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Lundi 23 Juin 2025
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Maquillage permanent : les dessous d’une pratique en plein essor au Maroc

Microblading, glaçage des lèvres, eyeliner permanent… Le maquillage permanent connaît un véritable engouement chez les Marocaines, attirées par la promesse d’un visage toujours frais sans effort quotidien. Mais cette quête de confort et d’esthétique durable n’est pas sans danger lorsqu’elle est confiée à des mains non professionnelles. En l’absence de réglementation claire, les prestations à bas prix prolifèrent, souvent au mépris des règles d’hygiène et de sécurité, exposant les clientes à des complications parfois irréversibles.

Un pigment de mauvaise qualité peut contenir des substances nocives comme des métaux lourds ou du carbone black, responsables de réactions allergiques et de risques cancérigènes. Microblading, glaçage des lèvres, eye-liner permanent... Le maquillage permanent connaît un véritable engouement chez les Marocaines, attirées par la promesse d’un visage toujours frais sans effort quotidien. Mais cette quête de confort et d’esthétique durable n’est pas sans danger lorsqu’elle est confiée à des mains non professionnelles. En l’absence de réglementation claire, les prestations à bas prix prolifèrent, souvent au mépris des règles d’hygiène et de sécurité, exposant les clientes à des complications parfois irréversibles.

Avoir bonne mine sans se maquiller chaque matin : un rêve pour beaucoup de femmes, désormais accessible grâce au maquillage permanent. Cette pratique connaît un véritable essor au Maroc depuis quelques années, séduisant de plus en plus de femmes en quête de confort et de naturel. Et à l’approche de l’été, la demande explose. Soleil, chaleur, baignades... la saison invite à alléger sa routine beauté. Pour beaucoup de Marocaines, le maquillage permanent s’impose alors comme la solution idéale pour afficher un teint frais et des traits définis, sans effort quotidien.

Mais en quoi consiste réellement cette technique ?

Soumaya Dehbi, dermographe spécialisée en maquillage permanent, nous en explique les principes : «Le maquillage permanent est une technique esthétique qui consiste à déposer un pigment sous la surface de la peau de manière superficielle, afin d’améliorer ou de recréer certaines zones du visage telles que les sourcils, les lèvres ou les yeux». Contrairement au tatouage classique, la pigmentation ne pénètre pas profondément dans la peau. «On utilise une aiguille ou une lame, manuelle ou mécanique, pour introduire le pigment de façon très contrôlée, sans atteindre les couches profondes de la peau», précise-t-elle. La profondeur d’introduction varie selon plusieurs critères, notamment «l’épaisseur et la nature de la peau, l’âge de la cliente – la peau étant plus épaisse chez les jeunes et plus fine chez les personnes âgées – ainsi que la zone traitée». D’où l’importance d’adapter le matériel utilisé : «Il existe différents types et tailles d’aiguilles, et une bonne formation est essentielle pour faire le bon choix, éviter de trop pénétrer la peau, et ainsi limiter les risques de saignements, d’instabilité du pigment ou de virage de couleur dans le temps».

Des racines médicales à une tendance esthétique

Loin d’être une invention récente, le maquillage permanent trouve ses origines en Chine. «À l’origine, la technique a été mise au point pour des raisons médicales, notamment pour aider les patients atteints de cancer ou d’alopécie à retrouver l’apparence de leurs sourcils», rappelle Soumaya Dehbi. Le microblading, cette méthode dite «poil à poil», a d’abord été un outil de reconstruction avant de devenir une pratique esthétique populaire.

«Les premières clientes étaient des femmes ayant perdu leurs poils à cause d’une maladie. Pour elles, retrouver une ligne de sourcils, c’était aussi retrouver confiance en soi, une vie sociale, et un certain bien-être au quotidien.» Depuis, la technique s’est démocratisée, franchissant les frontières pour gagner l’Europe, puis l’Afrique, notamment le Maroc, où elle s’est largement popularisée depuis 2016.



