Menu
Search
Lundi 29 Décembre 2025
S'abonner
close
Lundi 29 Décembre 2025
Menu
Search

«L'opération ONA-SNI permet de positionner Casablanca en tant que place régionale légitime»

Parole de Karim Hajji, Directeur général de la Bourse de Casablanca

«L'opération ONA-SNI permet de positionner Casablanca en tant que place régionale légitime»
Les retombées de la réorganisation stratégique des groupes ONA et SNI sur l'activité boursière ne se sont pas fait attendre, notamment en termes de volume d'échanges. Tout en saluant la communication exemplaire ayant accompagné l'annonce de cette opération, le DG de la Bourse de Casablanca se montre convaincu que le marché des capitaux entame une nouvelle phase de développement, similaire à celle vécue au milieu des années 90 en marge des grandes privatisations. De par la liquidité qu'elle devrait apporter au marché, pour K. Hajji, l'opération donne la possibilité d'envisager sereinement l'introduction de nouveaux produits et sera en mesure d'attirer davantage d'investisseurs, aussi bien nationaux qu'internationaux.

ÉCOPLUS : Quelle appréciation faites-vous de l'opération de la réorganisation ONA-SNI ?

Karim Hajji :
C'est une opération majeure pour la Bourse de Casablanca puisqu'il s'agit d'une Offre publique de retrait (OPR) qui concerne les deux principaux holdings cotés, suivie de leur fusion et in fine, d'Offres publiques de vente (OPV) portant sur certaines valeurs détenues par ces deux holdings. Je souhaiterais d'abord saluer la qualité de la communication faite par les groupes ONA et SNI, d'une grande transparence et d'une pédagogie exemplaire. Chose qui a permis de rassurer le marché sur les objectifs visés par cette opération. S'il n'y avait pas toute cette communication pour préciser justement quelle serait l'évolution du holding nouvellement créé, on aurait pu craindre que la Bourse réagisse négativement. Mais grâce à la qualité de cette information, la Bourse l'a accueillie très favorablement.
C'est une opération majeure dans la mesure où elle va permettre d'avoir plus de liquidités. Qui dit plus de liquidités dit forcément plus d'activités boursières et plus d'intérêts de la part des investisseurs institutionnels ou personnes physiques, ce qui donne la possibilité d'envisager sereinement l'introduction de nouveaux produits, particulièrement le marché à terme et les produits dérivés. Enfin, cette opération permettra de positionner la place de Casablanca en tant que place régionale légitime. Légitime du fait qu'elle aura les liquidités nécessaires pour attirer les investisseurs aussi bien nationaux qu'internationaux.

Quel a été l'impact immédiat de cette opération sur le marché boursier ?

Depuis le 29 mars dernier, la moyenne quotidienne des volumes échangés sur le marché frôle les 900 millions de DH. Le marché a salué clairement cette opération. Le marché des capitaux entame une nouvelle étape de développement. Je pense que nous verrons des volumes en 2010 sensiblement supérieurs aux niveaux observés en 2009, tirés non seulement par cette opération, mais aussi par les Offres publiques de vente qui vont intervenir dans son sillage. Il s'agit notamment de la cession par le holding nouvellement créé des participations dans le capital de Cosumar, Lesieur, Centrale Laitière, etc.

Peut-on situer cette dynamique de volume par rapport au mouvement attendu de réallocation des portefeuilles, suite à l'annonce de cette opération ?

Le marché anticipe clairement une réallocation d'actifs du holding nouvellement créé. C'est la raison qui explique le niveau des volumes échangés sur le marché durant les dernières séances. Maintenant, dans quel secteur les actifs du holding seront réalloués ? La communication des deux groupes était claire à ce sujet. Leur stratégie à moyen terme consiste à développer un certain nombre d'entreprises, notamment dans les secteurs des télécoms, les énergies renouvelables, la finance, mais aussi en agissant en tant qu'incubateur de nouveaux projets qui, une fois leur maturité sera atteinte, seront cédés en Bourse.

Le retrait de l'ONA et de la SNI de la cote se traduirait automatiquement par une baisse de la capitalisation boursière. Qu'en pensez-vous ?

Cela ne me gêne pas outre mesure. Ce n'est pas la capitalisation qui fait le volume. Ce qui fait le volume et intéresse les sociétés de Bourse ainsi que les institutionnels, c'est d'abord le flottant. A titre d'exemple, la SNI était une valeur importante en termes de capitalisation, mais en termes de flottant, sa part était faible. Donc, l'opération qui a été annoncée par les groupes ONA et SNI va permettre d'améliorer sensiblement le flottant par rapport à la capitalisation. Aujourd'hui, nous sommes à un flottant qui oscille entre 10 et 15% (plus proche de 10 que de 15%). A terme, nous allons assister à une amélioration significative du flottant qui devrait dépasser les 15%.

Quid de la représentativité de la Bourse de Casablanca à l'issue de cette opération ?

