Partant de son constat sur l’état de l’investissement privé (90 milliards de dirhams par an portés à environ 40% par les investissements directs étrangers), le ministère s’est fixé comme entre autres objectifs à l’horizon 2026 de «porter la part à 50% de l’investissement total», mais aussi de «réduire au maximum les disparités territoriales». L’objectif étant de permettre à toutes les régions du Royaume de capter une part plus importante de l’investissement privé, précise la même source.
L’équité territoriale de l’investissement a fait l’objet de nombreux rapports. Parmi eux, celui de la Cour des comptes publié fin 2023 portant sur la mise en œuvre de la régionalisation avancée. Au chapitre des manquements, les sages citent la «non-mise en place de stratégies régionales dans le domaine du développement de l’investissement», en particulier dans les domaines de l’économie de l’eau et de l’énergie. Elle rappelle simultanément que «les régions sont dotées de compétences propres en matière de soutien aux entreprises et d’attraction des investissements». Précisant par ailleurs que «la loi-cadre formant Charte de l'investissement (n°03-22) a souligné leur contribution à la réalisation des objectifs relatifs au développement et à la promotion de l'investissement dans le cadre des compétences qui leur sont dévolues».
Vers un nécessaire renforcement de l’autonomie financière
Les régions, ces territoires encore inexploités
Le nouveau modèle de développement (NMD) rappelle, pour sa part, que le Royaume a entrepris plusieurs réformes pour asseoir les bases d’un développement territorial équilibré, «traduisant sur le terrain le choix de la régionalisation avancée, à travers le processus de décentralisation et de déconcentration». Selon le texte, ces réformes ont permis «d’insuffler un élan supplémentaire à la dynamique des territoires, mais elles n’ont pas réussi à corriger les disparités territoriales, dans la mesure où la richesse nationale demeure portée par un nombre réduit de régions».Globalement, le NMD appelle à accélérer le processus de régionalisation avancée «avec une déconcentration effective et une levée des réticences qui la retardent». En vue de l’aboutissement de ce chantier, le texte préconise «une consolidation des ressources financières des collectivités territoriales», de même que «le recours aux partenariats public-privé pour appuyer la mise en œuvre des projets de développement régionaux». Pour garantir la réussite et la pérennité de ce chantier de la régionalisation avancée, et pour renforcer l’attractivité des régions tout en stimulant les flux d’investissements, la déconcentration doit être le mot d’ordre. Plusieurs schémas directeurs peuvent être déployés en ce sens. Le NMD préconise notamment la mise en place auprès des walis d’une administration ad hoc chargée des affaires régionales.
Provinces du Sud, source d’inspiration
Mise à niveau territoriale : une vision au-delà des villes hôtes du Mondial 2030
Ce programme, qui dépasse le cadre des seules villes hôtes des matchs, vise à moderniser les infrastructures, améliorer les services publics et renforcer l’attractivité des régions, qu’elles soient directement ou indirectement concernées par la Coupe du monde. Au-delà des stades et des équipements sportifs, il s’agit de promouvoir une transformation structurelle touchant plusieurs domaines tels le transport et la mobilité, l’infrastructure urbaine et l’économie locale. En d’autres termes, les régions qui ne sont pas directement impliquées dans l’accueil des matchs bénéficieront également de cette dynamique. Cela vise à éviter une concentration des investissements sur les villes hôtes, tout en garantissant une répartition équitable des ressources et des opportunités. Il apparaît ainsi que ce programme s’inscrit dans la continuité des objectifs du nouveau modèle de développement, en favorisant une approche intégrée où les infrastructures sportives deviennent des leviers de développement pour l’ensemble du pays. Pour garantir la réussite de ce programme, une coordination étroite entre les différents ministères, les Conseils régionaux et les acteurs locaux sera essentielle.
Entretien avec l’économiste, expert des questions sociales et président de l'Université ouverte de Dakhla
Driss Guerraoui : «Ne faudrait-il pas réfléchir à l’élaboration de véritables chartes régionales de l’investissement ?»
Le Matin : Quels sont les principaux défis liés à l’attractivité territoriale que les régions doivent encore surmonter ?
