«De choses et d’autres» avec Rebel Spirit

Rebel Spirit n’aime pas le qualificatif «weld cha3b» (fille/fils du peuple) : cela a le mérite d’être clair ! Dans l’émission «De choses et d’autres», l’artiste explique que cette appellation, censée désigner des gens issus de la classe populaire ou moyenne, par opposition à une classe supérieure, est devenue «une arme à double tranchant, toujours utilisée pour exclure l’autre.

Les gens aisés utilisent le terme «weld cha3b» avec mépris et ceux des classes populaires s’en servent pour mépriser ceux qui n’en sont pas issus ! Pourtant, si l’on se tient au sens littéral, est “weld cha3b” tout individu détenteur de la nationalité marocaine». L’artiste soulève, par là même, une confusion entre l’appartenance à la classe sociale et à la patrie, qui expliquerait l’usage populiste de ce terme, dans la société marocaine.

Le transfuge de classe

Par ailleurs, «le qualificatif est souvent utilisé pour nourrir le storytelling contemporain», nous dit Rebel Spirit. En effet, selon que l’on raconte une success-story ou un échec, se définir comme «weld cha3b» devient un motif de fierté ou un billet d’excuse. Si dans le dernier cas, la formule est censée émouvoir et apitoyer, dans le cas du succès, elle a pour but d’inspirer et de susciter l’admiration. Mais pour Rebel Spirit, le transfuge de classe, qui s’émancipe de son environnement, reste piégé dans une condition délicate où l’on attend de lui de ne pas oublier ses origines. «On a beaucoup de proverbes dans la culture populaire désignant celui qui change de vie et qui oublie son passé... Mais le fait est que son environnement initial développe des attentes qui deviennent pesantes avec le temps», s’explique l’artiste qui dénonce cette culpabilisation de ceux qui réussissent à s’épanouir.

Populisme à souhait

Argument vainqueur à tout va, la carte «weld cha3b» est sortie dans tous les domaines qui requièrent l’engagement de la communauté. Pour commencer, Rebel Spirit nous rappelle que dans les comédies, au cinéma comme à la télévision, le profil de «weld cha3b» a été exploité à souhait. L’on s’amuse à raconter de façon caricaturale le choc des cultures et la figure héroïque du jeune homme pauvre, mais pétri de valeurs, surgit toujours pour séduire le plus large public.

En matière de séduction, les politiques ne sont pas en reste. «On entend toujours parler des politiques qui, le temps d’une campagne, surjouent la carte de “weld cha3b”, avant de disparaître une fois l’élection remportée», s’amuse Rebel. Mais le lieu où l’on use et abuse de la formule, c’est bien les réseaux sociaux. Pour l’artiste, le populisme atteint son paroxysme sur TikTok et Instagram, laissant le champ libre à l’imposture et la fourberie. Se proclament «weld ou bent cha3b», tout un tas d’énergumènes ont pour unique objectif de susciter l’émotion pour gagner des followers ou directement de l’argent. À ce propos, Rebel estime qu’il faut «cesser de céder à l’émotivité et à faire preuve de raison, pour éviter la manipulation de masse et l’usage intempestif et fallacieux du qualificatif “weld cha3b”».