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«14.4» : Journal d’un clandestin

Dans «14.4», Ahmed Younoussi raconte sa traversée vers l’Espagne à un âge trop précoce pour en saisir le danger. Dans un seul-en-scène, joué le 28 juillet à Madrid, le comédien maroco-espagnol revient sur son arrivée clandestine en Espagne.

Dans un seul-en-scène, joué le 28 juillet à Madrid, le comédien maroco-espagnol Ahmed Younoussi revient sur son arrivée clandestine en Espagne. Grâce à la dramaturgie de Juan Diego Botto et Sergio Peris-Mencheta, mise en scène de ce dernier, le comédien campe son propre rôle dans une pièce qui fera date. Les critiques espagnoles ne tarissent pas d’éloges sur la première représentation qui dévoile la tragédie des migrants.

Sur une scène à l’éclairage tamisé, un jeune homme debout sur une planche bordée de vagues parle de son périple. Mais pas d’une excursion de loisir, à la découverte de places et de plaisirs nouveaux, car c’est au péril de sa vie, qu’il embarque vers un destin inconnu.

Dans «14.4», Ahmed Younoussi raconte sa traversée vers l’Espagne à un âge trop précoce pour en saisir le danger. Il raconte la violence familiale, la fuite et la vie dans les rues de Tanger, les rêves fantasmés d’un monde meilleur et l’amerrissage dans des centres de détention. Puis la vie d’après qui, malgré ses bénédictions, ne peut que décevoir.

Partir de soi

Ahmed avait neuf ans lorsqu’il s’est caché sous un camion quittant le Maroc pour l’Espagne. Arrivé dans la péninsule ibérique, il a été placé dans un centre pour mineurs et sa vie a pris un tournant majeur. Admis à l’école, ses bonnes notes l’ont mis sur une voie nouvelle et un destin plus heureux. Pourtant, la réussite qu’il savoure aujourd’hui, en tant qu’acteur et père de famille, a un arrière-goût amer. C’est que s’arracher à sa famille pour tenter la traversée, au péril de sa vie, ouvre une plaie béante, ignorée par des gens et des institutions qui préfèrent renfermer sous l’acronyme MENAS (Mineurs étrangers non accompagnés) tout un monde d’espoirs réprimés et de meurtrissures inavouées.

C’est en racontant son histoire au metteur en scène qu’est né le projet de ce monologue dans lequel Ahmed Younoussi explique, à travers son propre parcours, les motivations et le vécu de milliers de mineurs accablés par la vie et par les préjugés à leur arriver à l’Eldorado. Pour le comédien, juger le comportement parfois reprochable des jeunes, sans en comprendre l’origine, reviendrait à perpétuer les schémas établis et à reproduire de la violence.

Des visages sur des chiffres

Les médias espagnols sont unanimes : On ne s’en sort pas indemne de cette pièce, car ce n’est pas la même chose de parler de données statistiques que de personnes, avec des prénoms, un regard, une voix et des rêves. Lorsqu’en plus, le comédien raconte sa propre vie, le public ne peut rester à l’abri d’un pincement au cœur ou d’un accès d’empathie.

Ce qu’il faut savoir, c’est que les enfants étrangers en situation de vulnérabilité en Espagne se comptent en milliers. Rien que les quatre premiers mois de 2024, plus de 1.500 mineurs non accompagnés sont entrés aux centres dédiés. Face à ce fléau, les capacités de l’Assistance sociale se trouvent dépassées et très souvent impuissantes à prodiguer l’écoute et l’accompagnement nécessaire. Pour Ahmed Younoussi, qui est passé par là, la pièce «14.4» peut également servir au personnel de ces centres dédiés aux MENAS, pour comprendre et appréhender toute hostilité chez de jeunes personnes qui viennent d’à côté et, pourtant, de loin.
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