Driss Guerraoui : L’examen de la question de l’attractivité territoriale en liaison avec la problématique de la régionalisation avancée est en train de changer radicalement de nature. Plusieurs raisons à cela. D’abord parce que la concurrence entre les investisseurs potentiels, qu’ils soient locaux, nationaux ou étrangers, est en train de plus en plus de se superposer à une concurrence entre les villes et les régions. De ce fait, on assiste à une situation inédite en économie où, d’un côté, ce sont les régions et les villes qui deviennent les faiseurs des entreprises et de l’investissement et, d’autre part, les déterminants de l’attractivité non seulement changent de nature, mais ils sont en train de se déplacer d’une attractivité autour des prix et de la qualité des biens, des services et des facteurs de production à celles qui mettent en avant plusieurs autres facteurs. Outre la stabilité et la sécurité qui relève de la gouvernance territoriale nationale, il s’agit de la proximité, de la mobilité, de la qualité des institutions au sein d’un territoire (région, ville ou commune), de celle de l’organisations des services aux entreprises et aux ménages, notamment la qualité des transports, du système d’éducation et de santé, de l’administration territoriale, de l’aménagement numérique du territoire et de sa connectivité, du degré de développement des systèmes locaux et régionaux d’information, de formation, de recherche et d’innovation, ainsi que des activités bancaires, financières et boursières, sans oublier les dimensions liées à la qualité de vie dans un territoire, en particulier les infrastructures liées aux activités culturelles et de loisirs.
De ce fait, le défi préalable majeur auquel sont confrontées aujourd’hui les régions en termes d’attractivité, c’est d’abord et en priorité celui lié à leur capacité de pouvoir construire par touches successives cet écosystème complexe et intégré de services et d’infrastructures. Car c’est cet écosystème qui est en fait le véritable arbitre de l’évaluation par les investisseurs potentiels du climat des affaires dans un territoire et de leur décision d’investir, et donc de s’implanter dans une région. Mais force est de constater que, face à l’ampleur de ce défi, toutes les régions ne sont pas dotées des mêmes moyens humains et financiers qui leur permettent de réaliser des raccourcis au niveau de toutes les composantes de cet écosystème d’attractivité.
À votre avis, comment les régions doivent-elles financer leurs projets structurants, notamment dans le cadre de la régionalisation avancée ?
La question du financement est un autre défi crucial pour les régions. Comme nous le savons, les régions disposent de quatre types de ressources : les ressources transférées par l’État, les ressources propres, les ressources issues du partenariat public-privé et celles générées par le financement international. Selon les données du ministère de l’Économie et des finances, fournies par le Bulletin mensuel de statistiques des finances locales, le budget des 12 régions au titre de l’année 2023 représenterait 10% du budget général de l’État, soit l’équivalent de 12 milliards de dirhams, dont 15% pour la région de Casablanca-Settat, 12% pour la région de Rabat-Salé-Kénitra, 10% pour la région de Marrakech-Safi, contre moins de 5% pour la région Draâ-Tafilalet et 4% pour la région de l’Oriental. Quand on sait que 80% des ressources des 12 régions sont composées de ressources transférées par l’État, on comprend dès lors l’ampleur de la dépendance financière structurelle des régions, pourquoi elles n’arrivent pas à réaliser tous les projets arrêtés par leur Plan de développement régional dans les délais impartis, et corrélativement pourquoi elles peinent à bâtir de réels pôles de compétitivité. Face à cette situation se pose alors une question fondamentale : comment les régions peuvent-elles dans l’avenir financer leur développement ? À ce niveau, éclairées par l’expérience du nouveau modèle de développement des provinces du Sud, plusieurs pistes s’offrent aux régions :
• Mobiliser l’intelligence collective et le génie de leurs acteurs et forces vives pour produire des richesses nouvelles. Dans cette perspective, les régions doivent libérer les énergies de toutes leurs composantes pour permettre à toutes celles et ceux parmi leurs populations qui ont envie de prendre des risques, d’innover, d’investir et de créer des activités économiques et qu'ils puissent le faire en dehors de tout obstacle et de toutes contraintes. Dans ce cadre, la gouvernance économique doit consacrer dans les faits l’égalité des chances de toutes et tous, entreprises et citoyens, devant l’acte économique. Ce qui suppose l’instauration d’un climat des affaires qui substitue à la rationalité basée sur les situations de rente, les concentrations, les privilèges, les passe-droits, le clientélisme et la parenté, celle du mérite, de la compétence, de la prise de risque, de l’innovation et de la concurrence juste, loyale et transparente. C’est cette rationalité territoriale systémique qui créera dans les régions une dynamique économique territoriale qui contribuera à élargir la base sociale de l’activité productive, diversifiera les opportunités d’affaires et formera de véritables classes moyennes. C’est cette dynamique aussi qui conduira les régions à développer leurs propres ressources et les conduira à une véritable et saine autonomie financière. In fine, c’est cette dynamique qui offrira aux régions les conditions pour consolider les bases territoriales de la construction de véritables pôles de compétitivité, d’attractivité et d’excellence.
