La dynamique de reconstruction et de développement des zones touchées par le séisme d’Al Haouz est lancée depuis quelques jours. Il s’agit d’une phase délicate qui demande beaucoup de réflexion, malgré l’urgence de la situation. «Il va falloir reloger plusieurs milliers de personnes qui ont été témoins d’un véritable drame où elles ont tout perdu. C’est pourquoi, bien que nous soyons encore en deuil, il faut savoir prendre les bonnes décisions rapidement», a déclaré Mehdi Alioua, sociologue et enseignant-chercheur à l’Université Internationale de Rabat (UIR), lors de son passage à l’émission «L’Info en Face» consacrée spécialement au chantier de reconstruction après le séisme d’Al Haouz. Ce dernier insiste également sur l’importance de tenir compte de la reconstruction individuelle et humaine qui devra se faire en parallèle avec le chantier de reconstruction des maisons. «Il faut prendre en considération le fait que ces gens ont non seulement besoin d’un nouveau toit pour les abriter, mais également de se reconstruire eux-mêmes et d’avoir de nouveaux attachements. Il faut les aider à trouver la force psychologique pour tout bâtir de nouveau et rester fort malgré tout ce qu’ils ont perdu. Il ne faut pas oublier non plus qu’ils ont besoin d’aide pour réapprendre à gagner leur vie, notamment grâce à des activités génératrices de revenus, l’acquisition d’animaux domestiques...», souligne-t-il.
Ce phénomène peut bien s’accentuer maintenant après la catastrophe. D’où la nécessité de prévoir une vision plus élargie par rapport à cette réalité qu’une simple reconstruction de maisons soufflées par le séisme», souligne-t-il. Et de conclure : «pour trouver le schéma de reconstruction le plus idéal possible, il faut mieux connaître le terrain dont on dispose, s’appuyer sur les relais communautaires et surtout écouter les gens pour répondre à leurs besoins qui peuvent être différents d’un douar à l’autre, voire d’une famille
à l’autre». n
L’IA inadaptée pour concevoir les nouveaux logis
Le sociologue note, par ailleurs, que pour reconstruire sur de bonnes bases ce qui a été détruit par le séisme, il faut tenir compte de l’attachement des victimes à leur terre, leurs racines et leurs habitudes, mais surtout de leurs besoins réels en cette époque. «Beaucoup de personnes dans les villes découvrent à peine comment vivent ces gens dans les zones enclavées. Pour les aider réellement, il faut savoir répondre à leurs besoins», affirme Mehdi Alioua. Et d’ajouter : «nous voyons sur les réseaux sociaux certaines personnes qui demandent à l’intelligence artificielle de construire un village idéal. Mais ce n’est pas comme ça qu’il faut procéder. La véritable intelligence n’est pas toujours rationnelle, elle est aussi basée sur l’émotionnel et le ressenti. Or l’intelligence artificielle ne connaît pas ces gens. La machine va simplement prendre les images qu’on lui a codées et imaginer des constructions sans prendre en considération le vécu, le ressenti et les besoins de ces populations».Être à l’écoute des populations sinistrées
L’invité de «L’Info en Face» estime que même si le débat sur la reconstruction avance rapidement et que la dynamique va dans le bon sens globalement, il sera difficile de satisfaire tout le monde. «Quelle que soit la bonne volonté des pouvoirs publics, la décision finale concernant les détails de reconstruction sera très compliquée à prendre. Elle ne sera jamais parfaite, parce que tout doit se faire dans l’urgence, d’autant que l’hiver approche à grands pas», indique-t-il. Le sociologue note, en outre, qu’il ne faut pas oublier que le séisme va probablement encourager le mouvement d’«exode rural». C’est pourquoi les solutions proposées doivent être adaptées à cette situation. «Même avant le séisme, plusieurs villages étaient essentiellement habités par les femmes, les enfants et les personnes âgées. Les hommes partent généralement dans les villes pour travailler.Ce phénomène peut bien s’accentuer maintenant après la catastrophe. D’où la nécessité de prévoir une vision plus élargie par rapport à cette réalité qu’une simple reconstruction de maisons soufflées par le séisme», souligne-t-il. Et de conclure : «pour trouver le schéma de reconstruction le plus idéal possible, il faut mieux connaître le terrain dont on dispose, s’appuyer sur les relais communautaires et surtout écouter les gens pour répondre à leurs besoins qui peuvent être différents d’un douar à l’autre, voire d’une famille
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