Le rapport réalisé conjointement par Bank Al-Maghrib (BAM) et la Banque mondiale, est le premier du genre qui traite des risques climatiques dans le secteur bancaire marocain dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA). Cette étude porte sur les risques climatiques de nature physique et sur ceux issus de la transition vers une économie bas carbone. Elle mesure notamment le niveau d’exposition des portefeuilles des banques aux risques de sécheresse, d’inondation et de mise en place d’une taxation carbone. L’étude, menée avec le soutien de l’Agence française de développement (AFD) et le Global Risk Financing Facility (mécanisme mondial de financement des risques), comprend également une analyse de la vulnérabilité des acteurs bancaires face à des chocs climatiques hypothétiques.
Il en ressort que le secteur bancaire marocain est sérieusement exposé aux risques physiques liés au climat, en particulier aux inondations et aux sécheresses. Ces catastrophes naturelles pourraient affecter l’agriculture et les industries et leur écosystème, ainsi que les biens immobiliers, les actifs des entreprises et la richesse des ménages, ce qui pourrait à son tour réduire la capacité des emprunteurs à rembourser leur dette. En tenant compte à la fois du risque de sécheresse et du risque d’inondation, environ un tiers des prêts bancaires sont destinés à des secteurs présentant un risque climatique physique particulièrement élevé (bien que d’autres secteurs soient également susceptibles d’être directement ou indirectement impactés par les risques climatiques). Ceci s’explique notamment une concentration sectorielle et géographique élevée pour les portefeuilles de crédit des banques marocaines. Par exemple, Casablanca, Rabat et Marrakech représentent ensemble 77% de l’exposition totale au crédit. En outre, une part importante des prêts bancaires concerne des zones sujettes aux sécheresses, notamment les régions de Marrakech-Safi et de Souss-Massa. Et une grande partie des prêts bancaires concerne des provinces vulnérables aux inondations pluviales ou fluviales, notamment Rabat, Salé et Marrakech.
Concernant l’impact des risques de transition climatique sur le secteur bancaire, il est estimé comme étant substantiel, mais potentiellement gérable. Cet impact pourrait être gérable, car le Maroc est un faible émetteur de gaz à effet de serre, ne représentant que 0,16% des émissions mondiales de CO2. Néanmoins, les émissions nationales de gaz à effet de serre sont en augmentation (en particulier dans le secteur de l’énergie), ce qui pourrait accroître l’exposition aux risques de transition climatique à l’avenir. En se basant sur les émissions de gaz à effet de serre des industries et leur intensité d’émission, les industries potentiellement sensibles aux risques de transition au Maroc pourraient inclure la production d’électricité, le transport, l’exploitation minière, l’agriculture, le secteur manufacturier et les services publics. Étant donné que l’Union européenne (UE) est le plus grand partenaire commercial du Maroc, les industries «sensibles à la transition» pourraient également inclure celles affectées par le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE (CBAM), telles que les industries associées à la production de ciment, d’électricité et d’aluminium.
Le rapport a révélé qu’au total, l’exposition au crédit aux industries définies comme étant hautement ou modérément sensibles à la transition représente 24,3% des prêts totaux et 43,6% des prêts aux sociétés non financières (SNF). Les expositions sont les plus élevées dans le secteur manufacturier (9% des prêts totaux), de l’électricité (5% des prêts totaux) et de l’agriculture (4% des prêts totaux). Bien que la plupart des banques aient une exposition de moins de 25% aux industries sensibles à la transition, quatre banques ont une exposition dépassant 50%. L’analyse suggère que l’exposition aux risques de transition est concentrée dans les petites et moyennes banques qui ont des portefeuilles de crédit spécialisés.
Pour estimer les impacts futurs des risques de transition, une évaluation de la vulnérabilité a été réalisée en se basant sur deux scénarios de prix du carbone. Le modèle a révélé que, à l’échelle du système, environ 1,9% des prêts aux entreprises et 0,7% des actifs du secteur bancaire pourraient présenter un risque de crédit accru suite à la mise en place d’une taxe carbone de 25 dollars/tCO2. Avec une taxe carbone de 75 dollars/tCO2, ces chiffres pourraient atteindre respectivement 8,4 et 3,1%. Cependant, précise le rapport, il est important d’interpréter avec prudence ces résultats quantitatifs, en raison des incertitudes et des complexités liées à l’estimation des risques financiers liés au climat.