• Repenser le partenariat public-privé.
• Changer radicalement d’approche de la coopération décentralisée. • Mettre en place des politiques volontaristes spécifiques d’attrait des investissements directs étrangers.
• Instaurer une gouvernance financière responsable débarassée des lourdeurs et des complexités administratives. Cette gouvernance doit être fondée sur la digitalisation de l’administration, la transparence, le suivi, l’évaluation, le contrôle et la reddition des comptes. L’objectif est de rationaliser la gestion des ressources et de mutualiser leur utilisation.
• Enfin, créer au sein de chaque région une instance permanente dédié à l’intelligence économique territoriale.
Dans quelle mesure la Charte de l’investissement pourrait-elle avoir un impact significatif sur le flux d’investissements dans les régions ?
L’efficience, l’efficacité et la portée de la Charte de l’investissement sur l’attractivité des régions dépend de la capacité des élus à s’approprier cette Charte à partir d’une bonne connaissance de toutes les dispositions et incitations qu’elle propose et qu’ils peuvent utiliser pour attirer les flux d’investissements dans leur région. Dans cette perspective, chaque Conseil de région est appelé à en user en mettant en exergue les avantages comparatifs, compétitifs et stratégiques qui sont propres au territoire de sa région, en vue d’élaborer des guides d’incitations fiscales différenciées dédiés, en fonction de la spécificité des projets, des programmes et des déclinaisons territoriales des politiques sectorielles définies, eu égard à ces avantages. Cette démarche devrait être adoptée par toutes les régions et pas seulement celles comme Casablanca-Settat, Rabat-Salé-Kénitra, Laâyoune-Sakia Al Hamra et Dakhla-Oued Eddahab, qui sont déjà dans un état avancé en matière de structuration en pôles de compétitivité.
Cependant, l’optimisation de cette Charte en vue de produire un impact significatif sur le flux d’investissements dans les 12 régions présuppose la préparation de toutes les régions à tous les échelons (Conseils régionaux, Conseils provinciaux et Conseils communaux) au moyen du renforcement des capacités de leurs ressources humaines. Elles implique aussi et surtout une mobilisation générale de tous les services extérieurs de l’État et des instances de représentation socio-professionnelles dédiées à l’action économique dans la région, sous la coordination des walis et gouverneurs en vue de garantir un pilotage institutionnel unifié.
Cette mobilisation générale doit porter sur des actions concrètes, concernant des sujets d’intérêt pour l’investissement, et en particulier le foncier, le développement de zones industrielles et logistiques, la création de clusters sectoriels spécialisés, l’élaboration d’une stratégie de marketing territorial, de rayonnement et d’influence de la région dans le monde. À cet effet, ne faudrait-il pas réfléchir à l’élaboration de véritables «chartes régionales de l’Investissement» ?
Entretien avec le président du Conseil régional de Casablanca-Settat
Abdellatif Maâzouz : «Nos défis sont les pendants de nos atouts»
Le Matin : Quels sont les défis que doit relever Casablanca-Settat en termes de renforcement de son attractivité régionale ?
Abdellatif Maâzouz : D'abord, je tiens à rappeler que la région a énormément d'atouts au niveau national, mais aussi au niveau du continent africain, ce qui en fait une région attractive, que ce soit en termes d'infrastructures, de connectivité, de logistique, mais aussi de ressources humaines avec nos différentes universités publiques et privées et nos écoles supérieures. Casablanca est aussi la première place financière du continent. Il existe des écosystèmes très variés qui font que Casablanca et sa région présentent un atout attrayant pour les investisseurs, mais aussi pour y vivre. Elle offre un bon cadre de vie qui a connu une amélioration durant les deux dernières années. Nous pouvons citer à ce titre la création de nouveaux espaces verts ou la reconstitution d'anciens, la propreté, les routes d'accès, de sortie et à l'intérieur de Casablanca, mais également du côté de Nouaceur, Mohammedia, Berrechid et El Jadida. Il y a eu des investissements importants à ce niveau.
Mais nous devons tout de même faire face à quelques défis. Ces défis sont les pendants des atouts. Nous sommes classés première région au niveau national pour ce qui est de la production industrielle avec 50%, et première région exportatrice avec une part de 50% également. Nous concentrons par ailleurs 40% du parc automobile national. Ceci fait de Casablanca-Settat la première région émettrice de gaz à effet de serre. Nous travaillons énormément pour essayer de réduire cette pollution en agissant sur un ensemble d'atouts. D'abord, en décrétant que Casablanca, le grand Casablanca, ne peut plus recevoir d’industries polluantes. Celles déjà présentes sont en train d'améliorer leur process en ce sens. Comme vous le savez, pour pénétrer les marchés internationaux, notamment européens, nous devons avoir un faible impact carbone. Une mise à niveau s’est donc enclenchée pour ces industries, d’autant qu’il s’agit d’une région où celles-ci sont exportatrices. Réduire la pollution implique aussi d’agir sur l'amélioration de l'environnement, et donc des espaces verts. Plus vous verdirez, plus vous réduirez l'impact de la pollution.
