La Faculté des lettres et des sciences humaines (FLSH) de Rabat a abrité, lundi 21 avril 2025, un colloque sur la «Communication de crise, risques et catastrophes multidimensionnelles». La pertinence et l’actualité de la thématique a rassemblé une assistance nombreuse visiblement intéressée par la question dans un contexte de surcharge informationnelle. «Cette 7e édition vient après plusieurs éditions qui ont fait un peu le tour du Maroc par Dakhla, Tiznit, Ouarzazate, et là on revient au bercail, à la source du lancement de ce colloque», a indiqué le professeur Mohamed Bendahan à l’ouverture de cet événement. Fruit d'une collaboration entre le Département des sciences de l'information et de la communication (DESTEC) et plusieurs partenaires internationaux, dont la chaire Unesco de Strasbourg et le laboratoire CORHIS de Montpellier, ce colloque a réuni donc des experts venus explorer les défis contemporains de la communication en période de crise.
Une réponse académique aux catastrophes multiformes
«Durant les périodes de crise, comme la pandémie de la Covid-19 ou le séisme d'Al Haouz, ou d'autres catastrophes, le besoin d'information n'a jamais été autant réclamé par le citoyen», souligne la doyenne, Laïla Mounir, dans son discours inaugural. «L'information est devenue un besoin pour survivre, à tel point que l'ONU a même dénoncé la répression de l'information pendant la pandémie de la Covid-19», a-t-elle précisé. En effet, cette urgence informationnelle constitue le fil rouge du colloque, structuré autour de six axes thématiques qui abordent aussi bien les fondements théoriques de la communication publique que les dimensions psychologiques, culturelles et technologiques de la gestion des crises. L'accent est particulièrement mis sur l'impact des réseaux sociaux et de l'intelligence artificielle dans ces contextes de haute tension.
Le professeur Mustapha Machrafi, doyen de la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Salé, a identifié quatre piliers fondamentaux de toute stratégie de communication de crise efficace : «Quand on est en présence d’une catastrophe ou d’un risque, la première chose qui s’effondre, ce n'est pas un bâtiment, ce n'est pas une Bourse, ce n'est pas un terrain, mais c'est la confiance du citoyen». D’où l’importance de la préserver à travers un deuxième élément vital : la transparence. «Dans une communication de crise, je pense qu'il faut dire clairement ce qu'on sait, ce qu'on ne sait pas, et ce qu'on fait pour savoir ce que l'on ne sait pas». Pour Mustapha Machrafi, la rapidité et l'humanité du message complètent ce carré d'or de la communication en temps de crise.
Le professeur Mustapha Machrafi, doyen de la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Salé, a identifié quatre piliers fondamentaux de toute stratégie de communication de crise efficace : «Quand on est en présence d’une catastrophe ou d’un risque, la première chose qui s’effondre, ce n'est pas un bâtiment, ce n'est pas une Bourse, ce n'est pas un terrain, mais c'est la confiance du citoyen». D’où l’importance de la préserver à travers un deuxième élément vital : la transparence. «Dans une communication de crise, je pense qu'il faut dire clairement ce qu'on sait, ce qu'on ne sait pas, et ce qu'on fait pour savoir ce que l'on ne sait pas». Pour Mustapha Machrafi, la rapidité et l'humanité du message complètent ce carré d'or de la communication en temps de crise.
L'espace public en crise : un défi pour les communicants
Mais la fragilisation et la fragmentation de l'espace public est un défi de taille. C’est même un vrai sujet de préoccupations pour Mohammed Ben Abdelkader, ancien ministre (USFP) et chercheur en communication publique. «Une stratégie efficace de communication de crise face à une catastrophe naturelle ou provoquée doit s'appuyer sur un espace public cohérent, pour diffuser rapidement et clairement les informations essentielles», explique-t-il. Mais cet espace, historiquement conçu comme un lieu de délibération commune, est désormais «fragmenté et polarisé». L'ancien ministre précise : «Les réseaux sociaux numériques, tout en offrant des opportunités inédites de réactivité et d'interconnexion, compliquent en même temps la mobilisation collective, diluent les messages institutionnels et amplifient parfois les incertitudes, voire les paniques». Ce constat est particulièrement valable pour le cas du Maroc qui a connu plusieurs catastrophes naturelles ces dernières années, dont le séisme d'Al Haouz. M. Ben Abdelkader rappelle les efforts déployés par le Royaume depuis le tremblement de terre d'Al Hoceïma en 2004 pour développer «une communication de crise plus efficace en direction des populations». Il cite notamment le guide élaboré en 2018 dans le cadre du projet d'appui de l'OCDE pour la gestion des risques au Maroc. Mais des insuffisances persistent, comme l'a montré récemment «la communication de crise des autorités publiques marocaines suite à la cyberattaque criminelle contre la CNSS. Cette communication, qui a été marquée par une certaine hésitation, a révélé quelques faiblesses structurelles qui ont failli fragiliser la confiance des citoyens».
La transformation numérique des stratégies de communication
Partant de là, Stefan Bratosin, du laboratoire CORHIS de l'Université Paul Valéry Montpellier 3, souligne l'importance d'une approche interdisciplinaire pour faire face aux crises. «Malgré le fait que je sois professeur des sciences de l'information et de la communication, je pense qu'on ne peut pas envisager la communication, et ce colloque en est la preuve, sans avoir l'expertise des autres disciplines», affirme-t-il. Cette vision transversale est d'autant plus nécessaire dans un monde que ce chercheur qualifie de «liquide», reprenant l'expression de Mohammed Ben Abdelkader, un «monde qui coule tout le temps. Les institutions changent, les technologies changent, tout change».
