L’accès équitable aux soins demeure l’un des défis les plus sensibles de la réforme du système de santé au Maroc. Sur le plateau de «L’Info en Face», l’expert en santé publique et docteur en économie Jaâfar Heikel a rappelé qu’en dépit des efforts significatifs engagés ces dernières années, les écarts territoriaux persistent entre régions, entre villes et campagnes, et au détriment des zones enclavées.
Cette insuffisance ne tient pas seulement au manque de diplômés, mais aussi à une répartition très inégale. Les grandes villes concentrent l’essentiel des compétences, tandis que les provinces et zones rurales peinent à attirer et à retenir les professionnels de santé.
L’invité de «L’Info en Face» plaide ainsi pour une politique d’incitation plus ambitieuse : meilleure rémunération, conditions de travail modernisées, logements de fonction, reconnaissance de carrière et dispositifs de mobilité fluidifiés. L’ouverture encadrée aux médecins étrangers figure aussi parmi les leviers à activer pour combler rapidement le déficit dans certaines spécialités, à condition de garantir une intégration harmonieuse dans le système national de santé.
Mais, au-delà de l’enjeu quantitatif, l’expert insiste sur la nécessité d’investir dans les compétences : formation continue, spécialisation, mise à niveau technologique, gouvernance clinique. L’émergence de pôles universitaires médico-chirurgicaux, en coopération avec les Centres hospitaliers universitaires (CHU) et les établissements privés, pourrait renforcer le maillage du territoire.
Autre piste structurante : la délégation de certaines tâches à des professionnels paramédicaux comme les infirmiers spécialisés, les sages-femmes, les psychologues ou les techniciens. Ces derniers peuvent prendre en charge une partie du parcours de soins, notamment en milieu rural. Une approche indispensable pour fluidifier les circuits, réduire l’engorgement hospitalier et permettre aux médecins de se concentrer sur les actes à forte valeur ajoutée.
En somme, doter les régions de ressources humaines stables, formées et motivées est la condition sine qua non pour avancer vers une véritable équité sanitaire. Sans ce socle, prévient l’expert, les autres leviers de réforme resteront largement insuffisants.
Cela passe par le déploiement massif de tests rapides, de centres de diagnostic pour les pathologies chroniques, et par un meilleur accompagnement des patients. Ce changement de paradigme vise à limiter la progression de maladies coûteuses à traiter, comme le diabète, l’hypertension ou le cancer, et à réduire la pression sur les hôpitaux. Aujourd’hui, les ménages marocains assument encore près de 53% des dépenses de santé, un niveau bien supérieur aux standards internationaux. Jaâfar Heikel appelle à réduire cette part à 25% d’ici 2030, conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Pour atteindre cet objectif, il faudra mobiliser des financements supplémentaires, mutualiser les régimes, contrôler les coûts et mieux orienter les dépenses vers les besoins prioritaires.
Former davantage, mieux répartir les médecins, organiser un partenariat public-privé régulé et mettre la prévention au cœur des politiques publiques : tels sont, selon Jaâfar Heikel, les axes indispensables pour réduire les inégalités territoriales et garantir un accès équitable aux soins. Autant de pistes qui, si elles sont mises en œuvre de manière cohérente, peuvent faire de la réforme en cours une véritable transformation structurelle du système de santé marocain.
Renforcer le capital humain, premier facteur limitant
Pour Jaâfar Heikel, l’enjeu majeur se situe dans la disponibilité et la répartition des ressources humaines en santé, véritable colonne vertébrale de toute réforme sanitaire. Si l’augmentation du nombre de médecins formés constitue une avancée notable, grâce notamment à l’extension des Facultés de médecine, de pharmacie et de chirurgie dentaire, ainsi qu’au renforcement des filières paramédicales, le déficit reste particulièrement marqué dans les régions éloignées, où l’accès aux spécialistes est souvent limité.Cette insuffisance ne tient pas seulement au manque de diplômés, mais aussi à une répartition très inégale. Les grandes villes concentrent l’essentiel des compétences, tandis que les provinces et zones rurales peinent à attirer et à retenir les professionnels de santé.
