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Accueil next Une nouvelle voie pour la formation en entreprise

Un engagement pour une performance durable

Depuis quelques années, la notion de Responsabilité sociale des entreprises (RSE), à travers le monde, connaît un réel engouement de la part des entreprises privées, mais également des organisations publiques…

Un engagement pour  une performance durable
Les enjeux opérationnels de la RSE concernent l’organisation et les pratiques internes de l’entreprise.

Au Maroc, ce concept est devenu un sujet de débat tant dans la sphère économique que celle académique et l’intégration de la RSE dans les organisations interpelle de plus en plus le monde des affaires. Toutefois, d’après une enquête réalisée, en juin 2013, sur le degré d’implication des entreprises dans la RSE dans les pays du Maghreb (Maroc, Tunisie, Algérie), par Sustainable Square Consultancy and Think Tank, cabinet conseil spécialisé dans les pratiques de Responsabilité et soutenabilité des entreprises (RSE), il existe une mauvaise interprétation de cette notion, qui reste perçue comme une pratique qui a pour objectifs la mise en place d’actions de mécénat, de parrainage ou de sponsoring.

Faouzi Diouri, formateur et consultant RSE & communication éthique, nous rappelle ici que la RSE est avant tout un levier de performance pour l’entreprise qui, bien au-delà du mécénat ou de la charité, améliore son efficacité économique, financière et sociale ainsi que sa compétitivité. En intégrant les principes de la RSE dans ses pratiques managériales, l’entreprise se donne ainsi les moyens de préserver la valeur de ses actifs y compris ceux immatériels, de prévenir et de maîtriser ses risques et d’assurer ainsi sa pérennité. Une entreprise socialement responsable s’adapte aussi aux attentes de ses parties prenantes (collaborateurs, clients, fournisseurs, actionnaires, pouvoirs publics, société civile, associations…) en engageant avec eux un dialogue permanent et constructif. D’après cette étude, 85% des organisations marocaines interrogées confirment leur engagement dans le déploiement du concept RSE et dans la mise en place d’activités axées RSE. Ce chiffre démontre que cette pratique est en cours de développement dans les entreprises marocaines. Il ressort, également, de ce rapport qu’en termes de parties prenantes relatives à la RSE, les entreprises au Maroc,  favorisent l’engagement envers les associations caritatives locales ou ONG locales suivi de près par l’engagement envers les employés puis le gouvernement local, et ce dans l’objectif premier de participer au développement durable du pays.

Cependant, l’intégration de la RSE ne doit pas se limiter aux seuls engagements sociétaux, celles-ci doivent «traverser» l’ensemble des métiers et pratiques managériales de l’entreprise, ce qui aura un impact certain sur sa performance et sa rentabilité, mais également sur sa réputation. Avec l’apparition de consommateurs responsables dits «consom’acteurs», le renforcement du cadre législatif et l’importance de la transparence et de la bonne gouvernance, il devient nécessaire de sensibiliser l’ensemble des acteurs économiques aux enjeux de la RSE en les incitant à élargir le périmètre de leur responsabilité aux domaines sociaux et environnementaux. Pour mieux comprendre la RSE, ses principes ainsi que ses enjeux, «Le Matin Emploi» a invité, Faouzi Diouri, pour nous expliquer cette pratique devenue une nécessité pour la «durabilité» de nos organisations.

Faouzi Diouri Formateur et consultant RSE & communication éthique.

Le Matin Emploi : Pourriez-vous revenir sur la notion et les principes de la RSE ?
Faouzi Diouri : Le développement durable transposé au monde de l’entreprise se traduit à travers ses engagements de responsabilité sociale. Même si son rôle n’est pas de sauver la planète, l’entreprise doit se soucier de sa durabilité face à la raréfaction des ressources, aux changements climatiques, à l’évolution de la demande sociale… L’entreprise ne peut pas se contenter d’objectifs strictement économiques. Elle peut contribuer au développement durable en conciliant croissance et efficacité économique, satisfaction des besoins humains et préservation de l’environnement. C’est ce qu’on appelle la Responsabilité sociale de l’entreprise. La RSE est fondée sur des valeurs éthiques de respect vis-à-vis de toutes les parties prenantes de l’activité de l’entreprise (employés, fournisseurs, clients, actionnaires, concurrents…), de la communauté (collectivités locales, associations de consommateurs, ONG…) et de l’environnement. C’est une démarche de progrès qui va être intégrée dans la réflexion stratégique de l’entreprise et qui se décline de manière transversale dans toutes ses fonctions (RH, achat, marketing, logistique…). Objectif : rechercher une performance économique (rentabilité financière, bonne gouvernance, saine concurrence…), sociale (bien-être des salariés, non-discrimination), sociétale (développement des communautés) et environnementale (analyse des impacts, optimisation des consommations de ressources, maîtrise des déchets et des émissions polluantes…).