En guise de conclusion, le rapport estime que le secteur bancaire au Maroc pourrait devenir de plus en plus vulnérable aux risques climatiques de transition et physiques. Bien que l’impact du changement climatique puisse ne pas être systémique dans l’ensemble du système financier, les impacts climatiques pourraient varier considérablement d’une banque à l’autre, plusieurs banques étant susceptibles d’être très vulnérables aux effets de ces risques. De plus, l’impact des risques climatiques sur le secteur bancaire pourrait être largement sous-estimé en raison du besoin de données et de l’incapacité à tenir compte des interconnexions complexes entre le climat, les impacts financiers, sociaux et macroéconomiques. «Les conclusions du rapport doivent donc être interprétées avec prudence, compte tenu de la complexité de l’estimation des impacts climatiques futurs et de l’évolution des approches d’évaluation», est-il précisé.
D’ailleurs, le développement de directives supplémentaires de supervision sur les risques climatiques et environnementaux peut contribuer à renforcer la réponse du secteur bancaire à la gestion de ces risques. À mesure que l’approche de supervision se développe, BAM pourrait envisager des examens thématiques ou une supervision sur site pour les entités très exposées. Par ailleurs, la Banque centrale pourrait participer au dialogue politique sur la manière de stimuler le développement des marchés de l’assurance privée et/ou des régimes publics de transfert des risques climatiques et des catastrophes.
En outre, les décideurs politiques et BAM devraient chercher à combler les lacunes critiques en matière de données qui limitent la capacité des autorités et des institutions financières à mesurer les expositions aux risques climatiques et à effectuer des tests de stress financiers liés au climat. Des orientations prospectives sur les politiques climatiques et environnementales peuvent soutenir les pratiques de prise de décision et de gestion des risques à plus long terme. Des politiques et des actions peuvent également être entreprises pour stimuler la finance verte et renforcer la protection financière contre les risques climatiques.
Concernant le secteur bancaire, les banques marocaines devraient continuer à renforcer leurs capacités pour évaluer et gérer les risques financiers liés au climat. D’abord, pour garantir leur conformité à la directive de BAM sur la gestion des risques climatiques et environnementaux. Ensuite, pour œuvrer à aligner leurs cadres de gestion des risques climatiques sur les orientations mondiales et les bonnes pratiques internationales.
Les domaines clés sur lesquels les banques doivent se concentrer incluent le développement de structures de gouvernance claires, l’intégration des risques climatiques dans leurs cadres de gestion des risques, et l’amélioration de la divulgation des risques climatiques. De plus, elles doivent améliorer leur capacité à collecter et utiliser des données internes pour évaluer les risques climatiques, notamment en travaillant en collaboration avec leurs partenaires.
Ces recommandations visent à améliorer la gestion des risques liés au climat dans le secteur bancaire et à promouvoir la durabilité environnementale et la résilience financière.
Il en ressort que le secteur bancaire marocain est sérieusement exposé aux risques physiques liés au climat, en particulier aux inondations et aux sécheresses. Ces catastrophes naturelles pourraient affecter l’agriculture et les industries et leur écosystème, ainsi que les biens immobiliers, les actifs des entreprises et la richesse des ménages, ce qui pourrait à son tour réduire la capacité des emprunteurs à rembourser leur dette. En tenant compte à la fois du risque de sécheresse et du risque d’inondation, environ un tiers des prêts bancaires sont destinés à des secteurs présentant un risque climatique physique particulièrement élevé (bien que d’autres secteurs soient également susceptibles d’être directement ou indirectement impactés par les risques climatiques). Ceci s’explique notamment une concentration sectorielle et géographique élevée pour les portefeuilles de crédit des banques marocaines. Par exemple, Casablanca, Rabat et Marrakech représentent ensemble 77% de l’exposition totale au crédit. En outre, une part importante des prêts bancaires concerne des zones sujettes aux sécheresses, notamment les régions de Marrakech-Safi et de Souss-Massa. Et une grande partie des prêts bancaires concerne des provinces vulnérables aux inondations pluviales ou fluviales, notamment Rabat, Salé et Marrakech.
