. Invité de l’émission «L’Info en Face», M. Ben Boujida dit partager le souci des étudiants concernant la durée des études et appelle le gouvernement à faire preuve de sagesse et d’ingéniosité pour trouver des solutions à ce blocage qui risque d’impacter la qualité des prestations médicales à moyenne échéance.

Ahmed Ben Boujida
Ahmed Ben Boujida
Le président du Syndicat national des médecins du secteur libéral ne voit pas d’un bon œil le boycott prolongé des cours dans les Facultés de médecine et il tient à le dire. Intervenant dans l’émission «L’Info en Face» du groupe «Le Matin», Ahmed Ben Boujida met en garde contre les conséquences alarmantes de la crise dans les Facultés de médecine, tant pour l’avenir de la formation médicale que pour la qualité des soins à moyen terme.

«La situation est grave !», a-t-il alerté, soulignant que cette interruption prolongée menaçait la qualité de la formation médicale. Selon lui, les effets se feront ressentir dans les prochaines années sur les prestations médicales, qui pourraient se détériorer d’ici quatre à cinq ans. «Je crains que ces dix mois de boycott n’entraînent des répercussions sérieuses, notamment sur l’encadrement des stages, qui a déjà souffert de la hausse du nombre d’étudiants. Ce boycott pourrait aboutir à une année blanche», a mis en garde M. Ben Boujida.



N’hésitant pas à critiquer l’approche du gouvernement dans l’élaboration de la réforme du cycle de formation, qu’il juge inadéquate, ce professionnel estime qu’il est impératif d’impliquer davantage les universitaires et les professeurs qui sont «les mieux placés pour évaluer le volume horaire nécessaire aux cours théoriques et pratiques». Pour fixer la durée des études, il recommande par ailleurs de s’inspirer des standards et pratiques d’autres pays tout en prenant en compte le programme actuel.

La qualité de la formation ne doit pas être bradée

«Il est vrai que la moyenne des années de formation en médecine générale est de cinq ans, suivies de deux années de stages. Cependant, dans certains pays, la médecine générale est considérée comme une spécialité, nécessitant jusqu’à neuf années de formation. Il est donc crucial de ne pas brader la médecine. Nous devons investir le temps nécessaire pour former des professionnels de santé compétents», martèle le président du Syndicat national des médecins du secteur libéral.

Pour atteindre cet objectif, ce professionnel préconise des solutions comme l’introduction de deux années de stages supplémentaires dans des zones enclavées, une pratique en vigueur dans les années 1980. Parallèlement, M. Ben Boujida insiste sur l’importance de la sensibilisation des étudiants aux détails de la réforme et de ses enjeux. Pour lui, la transparence et la communication sont essentielles pour garantir leur adhésion et partant gagner le pari de la qualité.

Une communication transparente pour gagner l’adhésion de tous «J’estime que les préoccupations des étudiants, particulièrement ceux des quatrième et cinquième années, sont légitimes. Ces derniers craignent de voir le volume total de leur formation passer de 4.800 à 3.900 heures, ce qui pourrait compromettre sérieusement la qualité de leur apprentissage à un moment crucial de leur parcours», note-t-il. Interpellé sur les scénarios possibles pour désamorcer la crise, M. Ben Boujida souligne que la seule voie de sortie de la crise qui paralyse les Facultés de médecine réside dans un dialogue constructif entre le gouvernement et les étudiants. Il appelle de ce fait à des négociations ouvertes et continues afin de parvenir à une solution durable à cette impasse qui s’éternise.

Pour le président du Syndicat national des médecins du secteur libéral, le gouvernement doit faire preuve de sagesse en assumant pleinement ses responsabilités et en fournissant des explications claires concernant la réforme proposée. «Il est impératif de présenter les détails de ce projet de manière transparente et d’apporter des garanties solides pour rassurer les étudiants sur la qualité de leur formation. C’est le seul moyen d’apaiser les tensions et d’éviter une aggravation de la situation», a-t-il souligné, rappelant que le chantier de protection sociale initié par Sa Majesté le Roi Mohammed VI nécessitait une mobilisation collective de toutes les composantes du système de santé pour en garantir le succès. «Actuellement, le secteur souffre d’un manque crucial de cadres médicaux, avec plus de 32.000 médecins manquants, d’où l’urgence d’une réponse adéquate à cette crise», insiste-t-il. D’autant que le phénomène de la fuite des compétences médicales prend des proportions alarmantes.

Fuite des compétences médicales, il faut sonner le tocsin

Le président du Syndicat national des médecins du secteur libéral rappelle à cet égard qu’environ 700 médecins choisissent chaque année de quitter le Maroc, ce qui représente à ce jour un total cumulé de 14.000 professionnels de santé. Cette migration massive est principalement attribuée à des conditions de travail jugées déplorables et à un mécontentement général face à des salaires qui demeurent trop bas par rapport aux longues années d’études et à la moyenne internationale des rémunérations dans ce domaine.

«Comment convaincre un médecin généraliste marocain en France de revenir travailler dans son pays d’origine, alors qu’il perçoit un salaire de 7.000 euros par mois ? Et pour les spécialistes, cela peut atteindre jusqu’à 14.000 euros», a-t-il déploré. Il a ajouté que les médecins au Maroc étaient en effet sous-payés, avec des salaires variant entre 14.000 et 25.000 dirhams pour les spécialistes. «Même parmi les médecins du secteur libéral, seuls 10% parviennent à bien vivre de leur métier. Si l’État ne fait rien pour renforcer l’attractivité du secteur, la fuite des cerveaux risque de s’aggraver», avertit M. Ben Boujida. En effet, avec des conditions de travail précaires et des rémunérations peu compétitives, il est difficile d’empêcher nos cadres de la santé de regarder ailleurs, conclut l’invité de «L’Info en Face».
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