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Rougeole : comment le Maroc est en passe de gagner la bataille

Face à une recrudescence de la rougeole, une maladie extrêmement contagieuse, le gouvernement a mis en place une série de mesures pour freiner la propagation du virus et renforcer la couverture vaccinale. Dans une interview accordée à nos confrères de «Hespress» Amine Tahraoui, ministre de la Santé et de la protection sociale, a expliqué comment la mobilisation des ressources et la stratégie de vaccination ont permis de contenir l’épidémie. Le responsable gouvernemental a insisté, par ailleurs, sur l’importance de renforcer les efforts visant à lutter contre la désinformation autour de cette maladie.

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Le Maroc, à l’instar d’autres pays, est confronté depuis plusieurs mois à une flambée de cas de rougeole, maladie hautement contagieuse. Bien que la situation semble s’améliorer, la vigilance doit rester de mise. Dans une interview donnée à nos confrères de «Hespress», le 27 mars, le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Amine Tahraoui, est revenu sur cette crise sanitaire, rappelant comment le Maroc a pu endiguer cette épidémie qui a coûté la vie à des centaines de personnes, en particulier les enfants.

Une flambée mondiale et des répercussions locales

La rougeole, longtemps considérée comme une maladie sous contrôle grâce à la vaccination, connaît depuis deux à trois ans une recrudescence au niveau mondial. Amine Tahraoui insiste : «La rougeole est une maladie bien plus contagieuse que d’autres infections comme la Covid-19. Une personne infectée peut en contaminer entre 12 et 18 autres».

Dès lors, en l’espace de deux ans, le Maroc a été confronté à trois vagues épidémiques successives, chacune imposant son lot de défis et mettant à l’épreuve la résilience de son système de santé. La première, survenue à la mi-2023, a pu être contenue grâce à une stratégie de prévention et de vigilance renforcée, limitant ainsi sa propagation et son impact sur les infrastructures hospitalières.

La seconde vague, qui a émergé au début de l’année 2024, bien que plus marquée, a eu un effet modéré, permettant aux autorités sanitaires d’ajuster leur dispositif de riposte en fonction des enseignements tirés de la crise précédente. Mais c’est la troisième vague, apparue en octobre 2024, qui a constitué le plus grand défi sanitaire. Son intensité et sa durée ont mis sous tension les établissements hospitaliers, contraignant le gouvernement à mobiliser des ressources exceptionnelles pour éviter le pire.

Face à cette montée en puissance de l’épidémie, l’exécutif a réagi avec célérité en déployant une réponse sanitaire alliant renforcement des capacités hospitalières, accélération des campagnes de vaccination et multiplication des mesures de contrôle épidémiologique. «Nous avons agi rapidement et avec fermeté pour stopper cette troisième vague», rappelle Amine Tahraoui, soulignant la détermination des autorités à préserver l’équilibre sanitaire du pays et à protéger les populations les plus vulnérables.

Face à l’urgence, les autorités ont initié une campagne de vaccination massive, visant à rattraper le retard immunitaire et à protéger les populations les plus vulnérables, notamment les jeunes enfants, chez qui le risque de complications reste le plus élevé.

«Nous avons lancé une campagne de vaccination intensive, atteignant un taux de couverture de 96% pour plus de 10,6 millions d’enfants», souligne le ministre, illustrant l’ampleur des efforts consentis pour endiguer la propagation du virus. Afin de garantir la pérennité de cette couverture, les stocks de vaccins ont été considérablement renforcés, avec une réserve stratégique de 5 millions de doses. À cela s’ajoute un stock de vitamine A, élément clé dans le renforcement de l’immunité infantile, consolidant ainsi l’arsenal de prévention déployé par le Royaume.

Outre la vaccination, la stratégie du ministère repose sur un suivi hebdomadaire strict de l’évolution des cas, permettant aux autorités sanitaires de réagir promptement et avec précision à chaque fois qu’un foyer épidémique est détecté. Cette surveillance continue s’avère essentielle pour ajuster les interventions en temps réel et prévenir toute résurgence du virus, consolidant ainsi les acquis de cette riposte sanitaire d’ampleur.

