Menu
Search
Mardi 30 Décembre 2025
S'abonner
close
Mardi 30 Décembre 2025
Menu
Search

«Le temps est toujours l’ennemi du recouvrement»

Exporter, c’est bien, se faire payer, c’est encore mieux ! Tel pourrait être le credo de la SMAEX (Société marocaine d’assurance à l’export). Dans l’interview suivante, sa PDG, Nezha Lahrichi, explique en quoi il est urgent de soutenir les exportateurs et de les aider à préserver leurs parts de marché en cette période de crise.

«Le temps est toujours l’ennemi du recouvrement»
«Nous sommes à la veille d’un virage stratégique».

Quelles sont les mesures prises par la SMAEX pour relancer les exportations ?
La SMAEX est le dernier maillon de la chaîne de valeurs dans les exportations, mais pour autant, elle reste un maillon très important puisqu’elle garantit le paiement des opérations commerciales sur l’étranger. Dans cette optique, des dispositifs ont été élaborés avec le gouvernement pour amortir le choc de la crise qui, par ailleurs, n’a pas fini de produire ses effets... La conjoncture actuelle impose de renforcer le principe de précaution, qu’il ne faut pas confondre avec une précaution sans principes, et ce afin de protéger au mieux les exportateurs ; d’où la réactivation du comité de crise de la SMAEX. L’objectif étant d’informer les exportateurs sur la crise et ses conséquences et surtout de les aider à sélectionner leur clientèle étrangère. Nous œuvrons ainsi, pour 2012, à la reconduction de l’assurance publique complémentaire et de l’assurance crédit commercial.

Cette crise des exportations n’affecte-t-elle pas les contrats et les polices d’assurance déjà contractées ?
Nous incitons les exportateurs à déclarer la totalité de leur chiffre d’affaires à l’export afin d’éviter toute créance impayée, étant donné la situation en Europe qui est devenue une zone à risques. On leur conseille aussi de suivre de près leurs créances à l’étranger et de veiller à éviter les situations conflictuelles afin de protéger leurs relations commerciales. La SMAEX les encourage également à diversifier leurs marchés, notamment vers l’Afrique, un débouché qui présente autant d’opportunités que de risques, il faut le préciser. C’est pour cela qu’il est opportun d’exploiter la possibilité d’utilisation de l’assurance publique que la SMAEX gère pour le compte de l’État. Elle couvre en effet les risques politiques, catastrophiques et de non-transfert, autrement dit les difficultés d’ordres politique et administratif qui empêchent ou retardent les transferts de fonds. Certains secteurs, notamment les industries métallurgiques, mécaniques et électriques, ainsi que les branches chimique et pharmaceutique, ont d’ailleurs renforcé leur positionnement sur des marchés nouveaux tels que le Moyen-Orient et l’Afrique.

Quelles perspectives à court et moyen termes ?
Nous sommes à la veille d’un virage stratégique. En effet, avec la création du régulateur dans le secteur des assurances, les opérations d’assurance crédit commercial vont être soumises au Code des assurances et, de ce fait, nous serons autorisés à lancer l’assurance crédit domestique qui permettra d’accompagner l’entreprise marocaine sur tous les marchés. La réforme de l’assurance export publique est également envisagée cette année. On l’adaptera aux nouvelles donnes de l’environnement international et à l’évolution de notre économie. Il est en effet prévu de faire évoluer les quotités garanties, les taux de primes et les conditions d’éligibilité, mais le plus important reste d’étendre la garantie aux investisseurs marocains à l’étranger pour accompagner la dynamique en cours, notamment sur le marché africain.

À propos de ce marché africain, serait-il une panacée pour booster les exportations marocaines ?
Il représente le présent et l’avenir. Le Maroc a fait le choix stratégique de renforcer ses liens économiques avec l’Afrique subsaharienne. La SMAEX a triplé ses engagements sur le continent ! Nous accompagnons ainsi des entreprises dans plusieurs secteurs, dont le BTP, l’agroalimentaire, les technologies de l’information et de la communication, les industries électrique et électronique… Des branches qui disposent d’un fort potentiel de développement en l’Afrique.

Que faire pour remettre à niveau les échanges Sud-Sud ?
Une nouvelle répartition des flux au sein de l’économie mondiale, avec un renforcement des relations Sud-Sud, est en cours. Il faut se dire que le Sud devient important pour le Sud. Au cours de la dernière décennie, les échanges mondiaux ont été multipliés par quatre, alors que les échanges Sud-Sud ont été multipliés par dix ! La question qui nous préoccupe, à la SMAEX, est de mettre l’assurance crédit au service des exigences du développement des échanges intra-africains. Techniquement, si cette assurance couvre le risque d’insolvabilité du client, sa dimension est plus politique que commerciale, car elle est un outil de promotion des exportations et des investissements. L’État a ainsi confié à la SMAEX la gestion de l’assurance crédit publique qui garantit ce que le marché ne couvre pas : les risques politiques et le crédit à moyen terme, le temps étant toujours l’ennemi du recouvrement ! 


Portrait : Une femme de tête et de poigne

Dans les discussions autour de l’analyse économique et du consulting, le nom de Nezha Lahrichi est quasiment incontournable. Ses interventions dans les conférences et forums, ses interventions sur les mémoires universitaires, ses études sectorielles et ses avis à propos de la conjoncture font autorité.
L’actuelle présidente de la Société marocaine d’assurance à l’export est une intellectuelle au long cours. Titulaire d’un doctorat d’État en sciences économiques, elle a contribué, entre autres, à l’élaboration du rapport sur l’état d’avancement des dossiers économiques suivis et initiés par la Primature. Elle a également participé à des débats décisifs sur les questions monétaires et financières, tels l’accompagnement et la préparation de plusieurs projets de lois de Finances, le suivi de dossiers relatifs au système financier, etc.

Sur la gestion du secteur public, elle a suivi les opérations de privatisation, par exemple de la CTM (Compagnie Marocaine de Transport), la BMCE Bank ou encore Maroc Telecom.
Nezha Lahrichi a aussi assumé des fonctions de conseillère au cabinet de la Primature. C’est d’ailleurs l’une des rares personnes à être restées dans ce département pendant près d’une dizaine d’années. Ce faisant, elle a travaillé avec trois premiers ministres : Abdellatif Filali, Abderrahmane Youssoufi et Driss Jettou. En 2005, elle a été nommée présidente de la SMAEX, fonction où on lui a reconnu de la compétence, de l’autorité et du pragmatisme. En mai 2011, elle est désignée par ses pairs à la présidence du CNCE (Conseil national du commerce extérieur), rebaptisé Observatoire des exportations.

Lisez nos e-Papers