La spécialiste insiste, par ailleurs, sur l’importance de la formation dans le métier du maquillage permanent. «La formation est cruciale dans ce métier», explique Soumaya Dehbi, qui elle-même a été formée auprès de praticiennes certifiées en Europe, notamment en Belgique, en France et en Espagne, où elle a pu acquérir une expertise solide dans toutes les techniques liées à cette pratique : du microblading manuel à la pigmentation à la machine, en passant par la reconstruction esthétique.

La formation professionnelle et la qualité des pigments, des bases indispensables

«La formation englobe plusieurs aspects essentiels pour garantir un résultat précis et sécuritaire. Le choix et la maîtrise des aiguilles, leur épaisseur, leur type, et leur usage manuel ou mécanique font partie intégrante du processus. La maîtrise de la machine, qui vibre, et la précision des gestes sont, également, indispensables.» La spécialiste souligne aussi l’importance des mesures exactes pour créer une forme de sourcils parfaitement adaptée à chaque cliente. «On utilise un fil et une règle spéciale pour respecter la symétrie et les traits du visage», précise-t-elle. La spécialiste rappelle que chaque technique demande une formation spécifique, souvent dispensée par des experts reconnus, avec un suivi continu permettant une montée en compétences progressive à travers plusieurs niveaux.

Cependant, au Maroc, «il n’existe pas encore de diplôme officiel ni de certification reconnue par les autorités», souligne Soumaya. La reconnaissance repose donc avant tout sur l’expérience, la réputation et la qualité du travail observée sur le long terme, notamment grâce aux photos des résultats cicatrisés après plusieurs mois, voire plusieurs années.

Au-delà de la technique, la connaissance des pigments et de leurs compositions est fondamentale. Ceux-ci varient selon la zone traitée : sourcils, lèvres, yeux, reconstruction mammaire ou camouflage de cicatrices. «Il existe des pigments spécialement conçus pour chaque partie du corps, fabriqués selon des normes très strictes, notamment en Europe, où les certifications garantissent la sécurité. Les pigments végans, non testés sur les animaux, sont particulièrement recommandés, car ils assurent une meilleure tolérance», ajoute-t-elle.

À l’inverse, un pigment de mauvaise qualité peut contenir des substances nocives comme des métaux lourds ou du carbone black, responsables de réactions allergiques, de risques cancérigènes ou encore de virages de couleur devenant bleu, vert ou rouge avec le temps.

«Au Maroc, beaucoup de pigments sont vendus librement, souvent importés de Chine, à bas prix (environ 100 dirhams pour un pigment qui peut servir à 30 clientes). Ces produits, non certifiés, représentent un danger réel pour la santé», alerte la spécialiste. Un pigment de qualité coûte beaucoup plus cher, autour de 800 dirhams pour 15 ml, et nécessite souvent plusieurs nuances pour s’adapter à la carnation et à la colorimétrie de chaque cliente. «Les clientes doivent impérativement être informées du pigment utilisé, pouvoir vérifier sa composition et sa certification afin d’éviter tout risque», insiste Soumaya Dehbi.

Manque d’une réglementation claire

Elle souligne aussi que le maquillage permanent au Maroc est confronté à un manque de réglementation claire et à une sensibilisation encore trop limitée auprès du grand public. «Les clientes doivent impérativement se renseigner sérieusement avant de choisir leur praticien», explique-t-elle.

Pour cela, il est essentiel de consulter des avis fiables sur les réseaux sociaux ou via le bouche-à-oreille, mais surtout de vérifier des photos cicatrisées, prises plusieurs mois après la procédure, afin de juger du résultat durable.

Elle insiste, par la même occasion, sur la nécessité de demander des informations précises concernant les pigments utilisés, leur certification et leur provenance. «Un professionnel sérieux publiera uniquement ses propres photos, réalisées dans son espace de travail, et n’hésitera pas à vous montrer les garanties liées à la qualité des produits et au respect des normes d’hygiène». Il faut aussi se méfier des prix trop bas, car le tarif d’une prestation reflète bien souvent la qualité de la formation, des matériaux et du pigment.