Une baisse encourageante des cas, mais la vigilance toujours de mise

Le suivi épidémiologique hebdomadaire révèle une évolution favorable de la situation sanitaire, avec une diminution de 20% des nouvelles contaminations au cours de la dernière semaine. Ce recul témoigne de l’efficacité des mesures mises en place, notamment la campagne de vaccination massive et le renforcement du dispositif de surveillance.

Toutefois, Amine Tahraoui appelle à la prudence et met en garde contre tout relâchement prématuré. «Malheureusement, la semaine dernière, nous avons enregistré 4 décès parmi des enfants non vaccinés, ce qui démontre l'importance cruciale de la vaccination», souligne-t-il, rappelant que l’immunisation demeure la meilleure arme contre l’épidémie. Ces décès illustrent le risque persistant pour les populations les plus vulnérables et renforcent la nécessité d’un engagement collectif en faveur de la couverture vaccinale.

Car, si les résultats sont jusqu’alors globalement encourageants, l’épidémie reste une menace latente, particulièrement dans les régions les plus touchées du Royaume. Souss-Massa, Casablanca et Rabat demeurent sous haute surveillance, ces zones concentrant encore un nombre significatif de cas. Les autorités sanitaires restent mobilisées pour maintenir cette dynamique de recul de l’épidémie, tout en veillant à ce que la vigilance et les efforts de prévention ne faiblissent pas.

Le gouvernement ne se contente pas de répondre à l’urgence sanitaire, il met également en place des stratégies préventives à long terme, relève le responsable gouvernemental. En collaboration avec le ministère de l’Éducation nationale, des unités de vaccination ont été installées dans les écoles pour faciliter l’accès à l’immunisation des élèves. De plus, face à la défiance croissante envers les vaccins, plus de 4.530 associations locales ont été mobilisées, notamment avec le soutien du ministère de l’Intérieur, pour sensibiliser la population et renforcer la lutte contre les préjugés et les fausses informations. Les médias et les professionnels de santé sont appelés à agir dans ce sens main dans la main, ajoute M. Tahraoui

Dossier médical électronique : le partage des données dès 2025

Bien au-delà de la gestion de la rougeole, le Maroc est engagé dans une dynamique de transformation de son système de santé, a déclaré M. Tahraoui. Confronté à un déficit alarmant de 100.000 professionnels de santé, le Royaume a identifié plusieurs leviers pour remédier à cette pénurie. «Nous avons défini plusieurs solutions : l’augmentation des capacités d’accueil des écoles de médecine, la réduction de la durée des études et des mesures incitatives destinées à favoriser le retour des médecins marocains exerçant à l’étranger», a détaillé le ministre de la Santé.

Parallèlement, la numérisation du système de santé s’impose comme un pilier stratégique incontournable. L’introduction du dossier médical électronique vise à optimiser la prise en charge des patients et à fluidifier la coordination entre établissements publics et privés. Dans cette optique, le déploiement du dossier médical partagé permettra, à terme, aux patients de centraliser leurs données de santé et de les mettre à disposition des praticiens de leur choix. Dès la fin de l’année 2025, l’interopérabilité entre les systèmes informatiques des acteurs du secteur, tant ceux du secteur privé que ceux du secteur privé, garantira un partage sécurisé et structuré des informations médicales, marquant ainsi une avancée décisive dans la modernisation du paysage sanitaire national, a expliqué M. Tahraoui.

Territorialisation de la santé : vers une gouvernance optimisée

Dans une volonté affirmée de modernisation et de résilience, le Maroc engage une refonte profonde de son système de santé, plaçant la territorialisation au cœur de sa stratégie. Cette réforme repose sur la mise en place des Groupements sanitaires territoriaux (GST), un nouveau modèle d’organisation qui vise à fédérer les établissements de santé d’une même région sous une gouvernance unifiée, garantissant une meilleure coordination des soins, une optimisation des ressources et une prise en charge plus équitable des patients.

La région de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma a été désignée comme site pilote pour expérimenter ce dispositif avant son déploiement progressif à l’échelle nationale. L’ambition, selon M. Tahraoui, est de repenser l’architecture hospitalière en renforçant les complémentarités entre les structures publiques et en assurant une gestion plus efficiente. «Notre objectif est de bâtir un système plus performant, plus transparent et plus équitable pour l’ensemble des citoyens», a indiqué le ministre, mettant en avant la volonté de l’État d’ancrer ces transformations dans une logique de gouvernance rigoureuse et durable.
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