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Biennale des arts islamiques : Conversation avec Amin Jaffer, directeur artistique

Dr Amin Jaffer, directeur artistique de la Biennale des arts islamiques de Djeddah 2025 et directeur de la collection Al Thani à Paris, nous livre sa vision de cet événement unique. Sous le thème «Et tout ce qui se trouve entre les deux» (Wama Bainahuma), la Biennale explore la diversité et l’universalité de l’art islamique à travers un dialogue entre tradition et innovation. Le Dr Jaffer aborde la manière dont cette manifestation met en valeur l'art islamique contemporain tout en honorant ses racines historiques. Organisée par la Fondation de la Biennale de Diriyah et le ministère de la Culture d'Arabie saoudite, cette biennale constitue une plateforme essentielle pour favoriser l’échange interculturel à l’échelle mondiale.

Le Matin : Quelle est, selon vous, l'importance d'une Biennale des arts islamiques dans le contexte mondial actuel ?

Amin Jaffer : Je crois que la Biennale des arts islamiques a une importance profonde dans le contexte mondial actuel. À travers toutes ses sections, elle démontre comment la culture traverse les frontières géographiques et métaphysiques, en reliant des lieux, des époques et des langues. Grâce à ses partenariats institutionnels diversifiés et à ses voix artistiques, elle met en lumière l'influence de la culture islamique au-delà du monde arabe, prouvant ainsi le pouvoir de l'art pour unir au-delà des différences. La Biennale présente un islam diversifié et pluraliste, dont la culture a échangé librement avec l'Est et l'Ouest.



En quoi la Biennale contribue-t-elle à la reconnaissance de l'art islamique contemporain tout en préservant et valorisant son héritage historique et culturel ?

Les artistes contemporains représentés à la Biennale viennent du monde entier, mais étant donné sa situation géographique, il y a effectivement une concentration d'œuvres d'artistes du monde islamique. Présentées aux côtés des œuvres d'art historiques, les commandes contemporaines de la Biennale sont représentées dans un contexte de civilisation musulmane, qu'elles soient sacrées ou séculaires. En tant que premier événement de ce type, la Biennale offre une plateforme inégalée pour la reconnaissance des artistes contemporains dont le travail reflète des thèmes présents dans la culture islamique.

La Biennale dissipe l'idée que l'expression artistique contemporaine serait quelque chose de nouveau pour les cultures islamiques. Ce qui est nouveau, c'est la prolifération de plateformes et d'institutions consacrées à la mise en valeur de ces œuvres. L'Arabie saoudite est devenue un centre vital pour cette renaissance culturelle, avec la Biennale servant de plateforme essentielle pour ces conversations.

Comment la Biennale parvient-elle à équilibrer les œuvres traditionnelles et contemporaines, en respectant les divers courants de l'art islamique ?

L'équilibre entre les œuvres traditionnelles et contemporaines est atteint par une juxtaposition réfléchie de l'art contemporain avec des objets historiques sacrés et séculiers. La Biennale présente plus de 500 œuvres d'art historiques provenant d'institutions du monde entier, aux côtés de créations contemporaines qui ont été commandées par la Fondation de la Biennale de Diriyah et produites à travers un processus créatif impliquant des discussions entre les commissaires, les artistes participants et les institutions prêteuses. Sous les magnifiques et vastes auvents du Terminal du Hajj, les visiteurs pourront voir comment les artistes, artisans, penseurs et créateurs issus des cultures islamiques ont abordé des thèmes pertinents pour toute l'humanité : le sacré, l'intellectuel et le matériel. Ce dialogue entre passé et présent éclaire la conversation continue entre foi, créativité et recherche de sens profond.

Quel rôle les biennales jouent-elles dans la promotion du dialogue interculturel à travers l'art ?

À mon avis, les biennales jouent un rôle crucial dans la promotion du dialogue interculturel contemporain. La culture a le pouvoir de combler de nombreuses différences, en traversant les frontières géographiques et métaphysiques. La Biennale des arts islamiques sert de plateforme où ces récits artistiques montrent leur interconnexion à travers le monde islamique, ainsi qu'à travers les civilisations, une réalité désormais amplifiée par l'échange rapide d'idées au niveau mondial. La collaboration avec des institutions du monde entier, y compris la Bibliothèque du Vatican, reflète ce dialogue continu entre différentes traditions.

Dans ce contexte, quel rôle peuvent jouer les jeunes artistes dans la Biennale et comment l'événement peut-il encourager l'innovation tout en respectant les traditions artistiques islamiques ?

Les jeunes artistes représentent la vitalité continue des traditions artistiques islamiques. Ils apportent de nouvelles perspectives sur des thèmes intemporels liés à la vie spirituelle et séculière. Alors que de nombreuses sociétés occidentales ont connu une profonde sécularisation, dans la Biennale des arts islamiques, la foi offre un cadre nuancé et dynamique à travers lequel les artistes interprètent et s'engagent avec les enjeux contemporains. Ce n'est pas un paradoxe, mais plutôt un témoignage d'un engagement sophistiqué envers la spiritualité qui résonne profondément avec notre époque actuelle. La Biennale offre à ces voix émergentes une plateforme pour démontrer comment l'expression artistique peut à la fois honorer la tradition et parler des expériences contemporaines.

Biographie de Amin Jaffer

Le Dr Amin Jaffer est directeur de la Collection Al Thani, une collection encyclopédique de plus de 5.000 œuvres d'art couvrant des millénaires, représentant la vision de Son Altesse Cheikh Hamad bin Abdullah Al Thani. Ancien conservateur principal au Victoria and Albert Museum (V&A) de Londres et directeur international de l'Art asiatique chez Christie's, Jaffer a écrit et édité plusieurs ouvrages. Il a été commissaire et co-commissaire de grands expositions et événements dans le monde de l’art.

Jaffer a supervisé la création des espaces muséaux de la Collection Al Thani à l'Hôtel de la Marine, à Paris, qui ont ouvert leurs portes en novembre 2021 et ont été salués par la critique. Depuis sa création, l'espace a présenté des expositions en partenariat avec des institutions prestigieuses telles que le Musée Calouste Gulbenkian à Lisbonne, la Galleria Giorgio Franchetti alla Ca D'Oro à Venise et le V&A, à Londres.
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