Quel est donc l’enjeu que représente la démarche RSE pour les organisations tant privées
que publiques ?
En fait, les chefs d’entreprises et autres responsables d’organisations ont plusieurs raisons de mettre en œuvre une démarche RSE. Elle répond à la fois à des enjeux stratégiques et opérationnels. Enjeux stratégiques, parce que la RSE permet de valoriser l’image et de préserver la réputation, de satisfaire et fidéliser la clientèle, de traiter avec des fournisseurs et partenaires de qualité. La RSE facilite également l’accès aux marchés de capitaux et permet d’avoir de bonnes relations avec les autorités et le grand public. Les enjeux opérationnels de la RSE concernent l’organisation et les pratiques internes de l’entreprise. Elle renforce la satisfaction au travail et l’identification des salariés, elle optimise la compétitivité et crée de la valeur, elle est souvent facteur de réduction des coûts grâce aux économies de ressources qu’elle permet de réaliser. La RSE améliore la maîtrise des risques ainsi que les coûts sociaux & environnementaux.

Enfin en matière de recrutement, l’entreprise socialement responsable attire et fidélise plus facilement les talents de haut niveau, car les jeunes sont de plus en plus sensibles aux valeurs du développement durable qui deviennent un critère de choix dans la recherche d’un emploi. À ce propos, n’oublions pas le rôle structurant que peut avoir le monde académique sur la société en favorisant la prise de conscience des jeunes générations aux nouveaux défis de la planète. Sa responsabilité sociale élargit ainsi le champ de sa mission qui consiste à «produire» des gestionnaires nantis, capables de contribuer efficacement au développement durable de notre pays comme le stipule l’article 17 du projet de loi-cadre portant Charte nationale de l’environnement et du développement (voir encadré). Ainsi l’introduction de modules dédiés dans ces cursus et programmes d’enseignement, devrait pouvoir, non seulement sensibiliser les futurs cadres et dirigeants aux principes et valeurs du DD et de la RSE, mais surtout les doter des outils, méthodes et savoir-faire nécessaires au déploiement opérationnel d’une démarche RSE au sein de l’entreprise.

Quels sont les types d’actions que les entreprises devraient entreprendre pour mettre en place la RSE ?
Les entreprises marocaines n’auront pas attendu la mise en œuvre d’une stratégie RSE pour engager des actions en la matière. Les actions de solidarité et de soutien à des associations, la participation à des initiatives locales ou nationales, notamment dans les domaines de la santé, de l’éducation, de l’art, du sport et de l’environnement peuvent être recensées et mises à l’actif des engagements sociétaux. Le nombre d’emplois directs et indirects, le nombre d’heures de formation, le respect de la parité, entre autres, seront rangés parmi les actions sociales. Les efforts accomplis pour minimiser les impacts de l’entreprise et de ses produits sur l’environnement, pour diminuer les consommations d’énergie, pour sensibiliser à la préservation de la nature… représentent l’engagement environnemental. Une fois le bilan des actions RSE réalisé (on peut le faire soi-même si l’on connaît déjà bien la thématique, sinon le confier à un expert), l’entreprise va répertorier toutes les relations qu’elle entretient avec ses parties prenantes internes (collaborateurs, représentants syndicaux, actionnaires) et externes (clients, fournisseurs, associations, régulateur, pouvoirs publics…) en identifiant leurs attentes, les risques et les pressions existants en matière de RSE (lois, normes, ONG, réglementations…). Il conviendra alors de définir les enjeux majeurs (environnementaux, sociaux, sociétaux, de gouvernance) spécifiques au secteur d’activité de l’entreprise sur lesquels elle pourra bâtir sa démarche RSE en tant que levier de performance permettant aux managers d’atteindre rapidement et dans de meilleures conditions leurs objectifs professionnels.

Les grandes lignes d’une stratégie indiquant les pistes à emprunter pour élever son niveau de responsabilité sociale seront alors formalisées et exposées en interne, sachant bien entendu qu’au fil des consultations et des échanges avec les collaborateurs et managers, cette vision sera amenée à évoluer. Ce document stratégique devra être validé puis porté par les structures dirigeantes de l’entreprise. Des correspondants RSE seront désignés au sein de chaque métier/fonction, succursale et filiale et constitueront le comité de pilotage du programme RSE. Objectif : décliner au mieux la stratégie RSE en un plan d’action, en prenant soin d’y intégrer des objectifs de progrès chiffrés sur ses engagements environnementaux, sociaux-sociétaux et bien sûr, économiques.