Au-delà des exigences techniques, Soumaya rappelle que ce métier demande un engagement rigoureux. «Travailler sur la peau humaine implique une grande responsabilité, d’où l’importance de rassurer la cliente avant, pendant et après la séance.» La maîtrise technique doit s’accompagner d’un suivi attentif afin d’éviter les complications ou réactions inattendues. Sur le plan professionnel, la dermographe affirme que le marché marocain est en pleine expansion, notamment dans les grandes villes comme Casablanca et Marrakech, mais peu de praticiens respectent pleinement les normes d’hygiène et bénéficient de formations sérieuses. «La plupart des vrais spécialistes se forment à l’étranger ou auprès d’experts reconnus, car les formations locales de qualité restent rares. L’absence de diplôme officiel et de certification reconnue au Maroc rend indispensable un cadre réglementaire plus strict, ainsi qu’une meilleure information du public. Nous espérons que cela changera bientôt», conclut-elle.

Les dangers d’un maquillage permanent mal exécuté

Les risques liés à un maquillage permanent mal réalisé sont nombreux et graves. «Ils incluent des réactions allergiques sévères nécessitant une prise en charge médicale, des cicatrices ou déformations permanentes, ainsi que des virages de couleurs inesthétiques comme le vert, le bleu ou le rouge», indique Soumaya Dehbi, dermographe spécialisée en maquillage permanent. Ces erreurs peuvent avoir un fort impact psychologique, comme en témoigne l’exemple d’une jeune étudiante de 20 ans qui a cessé de sortir à cause de son apparence.

Par ailleurs, «le non-respect des règles d’hygiène, notamment l’utilisation d’aiguilles non stérilisées ou partagées, expose au risque de transmission de maladies graves», ajoute-t-elle. Les résultats esthétiques peuvent également être catastrophiques si la forme choisie n’est pas adaptée ou si le pigment est injecté trop profondément.

De plus, les coûts du détatouage, «environ 800 dirhams par séance et souvent inefficace, sont élevés et difficiles à supporter». Pour prévenir ces dangers, Soumaya Dehbi insiste sur des mesures strictes d’hygiène et de sécurité : «La peau doit être nettoyée avec un antiseptique sans alcool, les aiguilles et bagues utilisées doivent être stérilisées, à usage unique et présentées à la cliente avant emploi, les déchets médicaux doivent être éliminés dans des contenants spécialisés, et les praticiens doivent porter des gants propres, changés ou désinfectés fréquemment».

Elle précise aussi qu’«il est crucial que le travail s’effectue dans un environnement propre, dédié exclusivement à cette activité, en évitant toute contamination croisée avec d’autres pratiques comme la pose de vernis ou la cire, et que seuls des pigments certifiés et contrôlés soient utilisés». Malheureusement, «de nombreux praticiens non formés ou peu rigoureux ne respectent pas ces normes, augmentant ainsi considérablement les risques pour les clientes».

Conseils essentiels

Pour garantir une expérience sécurisée et satisfaisante, Soumaya Dehbi, dermographe spécialisée en maquillage permanent, recommande de :
  • Privilégier un praticien reconnu, avec des avis vérifiés et un portfolio authentique.
  • S’assurer que les pigments utilisés sont végans et certifiés selon des normes européennes strictes.
  • Vérifier rigoureusement les conditions d’hygiène : usage d’aiguilles à usage unique, port de gants et désinfection complète.
  • Ne pas choisir uniquement en fonction du prix, éviter les prestations trop bon marché.
  • Se renseigner sur les contre-indications telles que le diabète, les traitements dermatologiques ou la fragilité cutanée.
  • Respecter les soins post-traitement pour une cicatrisation optimale.
  • Consulter un dermatologue dès les premiers signes de réaction anormale ou d’insatisfaction.
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