Dommages économiques amplifiés par le changement climatique
Le rapport souligne, sur la base des modèles d’analyse prédictive, que le changement climatique amplifierait à l’avenir les dommages économiques causés par les inondations et les sécheresses. Dans un scénario extrême de changement climatique (RCP 8.5), les dommages estimés pourraient atteindre 69,5 milliards de dirhams pour les sécheresses et 104,8 milliards de dirhams pour les inondations, avec des effets majeurs sur l’économie et le secteur financier. En effet, ils pourraient entraîner des pertes de production et de PIB, augmenter les créances douteuses dans les secteurs de l’agriculture, de l’industrie et des services, et réduire le ratio de suffisance en capital des institutions financières.Concernant l’impact des risques de transition climatique sur le secteur bancaire, il est estimé comme étant substantiel, mais potentiellement gérable. Cet impact pourrait être gérable, car le Maroc est un faible émetteur de gaz à effet de serre, ne représentant que 0,16% des émissions mondiales de CO2. Néanmoins, les émissions nationales de gaz à effet de serre sont en augmentation (en particulier dans le secteur de l’énergie), ce qui pourrait accroître l’exposition aux risques de transition climatique à l’avenir. En se basant sur les émissions de gaz à effet de serre des industries et leur intensité d’émission, les industries potentiellement sensibles aux risques de transition au Maroc pourraient inclure la production d’électricité, le transport, l’exploitation minière, l’agriculture, le secteur manufacturier et les services publics. Étant donné que l’Union européenne (UE) est le plus grand partenaire commercial du Maroc, les industries «sensibles à la transition» pourraient également inclure celles affectées par le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE (CBAM), telles que les industries associées à la production de ciment, d’électricité et d’aluminium.
Le rapport a révélé qu’au total, l’exposition au crédit aux industries définies comme étant hautement ou modérément sensibles à la transition représente 24,3% des prêts totaux et 43,6% des prêts aux sociétés non financières (SNF). Les expositions sont les plus élevées dans le secteur manufacturier (9% des prêts totaux), de l’électricité (5% des prêts totaux) et de l’agriculture (4% des prêts totaux). Bien que la plupart des banques aient une exposition de moins de 25% aux industries sensibles à la transition, quatre banques ont une exposition dépassant 50%. L’analyse suggère que l’exposition aux risques de transition est concentrée dans les petites et moyennes banques qui ont des portefeuilles de crédit spécialisés.
Pour estimer les impacts futurs des risques de transition, une évaluation de la vulnérabilité a été réalisée en se basant sur deux scénarios de prix du carbone. Le modèle a révélé que, à l’échelle du système, environ 1,9% des prêts aux entreprises et 0,7% des actifs du secteur bancaire pourraient présenter un risque de crédit accru suite à la mise en place d’une taxe carbone de 25 dollars/tCO2. Avec une taxe carbone de 75 dollars/tCO2, ces chiffres pourraient atteindre respectivement 8,4 et 3,1%. Cependant, précise le rapport, il est important d’interpréter avec prudence ces résultats quantitatifs, en raison des incertitudes et des complexités liées à l’estimation des risques financiers liés au climat.
