Par Eric Falt est le directeur régional de l’Unesco pour le Maghreb et représentant de l’Unesco auprès de l’Algérie, la Libye, le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie. Il est basé à Rabat.
Le tremblement de terre mesurant 5.2 sur l’échelle de Richter survenu cette semaine dans la province de Ouezzane ravive le souvenir du tragique séisme d'Al Haouz le 8 septembre 2023 et nous rappelle l’importance de maintenir une capacité d’anticipation renforcée face aux aléas sismiques qui affectent le Maroc.
À cette occasion, il est important tout d’abord de saluer les efforts déployés par le gouvernement du Royaume du Maroc et ses institutions, et de louer les initiatives qui ont été prises depuis de nombreuses années dans le domaine de la prévention et la gestion des tremblements de terre. À travers le monde, l’Unesco investit et innove sans cesse, dans le cadre de son mandat scientifique, pour renforcer plus encore les capacités institutionnelles des États-membres de l’Organisation, afin d'être mieux préparés et aptes à répondre de manière plus efficace aux inévitables séismes à venir. Elle joue un rôle de catalyseur dans la promotion de la coopération internationale en matière de gestion des risques naturels.
Au Maroc, dans la droite ligne d’un partenariat commencé en 2021, l'Unesco soutient maintenant activement les autorités marocaines pour renforcer la prévention et la gestion des séismes dans la région d'Al Haouz, grâce à un projet de 9 millions de dirhams financé généreusement par le gouvernement du Japon. Ce projet est réalisé en étroite collaboration avec les institutions marocaines concernées, à commencer par l'Institut national de géophysique (ING).
L’Unesco et l’ING entament en ce moment même les dernières étapes de l’acquisition et l’installation d’appareils très spécialisés dans la région d’Al Haouz pour capter précisément les mouvements du sol et leurs accélérations, appelés sismomètres et accélérographes. Cela permettra la finalisation de la construction et la rénovation de 18 stations-abris contenant ce matériel, qui seront opérationnelles à Al Haouz dans les semaines à venir, et complèteront le réseau mis en place à travers le pays par l’ING.
En partenariat avec le ministère de l’Aménagement du territoire national, de l’urbanisme, de l'habitat et de la politique de la ville, l’Unesco met également l’accent sur la valorisation des techniques ancestrales de construction parasismique, tout en diffusant des capsules vidéo destinées à sensibiliser les spécialistes, mais aussi les artisans bâtisseurs, aux bienfaits de méthodes telles que le pisé et d'autres techniques traditionnelles. Dès avril 2024, nous avons lancé une série de formations et de sensibilisations en sismologie, génie sismique et géophysique, destinées aux ingénieurs, architectes ainsi qu’à la société civile marocaine.
Les citoyens marocains auront par ailleurs l'opportunité, très prochainement, d'accéder aux informations sur les activités sismiques grâce à une plateforme nationale d'information en ligne, qui sera opérationnelle grâce là encore à une collaboration entre l’Unesco et l'ING. Cette plateforme a pour objectif de fournir des informations précises et indépendantes d’autres organismes internationaux.
Dans le domaine de l’éducation, nous opérons des formations visant à favoriser l’amélioration des compétences des responsables et des acteurs éducatifs marocains dans la sensibilisation et la prévention des risques naturels auprès des jeunes. Le projet «Renforcer la résilience du Maroc face aux séismes» contribue également au renforcement de la coopération scientifique entre le Maroc, le Japon et d’autres pays de la région. C’est justement le rôle de l’Unesco, à travers ses plateformes et réseaux de collaboration, de faciliter les échanges d’expériences, de bonnes pratiques et de leçons apprises entre les États membres, favorisant ainsi une approche globale et coordonnée face aux défis communs.
La Plateforme internationale pour la réduction des désastres sismiques (IPRED) promeut ainsi la coopération mondiale en sismologie afin de renforcer les codes de construction et réduire les risques sismiques. Cette plateforme scientifique intergouvernementale reconnaît l'importance d'améliorer la sécurité des bâtiments et des habitations comme une priorité fondamentale et vitale pour réduire les risques à l'échelle mondiale. Dans cette même veine, l’Unesco soutient actuellement les pays du Maghreb dans la révision et le développement de leur code de construction parasismique et de gestion des risques naturels, ce qui sera notamment débattu lors d'une réunion régionale qui se tiendra à Rabat à la fin de ce mois de février.
En conclusion, le séisme mineur de cette semaine doit nous servir de piqûre de rappel qu’il ne faut pas baisser la garde et qu’il est crucial de continuer à intensifier partout dans le monde, et bien sûr au Maroc, les efforts en matière d’anticipation des séismes. Au-delà de la région d’Al Haouz, qui sera maintenant mieux couverte, Il nous interpelle aussi sur la nécessité de porter une attention renouvelée à d'autres régions du Maroc, notamment le nord du pays, afin de mieux anticiper encore et de prévenir les risques sismiques dans ces zones. L’ING et les autres acteurs nationaux y travaillent ardemment et l’Unesco saura être à leurs côtés.
Pour relever ces défis, il est crucial d'adopter une approche collaborative, d'échanger les bonnes pratiques et de développer les compétences locales. Cela permettra de mieux anticiper les catastrophes et de réagir de manière plus efficace, garantissant ainsi la protection des populations et la sécurité nationale face aux aléas naturels.