Le deuxième défi, c'est celui du stress hydrique. Nous sommes la région où il est le plus élevé. Nos réserves par rapport à la population sont les plus faibles du Maroc. Cela implique l’obligation d’une gestion très efficiente de la ressource en eau, qu'il s'agisse d'eau potable, d'eau destinée à l'agriculture ou d'eau destinée à l'industrie. C’est un autre secteur dans lequel nous investissons beaucoup. Ces investissements ont notamment trait au transfert de l'eau du périmètre du Saïss vers notre région. Nous sommes par ailleurs en train d'investir dans des stations de réutilisation des eaux usées pour l’arrosage notamment. Nous savons que c'est l'équivalent d'une grande station de dessalement qui est jetée dans la nature et dans la mer particulièrement.
Rappelons que l’État a fourni un effort considérable pour le dessalement de l’eau de mer. La grande station de Casablanca est en cours de construction. Il existe aussi une station de dessalement à Jorf Lasfar mise en place il y a quelques années par l'OCP, destinée à la production et au transport des engrais. Aujourd’hui, elle fournit également la région en eau potable. Des villes comme El Jadida, Moulay Abdellah et Azemmour sont entièrement fournies en eau potable produite grâce au dessalement, émanant de Jorf Lasfar. Au même titre, nous plaçons des stations monoblocs de petite taille ou de taille intermédiaire dans différentes zones de la région. Elles permettent de dessaler l'eau de mer ou les eaux saumâtres. À l’image des groupes électrogènes pour l'électricité. Ces stations sont transportables et permettent aussi de traiter de l'eau dans les territoires un peu éloignés de la mer.
Le troisième défi, qui n'est pas propre à notre région, mais à l'ensemble du Maroc, et pour lequel la région investit beaucoup, c'est l'emploi. Nous avons un taux de chômage élevé qui provient non seulement de notre propre démographie, mais aussi de l’exode. La région de Casablanca Settat est connue pour son dynamisme et attire des chercheurs d’opportunités, de l’ensemble du Maroc, voire du continent. Nous devons donc être inventifs pour faciliter l’investissement et user de toutes les facilités qui sont accordées en ce sens par l'État la Charte de l’investissement que nous complétons par l’aménagement de zones d'activités économiques incluant des zones industrielles, logistiques et de services qui permettent aux investisseurs d’éviter la contrainte très souvent lourde du coût du foncier.
Nous achetons du foncier. Nous veillons à ce que ces zones d'activité soient le plus possible à proximité des bassins d'emploi pour que les citoyens n’aient pas à se déplacer sur des dizaines de kilomètres pour rejoindre leur lieu de travail. Parallèlement, nous déployons des moyens financiers pour encourager la création et le développement de PME et de startups dans la Fintech avec CFC (Casablanca Finance City), dans le domaine artistique, du tourisme, de l’artisanat et de l’économie sociale avec les départements, les offices et les fondations concernés.
J’ajouterais un quatrième défi, très important pour la région, et pour toutes les grandes métropoles, c'est le défi de la mobilité. Il est très important pour nous de faciliter le déplacement des citoyens à l'intérieur des villes, mais aussi entre les communes. C'est la meilleure façon d'assurer l'inclusion économique et sociale des différentes populations de la région. Cela encourage également les citoyens à ne pas utiliser que leurs propres véhicules, réduisant ainsi les coûts de leurs déplacements, tout comme ils contribuent à préserver l’environnement. C’est la raison pour laquelle nous avons beaucoup misé sur le transport ferroviaire avec le RER, les trains régionaux, le tramway et le BHNS. L’objectif est de dépasser les 50% de mobilité globale au niveau de la région par le biais du transport public.
Plan de développement régional, nouveau modèle de développement, Charte de l’investissement, régionalisation avancée... Comment croiser au mieux ces différentes stratégies pour gagner le pari du renforcement de l’attractivité de la région ?