Intégration des risques climatiques dans le secteur bancaire
Par ailleurs, le rapport indique que le secteur bancaire marocain progresse dans l’intégration des risques climatiques dans ses cadres de gestion des risques, mais davantage de travail sera nécessaire pour les incorporer correctement dans leurs activités. Une enquête menée auprès du secteur bancaire a révélé que la sensibilisation aux risques climatiques était élevée, mais que la plupart des banques en sont encore aux premières étapes de leur intégration dans leurs cadres de gestion des risques et n’ont pas encore réalisé d’évaluations de la vulnérabilité aux risques climatiques. Certaines banques, en particulier les multinationales, ont pris des mesures pour intégrer le climat dans leur cadre de gouvernance, notamment en assurant la participation du conseil d’administration aux questions climatiques. De son côté, BAM a identifié la gestion des risques climatiques comme une priorité clé et prévoit de développer des directives de supervision plus détaillées en réponse à ces risques climatiques.En guise de conclusion, le rapport estime que le secteur bancaire au Maroc pourrait devenir de plus en plus vulnérable aux risques climatiques de transition et physiques. Bien que l’impact du changement climatique puisse ne pas être systémique dans l’ensemble du système financier, les impacts climatiques pourraient varier considérablement d’une banque à l’autre, plusieurs banques étant susceptibles d’être très vulnérables aux effets de ces risques. De plus, l’impact des risques climatiques sur le secteur bancaire pourrait être largement sous-estimé en raison du besoin de données et de l’incapacité à tenir compte des interconnexions complexes entre le climat, les impacts financiers, sociaux et macroéconomiques. «Les conclusions du rapport doivent donc être interprétées avec prudence, compte tenu de la complexité de l’estimation des impacts climatiques futurs et de l’évolution des approches d’évaluation», est-il précisé.
Une série de recommandations politiques
Sur la base des conclusions du rapport, toute une série de recommandations politiques a été identifiée pour soutenir davantage l’évaluation et la gestion des risques financiers liés au climat pour le secteur bancaire. Le rapport recommande que BAM continue à améliorer sa compréhension et sa gestion des risques financiers liés au climat en mettant à jour l’analyse des risques au besoin et en menant une étude plus approfondie avec le secteur bancaire. À ce sujet, les futurs travaux d’analyse des risques pourraient envisager d’améliorer les scénarios et la modélisation, par exemple, en explorant des canaux de transmission supplémentaires vers l’économie et le secteur bancaire. En s’appuyant sur cette analyse initiale des risques climatiques, BAM pourrait évaluer si le cadre de surveillance macro-prudentielle et micro-prudentielle de la Banque centrale doit être mis à jour pour intégrer structurellement la prise en compte des risques liés au climat et à l’environnement.D’ailleurs, le développement de directives supplémentaires de supervision sur les risques climatiques et environnementaux peut contribuer à renforcer la réponse du secteur bancaire à la gestion de ces risques. À mesure que l’approche de supervision se développe, BAM pourrait envisager des examens thématiques ou une supervision sur site pour les entités très exposées. Par ailleurs, la Banque centrale pourrait participer au dialogue politique sur la manière de stimuler le développement des marchés de l’assurance privée et/ou des régimes publics de transfert des risques climatiques et des catastrophes.
En outre, les décideurs politiques et BAM devraient chercher à combler les lacunes critiques en matière de données qui limitent la capacité des autorités et des institutions financières à mesurer les expositions aux risques climatiques et à effectuer des tests de stress financiers liés au climat. Des orientations prospectives sur les politiques climatiques et environnementales peuvent soutenir les pratiques de prise de décision et de gestion des risques à plus long terme. Des politiques et des actions peuvent également être entreprises pour stimuler la finance verte et renforcer la protection financière contre les risques climatiques.
Concernant le secteur bancaire, les banques marocaines devraient continuer à renforcer leurs capacités pour évaluer et gérer les risques financiers liés au climat. D’abord, pour garantir leur conformité à la directive de BAM sur la gestion des risques climatiques et environnementaux. Ensuite, pour œuvrer à aligner leurs cadres de gestion des risques climatiques sur les orientations mondiales et les bonnes pratiques internationales.
Les domaines clés sur lesquels les banques doivent se concentrer incluent le développement de structures de gouvernance claires, l’intégration des risques climatiques dans leurs cadres de gestion des risques, et l’amélioration de la divulgation des risques climatiques. De plus, elles doivent améliorer leur capacité à collecter et utiliser des données internes pour évaluer les risques climatiques, notamment en travaillant en collaboration avec leurs partenaires.
Ces recommandations visent à améliorer la gestion des risques liés au climat dans le secteur bancaire et à promouvoir la durabilité environnementale et la résilience financière.