Enfin, on connaît la formule «Qui ne mesure pas, n’avance pas» ; c’est aussi valable pour la RSE. L’entreprise doit mettre en place un dispositif de Reporting composé d’indicateurs fiables et audités, qui va l’aider à mesurer les avancées et aussi à renseigner son rapport d’activité. Intégrer les critères RSE à sa stratégie de développement, c’est pour l’entreprise une façon de revisiter ses modes de fonctionnement et de décision, quels que soient sa dimension et son secteur d’activité.

Quel rôle joue la communication pour l’entreprise qui souhaite s’engager dans une démarche RSE ? Comment contribue-t-elle à véhiculer une image positive de l’entreprise ?
La communication permet de donner une résonnance à la démarche RSE. Elle met en lumière les bénéfices économiques, sociaux et environnementaux de l’entreprise. Une démarche RSE a besoin pour réussir d’être soutenue par des actions de sensibilisation. Qui dit actions de sensibilisation, dit d’abord actions de communication. En interne, la communication favorise la compréhension des principes et valeurs de la RSE, encourage les bonnes pratiques et les échanges d’expériences, c’est ce qui est à la base d’une culture développement durable. Tous les supports internes existants, qu’ils soient imprimés ou électroniques, doivent établir le lien régulier sur la RSE avec tous les collaborateurs pour les informer régulièrement. La communication peut servir de ressort de l’émulation, en faisant connaître les bonnes pratiques développées par tel ou tel service, dans telle succursale ou filiale. À l’externe, la communication «éthique» va faire connaître les engagements DD et conforter l’image d’entreprise responsable. Elle va surtout permettre de valoriser les actions RSE réalisées et celles qui restent à réaliser. Des informations fiables et pertinentes seront diffusées à destination des parties prenantes, notamment aux actionnaires, aux investisseurs potentiels, et aux agences de notation extrafinancière susceptibles de noter socialement l’entreprise.

Bien entendu, il est essentiel de s’assurer de la véracité des messages qui vont être communiqués. Ils doivent être cohérents et refléter l’image réelle de l’entreprise. C’est la base de la communication responsable. Les médias, quant à eux, peuvent relayer régulièrement les informations transmises par l’entreprise à propos de ses engagements et bonnes pratiques RSE. Lorsqu’elles sont intéressantes et exemplaires, elles servent son image et renforcent son capital réputation. En tant que partie prenante, le journaliste peut exercer une pression et faire évoluer les engagements RSE de l’entreprise en enquêtant sur ses capacités réelles à minimiser les impacts négatifs de son activité sur l’ensemble de la société et sur l’environnement. Le mieux pour l’entreprise est d’entretenir avec les journalistes des rapports de franchise et de montrer qu’elle est bien dans une démarche de progrès même si tout n’est pas encore parfait. Ainsi, les médias pourront jouer un rôle important dans la sensibilisation et la promotion des pratiques RSE au Maroc.

Quel est le rôle du droit en matière de RSE ?
La RSE implique une notion de volonté propre à chaque entreprise, et suivre la loi n’est pas une chose volontaire, mais bien obligatoire. Les définitions de la RSE décrivent ce concept comme l’intégration volontaire des préoccupations sociales et environnementales des entreprises à leurs activités au-delà des obligations juridiques applicables. C’est-à-dire qu’une entreprise qui décide d’engager une démarche RSE se doit d’être exemplaire en matière d’application de la loi.

Par ailleurs, l’ISO 26000 qui est une norme volontaire de recommandations ne définit aucune exigence en termes de niveaux de performance. Elle fournit aux organisations et entreprises, les lignes directrices de la RSE et propose les domaines d’actions pertinents sur lesquels l’entreprise va pouvoir se baser pour fixer ses priorités et mettre en place ses propres actions : gouvernance, droits de l’Homme, relations et conditions de travail, environnement, bonnes pratiques des affaires, questions relatives aux consommateurs, engagement sociétal. D’autres lignes directrices émanant d’instances internationales représentent aussi un cadre de référence d’application volontaire de la RSE tels que : le Pacte mondial des Nations unies, l’Organisation internationale du travail, les principes directeurs de l’OCDE, les principes directeurs des Nations unies aux droits de l’Homme. Enfin, le projet de Loi-cadre portant Charte nationale de l’environnement et du développement durable représente l’une des réformes institutionnelles et législatives les plus importantes pour instaurer le développement durable au Maroc.

Cette loi fixe les objectifs fondamentaux des politiques publiques en matière de protection de l’environnement et du développement durable sur la base des principes, valeurs et recommandations énoncés dans la Charte nationale de l’environnement et du DD.

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