Lors de la séance plénière consacrée aux questions de politique générale qui a eu lieu lundi à la Chambre des représentants, les députés de l’opposition ont vertement critiqué le rendement du gouvernement dans le domaine de la santé. Tour à tour, les groupes parlementaires se sont relayés pour dénoncer les multiples défaillances du système de santé, mettant en doute l’efficacité des réformes engagées et la capacité de l’Exécutif à répondre aux attentes des citoyens.
Mohamed Ouzzine: «Nos enfants ne croient plus aux slogans»
Dépeignant un secteur miné par de profondes défaillances structurelles – pénurie criante de ressources humaines, équipements vétustes, projets mal planifiés –, M. Ouzzine s’est également moqué d’un phénomène qu’il qualifie de «fuite des responsables vers les cliniques étrangères». Et de s’interroger, non sans ironie: «Comment un simple citoyen pourrait-il avoir foi en un hôpital public alors que ses propres dirigeants le fuient ?»
Des promesses qui s’évaporent
Abderrahim Chahid: «Des hôpitaux qui ressemblent à des gares routières»
Le député USFP a également pointé du doigt la non-respect de l’engagement relatif au «médecin de famille», censé assurer le suivi de 300 à 400 familles par praticien. Quant à la surveillance médicale obligatoire des femmes enceintes, là aussi, le secteur public n’a pas été à la hauteur, a-t-il ajouté. M.Chahid a également dénoncé l’échec du gouvernement à alléger le fardeau financier des Marocains en matière de santé publique, notamment par le biais de la carte sanitaire numérique. À cela s’ajoute le projet de télémédecine, qui n’a pas non plus connu une avancée significative. Le député socialiste a en outre fustigé l’état des véhicules d’urgence, affirmant que «le Maroc ne possède pas de véritables ambulances, seulement des véhicules portant cette étiquette, mais dépourvus des équipements nécessaires». Et de conclure, avec amertume: «Le vrai patron du secteur, aujourd’hui, c’est l’agent de sécurité», allusion faite à son rôle en tant que maître incontesté régulant le flux des patients, au gré de ses humeurs et de ses intérêts, à l’entrée des établissements hospitaliers.
Le chef du groupe parlementaire du Parti du progrès et du socialisme, Rachid Hammouni, s’est dit pour sa part vivement inquiet du sort du chantier de la couverture sanitaire universelle, menacé, selon lui, de sombrer dans l’échec à cause d’un ensemble de dysfonctionnements non résolus. Il a interrogé, dans ce sens, le Chef du gouvernement sur les raisons pour lesquelles 8,5 millions de Marocains restent en dehors du système de couverture médicale. Il a aussi critiqué les critères d’éligibilité au «score social» qui prive certaines catégories de l’accès aux soins, ainsi que le chaos régnant dans le secteur privé. M. Hammouni a enfin mis en garde contre un «épuisement des caisses de couverture» et la montée en flèche des coûts, notamment à travers des protocoles médicaux inadaptés. Il a estimé que 80% des remboursements bénéficiaient au secteur privé, une situation qui met à mal la finalité même du système de santé publique.
Mustapha Ibrihimi fustige le gouvernement pour ses retards
Le député Mustafa Ibrahimi, membre du groupement parlementaire du Parti de la justice et du développement (PJD), a vivement critiqué quant à lui l’Exécutif pour sa gestion du chantier de la protection sociale. M. Ibrahimi a accusé le gouvernement de ne pas avoir respecté le calendrier fixé par Sa Majesté le Roi pour la mise en œuvre de ce projet stratégique. Il a ainsi affirmé: «Nous avons alerté à plusieurs reprises sur les dysfonctionnements dans la mise en œuvre de la protection sociale», dénonçant le discours rassurant du Chef de l’Exécutif, qu’il juge déconnecté de la réalité. Selon lui, contrairement à l’affirmation du gouvernement, la généralisation de la couverture sanitaire, censée être achevée en 2022, ne concerne à ce jour que 75% de la population. Le député PJD a par ailleurs reproché à l’Exécutif de dilapider les deniers publics, affirmant que 70 à 80% des fonds dédiés à la couverture sanitaire bénéficient actuellement au secteur privé, en contradiction avec «la philosophie même de la protection sociale, selon laquelle le secteur public doit être le garant fondamental de la dignité du citoyen».
Hôpitaux en crise et industrie pharmaceutique menacée
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Pour asseoir ce projet ambitieux, le gouvernement a mis en place une nouvelle architecture pour la formation de base, à travers la création de trois Facultés de médecine et de pharmacie et trois Centres hospitaliers universitaires à Errachidia, Béni Mellal et Guelmim, a-t-il rappelé. Grâce à ces efforts, la capacité d’accueil des postes pédagogiques dans les Facultés de médecine et de pharmacie et de médecine dentaire s'est appréciée de 88% en 2024 par rapport à 2019, a-t-il poursuivi, ajoutant que le gouvernement s’employait à augmenter cette capacité pour atteindre 7.543 postes à partir de 2027, comme prévu dans l’accord-cadre.
En outre, la capacité d’accueil des Instituts supérieurs des professions infirmières et techniques de santé a été également portée de 4.000 postes en 2021-2022 à plus de 7.000 postes en 2023-2024, soit une hausse de près de 75%, a-t-il fait savoir. Dans le même sens, le gouvernement poursuit son action soutenue pour renforcer le système de formation médicale, en réduisant la durée de formation dans les Facultés de médecine de 7 à 6 ans à partir de l’année académique 2022-2023, afin de pallier le déficit lié aux ressources humaines médicales, a-t-il relevé.