L’invité de «L’Info en Face» plaide ainsi pour une politique d’incitation plus ambitieuse : meilleure rémunération, conditions de travail modernisées, logements de fonction, reconnaissance de carrière et dispositifs de mobilité fluidifiés. L’ouverture encadrée aux médecins étrangers figure aussi parmi les leviers à activer pour combler rapidement le déficit dans certaines spécialités, à condition de garantir une intégration harmonieuse dans le système national de santé.
Mais, au-delà de l’enjeu quantitatif, l’expert insiste sur la nécessité d’investir dans les compétences : formation continue, spécialisation, mise à niveau technologique, gouvernance clinique. L’émergence de pôles universitaires médico-chirurgicaux, en coopération avec les Centres hospitaliers universitaires (CHU) et les établissements privés, pourrait renforcer le maillage du territoire.
Autre piste structurante : la délégation de certaines tâches à des professionnels paramédicaux comme les infirmiers spécialisés, les sages-femmes, les psychologues ou les techniciens. Ces derniers peuvent prendre en charge une partie du parcours de soins, notamment en milieu rural. Une approche indispensable pour fluidifier les circuits, réduire l’engorgement hospitalier et permettre aux médecins de se concentrer sur les actes à forte valeur ajoutée.
En somme, doter les régions de ressources humaines stables, formées et motivées est la condition sine qua non pour avancer vers une véritable équité sanitaire. Sans ce socle, prévient l’expert, les autres leviers de réforme resteront largement insuffisants.
Un partenariat public-privé sous gouvernance étatique
Pour corriger les déséquilibres, Jaâfar Heikel plaide pour des partenariats public-privé (PPP) structurés. Il estime que l’État doit rester «le leader, l’organisateur et le visionnaire», tout en s’appuyant sur des acteurs solides – fondations, secteur privé à but lucratif ou non lucratif – capables de compléter l’offre de soins. Ce modèle a déjà fait ses preuves dans certaines régions, notamment au sud du pays, où la coordination entre institutions publiques et initiatives privées a permis d’améliorer l’accès aux soins spécialisés. Mais le chercheur insiste : ces partenariats doivent être déployés dans un cadre de régulation rigoureux, afin d’éviter les dérives tarifaires ou les logiques purement marchandes.La prévention, clé d’un système soutenable
Troisième levier essentiel : la prévention. Selon Jaâfar Heikel, une politique volontariste en matière de dépistage et de suivi des maladies chroniques permettrait de réduire «de 28 à 30%» les dépenses de santé à moyen terme.Cela passe par le déploiement massif de tests rapides, de centres de diagnostic pour les pathologies chroniques, et par un meilleur accompagnement des patients. Ce changement de paradigme vise à limiter la progression de maladies coûteuses à traiter, comme le diabète, l’hypertension ou le cancer, et à réduire la pression sur les hôpitaux. Aujourd’hui, les ménages marocains assument encore près de 53% des dépenses de santé, un niveau bien supérieur aux standards internationaux. Jaâfar Heikel appelle à réduire cette part à 25% d’ici 2030, conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Pour atteindre cet objectif, il faudra mobiliser des financements supplémentaires, mutualiser les régimes, contrôler les coûts et mieux orienter les dépenses vers les besoins prioritaires.
Une rémunération à l’acte encadrée
Parmi les solutions évoquées, Jaâfar Heikel voit d’un bon œil un modèle mixte de rémunération des médecins du public, combinant salaire fixe et rémunération à l’acte. Une logique incitative, dit-il, peut stimuler la productivité «dans l’intérêt global du système de santé», à condition d’être strictement encadrée pour éviter toute surconsommation d’actes médicaux.Former davantage, mieux répartir les médecins, organiser un partenariat public-privé régulé et mettre la prévention au cœur des politiques publiques : tels sont, selon Jaâfar Heikel, les axes indispensables pour réduire les inégalités territoriales et garantir un accès équitable aux soins. Autant de pistes qui, si elles sont mises en œuvre de manière cohérente, peuvent faire de la réforme en cours une véritable transformation structurelle du système de santé marocain.
