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«Skat Haraka» : la vie après l’incarcération

Lundi 11 décembre, l'American Art Center a accueilli l’avant-première du le film «Skat Haraka», produit par 2M et Ali n' Productions. Réalisé par Rita El Quessar, le documentaire suit des parcours de vies brisées qui tentent de se reconstituer à travers l’art et la culture.

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Peut-on réellement sortir indemne de prison ? Très difficilement, nous dira l’expérience, même lorsqu’on a échappé à la violence et à la dépression. Car «la stigmatisation qui pèse sur le dos des anciens prisonniers les empêche d’avancer et de se réintégrer dans la société. Si perdre la liberté est chose ardue, la retrouver est encore plus dure», expliquera la militante Fatna El Bouih, présidente de l’Association Relais Prison.



Et c’est exactement l’objet du film documentaire «Skat Haraka» qui a porté un regard intimiste sur la vie après la prison. En suivant le parcours d'un groupe de jeunes qui tournent un documentaire au sein de ladite Association, la réalisatrice et scénariste Rita El Quessar a laissé opérer la magie de la caméra pour éclairer des pans de vies couvertes de stigmates et réhumaniser des personnes rejetées par la société.

«Skat Haraka» : Du talent derrière les barreaux

L’avant-première de «Skat Haraka» s’est faite en grandes pompes à l’American Art Center. L’échange qui a précédé la projection a été particulièrement pertinent, donnant la parole à Fatna El Bouih qui a partagé les défis auxquels l'Association Relais Prison a été confrontée pour impliquer les détenus dans le processus créatif. La militante a souligné le talent brut des participants aux ateliers cinéma, mentionnant des exemples poignants, comme un prisonnier qui a filmé le mur de sa cellule, transformant ainsi sa relation avec cet objet en un puissant symbole de transformation. D'autres ont choisi des métaphores, telles que l'horloge ou le téléphone, pour exprimer leur complexe rapport au temps et à la liberté.

Fatna El Bouih a également évoqué le lien brisé entre les prisonniers et la société, soulignant comment les ateliers cinéma ont permis de renouer ce lien. Une mère, émue aux larmes après avoir visionné le film de son fils, témoigne de la transformation profonde de ce dernier. Fatna El Bouih conclut : «C'est ce lien rompu que l'on essaie de recoudre en œuvrant à les réintégrer dans la société à travers l'art». Et d’ajouter : «Notre prochain défi est de parcourir les festivals internationaux pour montrer ces pépites de films, car ils méritent vraiment d’être vus».

Le critique Hammadi Guerroum, fervent défenseur du travail de Fatna El Bouih, a rappelé les préjugés entourant la collaboration avec des détenus par le passé, soulignant l'évolution positive et la nécessité de soutenir de telles initiatives.

«Skat Haraka» : Une mélancolie cinématographique

Côté cinéma, Rita El Quessar a fait preuve de retenue, refusant de forcer les émotions ou d'enjoliver la réalité. Elle a préféré suivre les personnages avec une caméra attentive, capturant les moments de rire partagés, les confidences douloureuses, et les rares moments de tendresse, tous empreints d'une pudeur et d'une dignité remarquables. Les choix de réalisation de Rita El Quessar ont donné naissance à un film sincère, où la beauté émane naturellement, débordant sur les cicatrices du passé, aussi bien physiques que psychologiques.

Sans aller jusqu’aux situations explicites ou aux complaintes victimaires, la réalisatrice a pu relater la difficulté de la réintégration après la prison, offrant au public une expérience cinématographique émotionnelle et réfléchie. En traquant la beauté et la poésie, elle a su montrer le pouvoir du cinéma à susciter la compréhension et l'empathie, tout en célébrant la résilience humaine.

La narration subtile de «Skat Haraka» a été récompensée au Silicon Valley International Film Festival 2023, remportant le Prix Spécial du jury, ainsi qu'au Festival international du Cap-Vert, où il a reçu une Mention spéciale du jury.

Présent lors de l’événement, Reda Benjelloun, directeur des magazines d'information et du documentaire, a souligné l'importance de façonner la vision du Maroc de demain en investissant dans les potentialités créatives des jeunes, même en l'absence d'une formation académique formelle, mais avec une créativité certaine. Cet engagement social renforce le rôle essentiel des médias dans la promotion d'une société plus inclusive et empathique.

En outre, Reda Benjelloun a expliqué l’engagement de la chaîne 2M dans la mise en lumière des problématiques sociales et humaines cruciales, dans le but d’éclairer et d’éduquer l'opinion publique. En fournissant une plateforme pour des films tels que «Skat Haraka», 2M contribue à sensibiliser le public aux questions souvent négligées et à encourager une compréhension plus profonde des réalités auxquelles font face les individus en phase de réintégration après la prison.

Si vous avez raté l’avant-première du film «Skat Haraka», vous aurez l’occasion de le découvrir sur le petit écran dès le début de 2024. Pour rappel, le programme «Des histoires et des hommes», diffusé mensuellement en prime-time sur la chaîne 2M, compte déjà des dizaines de documentaires à la fibre sociale prononcée. Cet engagement social renforce le rôle essentiel des médias dans la promotion d'une société plus inclusive et empathique.
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