Les holdings étaient surreprésentés à la Bourse de Casablanca. Sachant qu'au niveau mondial, la tendance est plutôt vers le retrait des holdings de la cote ou en tout cas du démantèlement des conglomérats qui ont l'inconvénient d'être peu lisibles pour les analystes financiers et de constituer un coût supplémentaire pour les investisseurs.
Un investisseur préfère choisir lui-même les actions dans lesquelles il va investir plutôt que d'acheter un holding qui est déjà un portefeuille de titres. Il y a un coût à supporter dans la gestion d'un holding et qui ne peut pas être ramené à zéro. Les investisseurs préfèrent investir directement dans les affaires plutôt qu'à travers un holding qui a forcément des charges de fonctionnement.
Aussi, il n'est pas nécessairement pertinent d'avoir plusieurs niveaux de cotation. Vous avez des filiales de l'ONA qui sont cotées. Puis, la SNI cotée détient l'ONA, elle-même, cotée. Donc, on enlève les deux étages qui ne rapportent pas grand-chose finalement au marché. Les filiales cotées seront désormais détenues par un holding non coté. C'est dans l'intérêt de la place d'avoir une visibilité dans ce sens, avec ce que cela implique en termes d'autonomie de la gouvernance. Les filiales vont pouvoir disposer de leurs cash-flows pour leurs propres projets de développement et lever davantage de fonds auprès du système financier marocain. Alors que par le passé, leur marge de manœuvre était limitée par le ratio de division du risque des banques qui, pour rappel, était de 20%. Les banques ne pouvaient pas avoir avec un seul groupe un engagement supérieur à 20% de fonds propres. Or, les groupes ONA et SNI sont importants. Les banques étaient limitées dans le niveau des crédits qu'elles pouvaient accorder aux filiales de ce groupe. Maintenant, les choses sont claires.

Où situerez-vous les retombées de cette opération par rapport aux objectifs que vous vous êtes fixés à l'horizon 2015 ?

Cette opération nous aide à nous rapprocher un peu plus de notre objectif de doublement du nombre de sociétés cotées à l'horizon 2015. Soit directement par les nouvelles entités que le holding pourrait introduire à partir de 2010 et 2011, soit par l'intermédiaire de la liquidité qui va, elle-même, amener plus d'investisseurs à s'intéresser à la Bourse.

Peut-on avoir une idée quantitative sur le potentiel de liquidité que recèle cette opération ?

Du moment que la note d'information, à l'étude au niveau du CDVM, n'est pas encore rendue publique, je n'ai pas à commenter le niveau de la liquidité. Ce dernier est directement lié aux pourcentages que la nouvelle entité céderait éventuellement sur le marché. Je ne peux pas avancer un chiffre précis de liquidité.

Le passage d'une position majoritaire à une position minoritaire, c'est en soi un message fort au sujet de la gouvernance des entreprises, particulièrement celles cotées à la Bourse de Casablanca…

Nous espérons que cet exemple sera suivi par d'autres entreprises en mettant davantage de titres sur le marché. On le voit bien, aujourd'hui, les entreprises cotées à la Bourse, à l'exception de l'ONA et de la SNI qui viennent d'annoncer cette opération, sont souvent contrôlées à plus de 50% par des investisseurs nationaux ou internationaux. Nous espérons que d'autres entreprises seront amenées à émettre sur la place davantage de titres et de se contenter d'un contrôle de 30 à 35% qui, à mon avis, est largement suffisant pour les entreprises de grande taille. A titre indicatif, aux Etats-Unis, il n'est pas rare de voir un investisseur détenant juste 5 ou 10% du capital tout en ayant, de fait, le contrôle de la société, puisqu'il est le premier actionnaire. L'actionnariat est beaucoup plus éclaté.

Mises à part les OPV prévues dans le cadre de cette opération, peut-on s'attendre à de nouvelles introductions dans les mois qui viennent ?

Pour l'instant, nous n'avons pas formellement de dossiers prêts au niveau de la Bourse de Casablanca. Je sais par contre que certains dossiers sont à l'étude chez des banquiers d'affaires. Les entreprises attendaient juste un moment propice pour leur introduction. Pour ma part, je suis convaincu que le marché actuel est un marché porteur pour les introductions en Bourse. Nous avons un niveau de valorisation très convenable, sans être non plus exubérant. Les entreprises peuvent vraiment envisager sereinement une introduction en Bourse.

Le mot de la fin...

Le marché des capitaux entame une nouvelle étape de développement au Maroc. Une étape aussi significative que celle des grandes privatisations du milieu des années 90. Nous attendons à ce que notre place évolue d'une manière extrêmement dynamique dans les années qui viennent, grâce à l'opération ONA-SNI et à celles qui vont suivre.
------------------------------------------------

Modalités de l'opération

La SNI et l'ONA laissent place à un holding unique non coté à travers les étapes suivantes:

• Etape 1 : Offres publiques de retrait
Deux offres publiques de retrait seront déposées sur les titres SNI et ONA par leurs principaux actionnaires respectifs aux prix d'offres de 1.900 DH pour l'action SNI et 1 650 DH pour l'action ONA. Les prix d'offres feront l'objet d'une attestation d'équité délivrée par un expert indépendant, dont la nomination devra être approuvée par le CDVM.

• Etape 2 : Radiation de la cote
Les offres publiques de retrait seront suivies de la radiation des titres SNI et ONA.

• Etape 3 : Fusion SNI-ONA
Un projet de fusion de la SNI et l'ONA sera proposé aux actionnaires des deux entités dans le cadre de leurs assemblées générales extraordinaires.

• Etape 4 : Optimisation et rationalisation du périmètre du groupe
Le nouvel holding d'investissement procédera à une réduction progressive de son périmètre à travers la cession sur le marché boursier du contrôle d'entités autonomisées avec, dans un premier temps, Cosumar, Lesieur et l'ensemble Centrale Laitière-Bimo-Sotherma.
Lisez nos e-Papers