Le rôle des nouvelles technologies dans la gestion des crises a également été souligné par Philippe Viallon, titulaire de la Chaire Unesco «Pratiques journalistiques et médiatiques» à l'Université de Strasbourg. Dans ce sens, il tient à rappeler les enseignements de Michel Augisec sur la communication de crise : «Il nous dit qu'il y a dans la communication de crise une grande certitude et une grande incertitude. La grande certitude, c'est que toute structure vivra un jour une situation de communication de crise. La grande incertitude, c'est qu'on ne sait pas quand et on ne sait pas de quelle manière». Face à cette double contrainte, la préparation devient la seule stratégie viable. «Une structure qui se sera préparée à la communication de crise sera beaucoup plus à même d'affronter la crise que celle qui n'y aura pas pensé et qui devra sur le coup prendre des décisions souvent malencontreuses», conclut-il.
Le rôle des nouvelles technologies dans la gestion des crises a également été souligné par Philippe Viallon, titulaire de la Chaire Unesco «Pratiques journalistiques et médiatiques» à l'Université de Strasbourg. Dans ce sens, il tient à rappeler les enseignements de Michel Augisec sur la communication de crise : «Il nous dit qu'il y a dans la communication de crise une grande certitude et une grande incertitude. La grande certitude, c'est que toute structure vivra un jour une situation de communication de crise. La grande incertitude, c'est qu'on ne sait pas quand et on ne sait pas de quelle manière». Face à cette double contrainte, la préparation devient la seule stratégie viable. «Une structure qui se sera préparée à la communication de crise sera beaucoup plus à même d'affronter la crise que celle qui n'y aura pas pensé et qui devra sur le coup prendre des décisions souvent malencontreuses», conclut-il.
De la théorie aux études de cas : une approche pragmatique
Mais au-delà de ces considérations théoriques, le colloque s’est attaché à analyser des cas concrets en matière de communication de crise. L'intervention du professeur Jilali El Adnani, spécialiste de l'histoire sociale et religieuse à l'Université Mohammed V de Rabat, a été fort significative à ce titre. Ayant porté sur «La fabrique des crises et de la désinformation : le cas des séquestrés de Tindouf», son intervention a permis d’examiner comment la communication et la désinformation peuvent façonner la perception d'une crise humanitaire. «La presse européenne, française, est basée sur cette notion de terra nullius, sur ce clou de Jouha, sur les frontières en fait produites par la colonisation française», analyse El Adnani, mettant en lumière les mécanismes de construction médiatique des crises et leurs implications géopolitiques. Cette analyse de cas spécifique s'inscrit parfaitement dans la thématique générale du colloque puisqu’elle a illustré comment les stratégies de communication peuvent être instrumentalisées dans des contextes de tensions internationales et de crises humanitaires.
Repenser la formation aux réalités contemporaines
Autre préoccupation majeure exprimée lors du colloque : la nécessaire adaptation des formations universitaires aux réalités actuelles de la communication de crise. Mohammed Ben Abdelkader a cité une étude récente sur la gestion de la communication lors de la catastrophe de Dana à Valence, qui avait conclu «que la plupart des programmes universitaires sur la communication de crise conservent des références classiques qui, bien qu'efficaces, soulignent la nécessité d'inclure des outils numériques et des stratégies actualisées dans la gestion de crise». Cette réflexion sur la mise à niveau de la formation fait écho aux objectifs du colloque, qui vise justement à «impliquer les jeunes chercheurs dans les débats liés à la gestion de crise» et à «croiser les expertises entre chercheurs, journalistes, responsables publics et acteurs de terrain».
Soumaya El Mendili, coordonnatrice du comité d'organisation, a insisté pour sa part sur cette dimension intergénérationnelle : «Ce colloque se veut un espace d'échange interdisciplinaire et intergénérationnel. En donnant une place significative aux jeunes chercheurs, nous aspirons à renforcer le dialogue et à inspirer des solutions novatrices».
Soumaya El Mendili, coordonnatrice du comité d'organisation, a insisté pour sa part sur cette dimension intergénérationnelle : «Ce colloque se veut un espace d'échange interdisciplinaire et intergénérationnel. En donnant une place significative aux jeunes chercheurs, nous aspirons à renforcer le dialogue et à inspirer des solutions novatrices».
Vers une éthique de la communication en temps de crise
Outre les dimensions techniques et stratégiques, les intervenants ont mis l’accent sur l'importance des considérations éthiques dans la communication de crise. L'un des axes du colloque a spécifiquement été dédié à «l'éthique des médias dans un contexte où la désinformation et les enjeux interculturels menacent l'efficacité des réponses communicationnelles». Cette dimension éthique revêt une importance encore plus cruciale à l'ère des réseaux sociaux, où la frontière entre information et désinformation devient de plus en plus poreuse. En effet, comme l’a si bien souligné Mohammed Ben Abdelkader, «la rapidité et la transversalité avec laquelle les informations sont diffusées sur différentes plateformes et réseaux sociaux peuvent être à la fois un atout et un défi».
Face à ces défis, les participants au colloque ont proposé de lancer une réflexion collective sur les moyens de «promouvoir des pratiques éthiques et inclusives» dans la communication de crise, en impliquant l'ensemble des parties prenantes, des institutions publiques aux médias, en passant par la société civile.
Face à ces défis, les participants au colloque ont proposé de lancer une réflexion collective sur les moyens de «promouvoir des pratiques éthiques et inclusives» dans la communication de crise, en impliquant l'ensemble des parties prenantes, des institutions publiques aux médias, en passant par la société civile.