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Accueil next Un label global verra-t-il finalement le jour ?

«Les femmes devront être plus solidaires pour saisir les opportunités»

«Les femmes devront être plus solidaires pour saisir les opportunités»

Le Matin Emploi : La création et la gestion d’entreprises par les femmes connaissent un intérêt particulier et un développement rapide à travers le monde. Qu’en est-il du Maroc ?
Laila Miyara : La dernière décennie a connu un bond qualitatif en matière d’entrepreneuriat féminin réalisé grâce aux chantiers de réformes économiques ouverts et aux acquis en matière de droits des femmes. Aujourd’hui, la question de l’intégration de la femme dans le développement socio-économique, la création de la richesse et de la valeur par des femmes intéressent au plus haut niveau, le gouvernement, les institutionnels et les pays du Nord… Cela nous permet d’entrevoir l’avenir avec enthousiasme, optimisme et assurance, mais nous endosse également une responsabilité importante à assumer compte tenu des multiples défis qui nous attendent. Le Maroc s’inscrit aujourd’hui dans un tournant important de son histoire avec la nouvelle Constitution qui a décrété le concept de la parité en tant que droit, un gouvernement avec lequel il faut collaborer et dialoguer pour coller à toutes les orientations stratégiques de développement national, des acquis importants pour les droits des femmes. Malgré que l’entrepreneuriat au Maroc est majoritairement masculin, il existe un vivier important de femmes instruites et potentiellement entrepreneurs, en témoignent les chiffres ci-après :
 Le pourcentage des femmes disposant d’un statut dans la profession autonome, employeuses, indépendantes ou associées se situe à 10,6%.
 Le pourcentage des femmes indépendantes est de 9,3% de la population active
 Le pourcentage des femmes dirigeant des micro-entreprises est de 59,3%, contre 56,8% pour les hommes. Plus de 100 000 femmes dirigeantes de micro-entreprises sont des travailleuses à domicile (source le HCP)
 12 000 femmes sont aux commandes de leurs entreprises soit 10% de l’ensemble des entrepreneurs au Maroc. La force tranquille dont  jouissent les femmes  sert les intérêts de l’entreprise surtout dans la gestion des équipes et dans toutes les activités liées aux relations humaines. Les femmes sont multitâches, ont de la résilience, de l’endurance et de l’énergie  pour exceller sur plusieurs fronts.

Dans quels secteurs les femmes marocaines  évoluent-elles le plus ?
Les entreprises féminines représentent environ 10% du nombre total des entreprises. (Ces pourcentages occultent une dynamique entrepreneuriale féminine extraordinaire qui malheureusement reste cantonnée au secteur non structuré). Elles sont essentiellement des PME/PMI couvrant le secteur des services (37%), du commerce (31%) et de l’industrie (21%) essentiellement le textile, le bâtiment , le tourisme et l’agroalimentaire à des pourcentages beaucoup plus faibles. Avec les mutations que connaît le Maroc, de nouveaux secteurs voient le jour, de nouvelles régions brillent et le changement s’opère doucement, mais sûrement.

Quelle  vision portez-vous sur la situation de la femme entrepreneure marocaine ? Quel est le taux de sa participation dans le développement de l’économie marocaine ?
Malgré les obstacles et les inégalités auxquels les femmes doivent faire face, elles ont su réussir leur intégration et prouver leur présence dans les différents secteurs de l'activité économique grâce aux motivations suivantes :  
 33,3% des femmes ont la volonté de réussir leurs projets personnels
 26,7 % montrent de l’intérêt pour le domaine d’activité qu’elles exercent
 20% cherchent l’opportunité de créer leurs propres entreprises
 10 % des femmes ont la volonté d’acquérir une certaine autonomie  
Les entreprises féminines privilégient le marché local (31%) et national (44%) et seuls 21% font de l’export. L’essentiel de cette dernière catégorie d’entreprises sont de grande taille.
Les femmes ont investi  la scène politique et patronale et font du lobbying pour un environnement d’affaires plus adéquat et des programmes d’appui plus ambitieux.
Outre l’évidence que la femme est dotée de compétences et de capacités égales à celles de son homologue masculin, elle est considérée comme intuitive, rapide et ingénieuse. Elle a  tendance à cultiver les relations personnelles et est présente sur les réseaux. Il est certain que toutes ces avancées ne sont pas suffisantes, et ne sont pas à la hauteur des aspirations des femmes qui n’accèdent pas encre facilement aux postes de responsabilité et de décision pour changer le cours des choses, mais je vois le verre moitié plein et je me dis que toutes ces qualités humaines et intrinsèques  prédestinent la femme à une place de choix et augurent d’un avenir  féminin du Maroc prometteur.  

Quelles sont les difficultés susceptibles d'entraver la bonne marche de l'entreprise au féminin ?
L’entrepreneuriat féminin au Maroc est un défi à relever au gré d’un bras de fer auquel les femmes entrepreneures se livrent au quotidien pour faire face aux obstacles qui entravent le développement de l’entrepreneuriat. Les entreprises féminines sont limitées aux secteurs des services et du commerce, secteurs très compétitifs et où le taux de mortalité est élevé. 70% d’entre elles sont des micro-entreprises, ce qui limite leur accès au financement. Les femmes ont des difficultés à accéder aux marchés, aux différents programmes de financement à cause de leur petite taille et à cause des garanties exigées par les banques. Elles ont aussi des difficultés à s’imposer à cause du poids de la tradition et  du conservatisme encore flagrant de la société.  Elles ne jouent pas encore pleinement leur rôle dans Ie réseautage et le  lobbying pour s’ériger en force de proposition et d’influence auprès des pouvoirs publics et des institutions internationales…

Quelles  sont vos perspectives d’avenir ?
Dans cette dynamique de changement, les femmes devront croire davantage en leurs capacités, doubler d’efforts pour mieux se positionner, pour arracher la reconnaissance de leurs pairs à coup de compétence, de mérite et de résultats. Les femmes devront  être plus à l’écoute de leur environnement, plus solidaires et plus vigilantes pour saisir les opportunités qui s’offrent à elles et pour être un modèle de référence pour le développement économique et social du Maroc. Elles  doivent renforcer leurs capacités dans les domaines techniques, financiers et commerciaux, et intégrer de nouveaux secteurs à forte valeur ajoutée afin de sortir du cercle des micro-entreprises.
Au sein de l’AFEM, nous prônons la performance durable et l’excellence des femmes-chefs d’entreprises. Aujourd’hui avec quelque 600 membres créant plus de 50 000 emplois et avec sept délégations régionales à travers le  Maroc, nous ne pouvons qu’être fières d’avoir hissé l’AFEM au rang des associations professionnelles incontournables et des leviers de développement économique et social de notre pays. L’AFEM c’est aussi un engagement citoyen en faveur de l’insertion professionnelle des jeunes filles au chômage à travers leur requalification et leur mentoring par des membres de notre association. Aujourd’hui, c’est l’action qui prime, il n’ y a plus de place aux slogans et à la propagande. Les femmes n’ont plus rien à prouver. C’est aux conservateurs de changer d’attitude et de coopérer avec toutes les composantes de la société dans un véritable souci de progrès.

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