Pour les régions, en général, et grâce à la clairvoyance de Sa Majesté le Roi, que Dieu L’assiste, je dirais d’abord que nous avons la chance d’être organisés comme tel. La région est un territoire qui permet une base concrète de la convergence des politiques publiques. Au niveau central, les départements ministériels travaillent surtout sur leur propre secteur. Dans la région, nous complétons et concrétisons dans les territoires, en différentes stratégies et plusieurs grands chantiers sectoriels, mais dont l’objectif commun est l’amélioration des conditions et du cadre de vie des citoyennes et citoyens et le développement durable et inclusif de notre pays.
Le fait d'avoir aujourd'hui une Charte de l'investissement suffisamment élaborée permet d'attirer les investisseurs. Ces derniers, pour être attirés par la région, doivent y trouver des opportunités. Il en existe beaucoup dans un territoire comme le nôtre avec l'écosystème de l'aéronautique, de la santé, des nouvelles technologies, de l'agroalimentaire, du textile et de l’habillement. Je vous ai parlé des zones d'activité économique. Nous les mettons justement en place pour encourager les investisseurs à venir tirer profit de ces écosystèmes et fournir ainsi le marché national et international. À travers le prisme du nouveau modèle de développement, lorsqu'on a élaboré notre vision, le programme de développement régional, nous avons d’abord eu cette réflexion : nous avons un territoire, comment peut-on définir la vocation de chacune de ses grandes composantes ? Nous en avons décliné cinq se rapportant soit aux industries lourdes, soit aux services, à l'agriculture ou à l'agroalimentaire, aux services et activités à forte valeur ajoutée, etc.
A partir de là, nous avons commencé à orienter les investisseurs et nous travaillons pour cela en collaboration avec le Centre régional d’investissement, les autorités et les directions régionales des différents départements. Nous devons veiller à équilibrer progressivement nos territoires. C’est ce que nous faisons, par exemple, en matière d’alimentation en eau potable, d’assainissement, de routes, d’éclairage, etc., en coordination avec les départements concernés et les autorités locales. Il en est de même des grandes infrastructures en relation avec la Coupe d’Afrique 2025 et la Coupe du monde 2030. C’est pour vous dire qu'il existe une véritable convergence des politiques publiques au niveau du territoire.
Le Programme de développement régional, élaboré pour la période 2022-2027, prend tout ceci en considération. Nous retrouvons dans notre modèle de développement les orientations clairvoyantes de Sa Majesté. Ce modèle lui-même a fortement inspiré le programme du gouvernement, que nous traduisons, en termes de priorités et de spécificités de notre territoire. Je dirais que le législateur marocain, en mettant en place la loi 111-14 sur la régionalisation avancée, a aussi pensé aux outils de planification et de mise en œuvre. Ces outils sont pour nous le Schéma régional d'aménagement du territoire et le Programme de développement régional.
Quelles sont les différentes sources de financement du développement régional et existe-il des mécanismes dits innovants ?
Je dirais que c’est autre défi pour les Conseils régionaux qui ne disposent que de peu de ressources propres, gérées directement, contrairement aux communes. Les régions se voient affecter des pourcentages sur certains impôts tels que l’IS, l'IR et quelques taxes telles que la taxe sur les services portuaires ou celle sur les vignettes d’assurance, sur les permis de chasse ou sur la production des carrières... Maintenant, nous essayons d'innover à travers deux leviers. Le premier, c'est de chercher des compléments de financement pour nos projets. Quand nous investissons dans un projet, un département ministériel, une commune et des organismes vont aussi investir avec nous. Si je prends l’exemple des stations de réutilisation des eaux usées, nous finançons une partie et le ministère de l'Intérieur en finance une autre. Ce dernier dispose d’un fonds dédié à cet effet. Et ce sans oublier les communes concernées. Ceci nous permet de financer ces projets de manière sereine.
Nous cherchons aussi à lever des financements directs sur le marché des capitaux. Vous le verrez d’ailleurs, dans les jours qui viennent, nous émettons un emprunt obligataire d’un milliard de dirhams. Nous cherchons à développer des ressources propres à travers le retour sur des projets générateurs de revenus tels que les zones industrielles, les marchés de gros, etc., pour nous permettre de rembourser ces crédits, mais également de lancer d'autres projets.
Nous avons aussi recours à des organismes internationaux qui nous font confiance et mettent des lignes de crédit à notre disposition. Nous sommes en contact avec plusieurs pourvoyeurs de fonds pour essayer de diversifier nos sources de financement, y compris à la finance climat, souvent moins coûteuse que des financements conventionnels. Enfin, je tiens à souligner que la région de Casablanca-Settat est omniprésente dans la plupart des grands projets structurants de plus d’une centaine de communes et que le Grand Casablanca en occupe une part importante, compte tenu de son rôle moteur pour notre region et pour l’ensemble de notre pays.