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«Le marché des fusions-acquisitions a été extrêmement affecté par la crise financière»

Michael Zaoui, Ancien vice-président de Morgan Stanley et fondateur de Zaoui Capital limited.

«Le marché des fusions-acquisitions a été extrêmement affecté par la crise financière»
Banquier de renommée internationale, M. Zaoui a fait toute sa carrière chez Morgan Stanley, depuis 1986 jusqu'à l'avènement de la crise financière. Dans cette interview, réalisée à Londres en marge de la Conférence annuelle du Maroc sur l'investissement, M. Zaoui analyse la situation actuelle de l'activité des fusions-acquisitions, en lien avec la crise économique et financière.

ÉCO PLUS : D'abord, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Michael Zaoui : J'ai été banquier chez Morgan Stanley pendant plus de 20 ans. Le jour où j'ai quitté cette banque d'affaires (c'était au début de l'été 2008), ma dernière position était «Vice-Chairman Institutional Securities». J'ai présidé également les activités de fusion-acquisition en Europe. Après 20 ans de carrière, j'ai pris la décision de quitter Morgan Stanley. Depuis, j'ai monté ma propre firme de conseil en stratégie financière et en fusions-acquisitions.

Quelles sont les opérations que vous avez menées et qui auraient marqué le plus votre carrière ?

J'ai participé à plusieurs opérations de restructuration de l'industrie européenne. Celles qui ont occupé plus de place dans les médias sont : la fusion entre Arcelor et Mittal (sidérurgie), la fusion entre Sanofi et Aventis (pharmacie), la fusion entre Elf et Total (pétrole), la fusion entre Unibail et Rodamco (immobilier), la fusion entre Suez et la Lyonnaise des eaux (ensuite avec Gaz de France), la cession du CCF à HSBC, la défense de la Société générale contre la BNP. En plus, j'ai été pendant longtemps banquier de Gucci, etc.

Ces opérations couvrent principalement le marché européen. N'avez-vous jamais été associés à des opérations de restructuration initiées par des entreprises marocaines ?

Tant que j'opérais à Wall Street, au niveau de responsabilité que j'avais, il était bien entendu très important de concentrer mes efforts sur la base de la clientèle de Morgan Stanley. A un moment donné, Morgan Stanley a essayé d'intervenir sur un ou deux dossiers au Maroc. J'avais participé aux efforts entretenus dans ce cadre. Aujourd'hui, la situation est différente. Dans le sens où je suis libre à la fois de gérer mon temps et de m'engager aux côtés des entreprises qui m'intéressent, il est certain que le Maroc dispose d'un potentiel énorme de ce côté-là.

Comment se porte le marché des fusions-acquisitions dans ce contexte précis de crise économique et financière internationale, notamment au niveau de la City
de Londres ?


Le marché des fusions-acquisitions a été extrêmement affecté par la crise financière. Les volumes d'activité ont baissé de moitié entre 2007 et 2008, et encore probablement de la même ampleur de 2008 à 2009.
C'est un ajustement majeur auquel les grandes banques d'affaires ont dû faire face, à la fois dans l'allocation de leurs ressources que dans la répartition de leurs revenus. Cela signifie que le marché des fusions- acquisitions (c'est-à-dire la prise de contrôle d'entreprises par d'autres entreprises) est extrêmement lié aux marchés des capitaux de manière générale (bourse, marché de la dette…). Il n'y a pas de surprise de ce côté-là. La City, en tant qu'intervenant majeur, a été extrêmement affectée par ces développements. Aujourd'hui, on assiste déjà à une certaine stabilisation des marchés financiers. Par contre, les activités de fusion-acquisition ne semblent pas encore repartir. Il y a certes quelques grosses opérations qui ont été annoncées, mais depuis la crise, peu d'entre-elles ont été conclues.
On verra ce qui arrivera à celles qui ont déjà été annoncées. On verra surtout s'il y aura un regain de volume dans les mois qui viennent. De manière générale, la stabilité est toujours un facteur qui encourage l'activité des fusions-acquisitions. A partir du moment où cette stabilité est assurée pour un certain temps, je crois qu'on verra les volumes d'opérations remonter de manière assez substantielle.

Vous restez donc optimiste par rapport à la sortie de crise ?

Je ne veux pas dire que je suis optimiste sur la sortie de la crise économique, car j'estime qu'il y a encore des déséquilibres très importants et fondamentaux qui n'ont pas été réglés, le chômage étant le plus évident, sans oublier les systèmes de change entre les économies mondiales. Je reste néanmoins préoccupé par la situation économique. Ma réponse portait plus sur les capacités des entreprises qui se sont largement redressées ou stabilisées, d'un point de vue financier, à réengager des opérations de croissance externe. Je peux envisager un cas de figure dans lequel l'activité de fusion-acquisition repartira de manière modérée plutôt qu'excessive sans que la véritable sortie de la crise économique ne soit entre nos mains.

Vous venez d'assister à la première édition de la Conférence annuelle du Maroc sur l'investissement à Londres. Quelle appréciation faite-vous de cette démarche originale de promotion qui sera désormais un rendez-vous annuel inscrit dans l'agenda des acteurs de la City ?

Je suis très positif sur cette initiative. D'ailleurs, je voudrais rendre hommage à S.A. notre Ambassadrice Lalla Joumala d'avoir initié cette excellente démarche. Il faut mieux faire connaître le Maroc. Il faut convaincre les investisseurs potentiels tant en termes d'investissements directs qu'en termes d'investissements sur les marchés de capitaux marocains. C'est un exercice qui prend du temps et s'inscrit aussi dans la logique de notre temps. Aujourd'hui, les marchés dits émergents, ont la faveur des investisseurs. Le Maroc a des atouts exceptionnels et il aurait été dommage de ne pas en profiter. Quant au résultat d'une telle initiative, ils se présenteront certainement au fur et à mesure. L'initiative doit être continue et elle le sera. Le Maroc sera plus connu du monde, en particulier anglais puisque nous sommes dans la City au moment où nous parlons.

En tant que Consultant Marocain de haut niveau, le fait d'être associé à un évènement d'une telle ampleur au cœur de la City, qu'est-ce que cela vous inspire comme sentiment ?

D'abord un sentiment de fierté. Je suis enfant du pays. Voir une délégation d'une telle importance, dans le contexte dans lequel je travaille depuis maintenant 20 ans, est un grand moment. Faire partager à mes collègues anglais, ou anglo-saxons, tout le talent et le professionnalisme de la délégation marocaine, c'est également un facteur très positif. Y avoir été associé, dans ma petite mesure, me remplit également de joie.
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Les rois des OPA

Natif de Fès, Michael Zaoui est passé par Sciences Po, la London School of Economics et la Harvard Business School. Fin juin 2006, en tant que patron de Morgan pour l'Europe, il a été conseiller d'Arcelor, ciblée à l'époque par une OPA hostile de Mittal. Il a dû finalement s'incliner face à la victoire d'un autre Zaoui, Yoël, son frère qui exerce le même métier et la même fonction chez Goldman Sachs, conseiller de Mittal. La presse spécialisée les nomme les «rois des OPA».
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