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Un mode de gestion à l'international

L’internationalisation, enjeu et obligation stratégiques dictés par les mutations successives de l’environnement dans lequel opèrent les entreprises, est devenue la solution de toutes les structures en quête de nouveaux marchés et de nouvelles opportunités. La dimension internationale implique des modifications et des adaptations sur tous les niveaux et affecte toutes les composantes de l’entreprise y compris la fonction RH.

Un mode de gestion à l'international
Abdelhak Moutawakkil Directeur général de l'École supérieure de management et de gestion des ressources humaines Sup’Rh, Casablanca

En fait, la Gestion internationale des ressources humaines (GIRH) consiste à prendre en compte cette dimension nouvelle dans l’élaboration de toutes politiques et pratiques de gestion des ressources humaines. Objectifs : assurer la flexibilité, préserver les spécificités culturelles de chaque pays et,  surtout, assurer la cohérence du travail du groupe. Le directeur international des ressources humaines, étant le responsable de la GIRH, devrait veiller, lors de l’élaboration des politiques RH, à la définition des principes, des valeurs et de l'identité commune au groupe tout en respectant les spécificités culturelles de chaque pays d'implantation. Le point avec Abdelhak Moutawakkil, directeur général de Sup’Rh, et Amine Oulahyane, directeur des ressources humaines du Groupe Atlas Copco Maroc.

Le Matin Emploi : Pourriez-vous définir ce qu'est la gestion internationale des ressources humaines (GIRH) ?
Abdelhak Moutawakkil : La GIRH peut être définie comme «l’ensemble des politiques, des instruments et des pratiques de GRH visant à contribuer à la performance de l’entreprise dans le contexte de son internationalisation». En effet, l'internationalisation de l'entreprise requiert qu'elle ait les ressources humaines qualifiées et compétentes pour porter son développement à l’international. Si la gestion des ressources humaines au niveau national paraît relativement aisée ou du moins maitrisée, elle l'est beaucoup moins au niveau international, du fait de la diversité et l'interférence des cultures.
La notion du travail, la perception de la réussite, les ressources de motivation diffèrent d'une culture à une autre.
Cependant, il faut faire attention. Le concept de GIRH est très large. Dans une entreprise, l’histoire de la GIRH ne commence pas simplement avec le premier salaire versé à l’étranger ou la présence d’une unité de production hors des frontières. Elle prend ses premières formes dès que les salariés au niveau national ont à intégrer la réalité internationale dans leurs activités. À titre d’exemple, dans le secteur du tourisme, la formation des ressources humaines doit intégrer la « dimension internationale » pour mieux tenir compte des exigences des clients.

D’après vous, quels sont les aspects de la GRH qui sont prioritairement concernés par l’internationalisation ?
Les domaines prioritaires relevant de la GIRH sont très divers et touchent, à peu près, à l’ensemble des composantes de la fonction RH. Parmi ces domaines on peut citer :
› La gestion de l’expatriation
En effet, à l’international, les managers se posent toujours la question de quelle politique d’emploi mettre en œuvre pour une plus grande efficacité ? Faut-il recourir à des ressortissants du pays de la maison-mère ? Préfère-t-on intégrer des cadres du pays d’accueil ? Bien entendu, chacune des formules présente des avantages et des inconvénients et l’arbitrage ne peut être fait qu’en fonction des facteurs du contexte spécifique. En outre, le profil du cadre «expatriable» n’est pas aisé à dénicher car l’expatriation à un coût économique pour l’entreprise mais également un coût psychologique pour la personne, et un échec peut avoir des conséquences dramatiques.
› La gestion des carrières
Dans les entreprises qui opèrent à l’International, l’affectation à des postes à l’étranger fait de plus en plus partie de la politique de gestion de la mobilité et des carrières des cadres et hauts potentiels.
Justement, ces hauts potentiels sont préparés et sont testés dans des positions d’envergure internationale avec une confrontation obligée à d’autres modèles de management.
› La gestion des relations sociales
Il faut d’abord souligner que les systèmes des relations sociales sont profondément ancrés dans les institutions et environnement nationaux : politique, judiciaire, éducatif, syndical, etc. La prise en compte de la réalité de ces facteurs est primordiale pour la réussite de la stratégie d’internationalisation des entreprises.
› Le management de la diversité ou des équipes multiculturelles
Le principal objectif poursuivi par les entreprises opérant à l’international est d’accroitre la performance à travers des équipes multiculturelles. Le management de la diversité implique non seulement la gestion des individus mais bien de la diversité sous toutes ses formes.
Les bénéfices de la diversité culturelle sont nombreux: plus grande réceptivité au changement, plus forte ouverture à la prise de risque, innovation, créativité, meilleure satisfaction du client…
Il appartient aux managers de gérer la diversité culturelle en instaurant une équité, en constituant des équipes complémentaires bien intégrées, en valorisant les différences, etc.

Quels sont les avantages et les inconvénients du choix d’un «expatrié» par rapport à un cadre «local» ?
Le choix d’affecter un « expatrié » à un poste à l’international (une filiale) procède d’une réflexion profonde sur ses avantages et ses inconvénients et, en tous les cas, est lié aux spécificités du poste à pourvoir et à sa sensibilité. Mais en général, les avantages de ce choix pour des postes stratégiques peuvent être la compétence technique et managériale, la communication effective avec le siège et surtout, le « contrôle » de la filiale. Les inconvénients sont : le côté élevé des coûts de l’expatriation (le cadre et sa famille), les difficultés d’adaptation à l’environnement et les risques d’échec ainsi que le risque de déplaire au gouvernement du pays d’accueil qui met la pression pour recruter les locaux (contrôle fiscal pointilleux en matière de rémunérations, etc.)
Le choix d’un cadre local présente également des avantages et des inconvénients.
Pour les avantages on peut citer la connaissance de l’environnement socio-économique, politique et juridique local, le faible coût, etc. Les principaux inconvénients sont les difficultés culturelles de recrutement et de formation, la méconnaissance de l’organisation et de la culture de l’entreprise, les difficultés de communication avec le siège et, surtout, la difficulté d’exercer un contrôle effectif sur la filiale (loyauté des cadres locaux, etc.)
Il faut souligner qu’en général le choix d’un « expatrié » est réservé à des postes stratégiques et qui permettent le contrôle de la filiale.
Certaines expériences de travail à l’international dans lesquelles la maison mère affecte la totalité du personnel à la réalisation du chantier, depuis les ingénieurs jusqu’aux ouvriers et manœuvres, (exemple certains chantiers des travaux publics conduits par des pays asiatiques en Afrique) montrent que c’est un choix qui n’est pas efficace et durable.

Le contexte de l’entreprise marocaine justifie-t-il un intérêt pour la GIRH ?
Tout à fait d’actualité. En effet, l’entreprise marocaine s’internationalise et particulièrement certains secteurs tels que les banques, le BTP, etc. Les managers de ces entreprises sont déjà confrontés aux problématiques liées à l’internationalisation de leurs activités. Dans ce contexte, l’entreprise s’interroge sur l’amélioration de sa compétitivité, de sa réactivité et de sa flexibilité dans la poursuite de ses objectifs stratégiques. Par conséquent, mieux connaître la GIRH est essentiel pour comprendre la participation des RH à la performance globale et en faire un levier d’efficacité.

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