Menu
Search
Mardi 23 Décembre 2025
S'abonner
close
Mardi 23 Décembre 2025
Menu
Search

Ce que dit la BAD sur la performance de ses opérations au Maroc

Dans son nouveau Rapport sur la performance de son portefeuille de projets au Maroc, la Banque africaine de développement identifie les défis et propose des solutions aux niveaux stratégique et opérationnel, afin de renforcer l’impact de ce partenariat stratégique. Le bilan 2025 révèle un portefeuille de 36 opérations totalisant 3,76 milliards de dollars, sans aucun projet à risque, avec des avancées concrètes. Mais des faiblesses persistent : 20% des projets sont épinglés pour lenteurs de décaissement, sept instruments sont éligibles à l’annulation, dont la phase I du Complexe solaire de Midelt. Détails.

Afin de renforcer l’impact du partenariat entre la Banque et le Maroc, les experts de la BAD recommandent d’opérationnaliser le nouveau Plan d’amélioration du portefeuille pays.
Afin de renforcer l’impact du partenariat entre la Banque et le Maroc, les experts de la BAD recommandent d’opérationnaliser le nouveau Plan d’amélioration du portefeuille pays.
La Banque africaine de développement (BAD) vient de publier sa Revue de la performance du portefeuille-pays 2025 pour le Maroc. Ce Rapport vise à évaluer la qualité des opérations financées par la Banque et à proposer des recommandations aux niveaux stratégique et opérationnel, améliorant ainsi la performance globale et éclairant la conception des opérations futures.

Une mise en œuvre appréciable du Document de stratégie pays

Selon la BAD, le Maroc bénéficie d’une stabilité politique et économique, malgré un contexte externe marqué par des risques commerciaux et climatiques. La croissance de 3,8% en 2024, la consolidation budgétaire et les importants investissements engagés pour la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2025 et la Coupe du Monde 2030 offrent un environnement porteur pour les opérations de la Banque. Toutefois, les défis sociaux demeurent importants, avec un taux de chômage de 13,3% touchant surtout les jeunes (36,7%), les diplômés (19,6%) et les femmes (19,4%).

Le portefeuille actif de la Banque au Maroc, au 2 septembre 2025, comprend 36 opérations pour un engagement total de 2,75 milliards d’unités de compte (UC), soit plus de 3,76 milliards de dollars. Il couvre huit secteurs, dominés par les infrastructures (61% des engagements), et reste aligné sur les priorités du gouvernement ainsi que sur la stratégie décennale de la Banque.

La mise en œuvre du Document de stratégie pays (DSP) 2024-2029 affiche des résultats appréciables. Sur les 17 projets prévus pour 2024-2025, représentant 1,38 milliard d’UC (1,89 milliard de dollars), 14 opérations ont été approuvées à mi-septembre 2025, soit 82,4% des prévisions et 63,6% de l’enveloppe financière ciblée. Cette performance est d’autant plus satisfaisante que quatre opérations supplémentaires, d’un montant de 937 millions d’UC (1,28 milliard de dollars), sont en cours d’instruction.

Les approbations ont permis de renforcer la synergie avec plusieurs partenaires techniques et financiers (PTF), notamment la Banque mondiale, la Banque européenne d’investissement (BEI), la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA), l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) la Banque islamique de développement (BID) et la Banque de développement allemande, (KfW). Elles ont également permis de mobiliser plus de 848 millions d’UC (1,16 milliard de dollars) de cofinancements, soit 96% des financements de la Banque. La BAD a aussi mobilisé trois assistances techniques pour 589.000 dollars afin d’appuyer le Maroc dans l’élaboration d’une stratégie de partenariat public-privé (PPP) pour les infrastructures sportives, visant à rééquilibrer la part de l’investissement privé/public de 1/3 à 2/3.

Des résultats concrets dans les secteurs prioritaires

Le Rapport fait état de réalisations tangibles dans plusieurs secteurs clés. Dans l’enseignement supérieur, le programme «Université Mohammed VI Polytechnique 4.0» (UM4.0), approuvé en mai 2024, a dépassé plusieurs objectifs avec 5.373 nouveaux étudiants inscrits en médecine, pharmacie et médecine dentaire (dont 3.107 femmes), 55.818 lits dans les campus au niveau national (dont 35.719 réservés aux femmes) et 6.154 nouveaux inscrits en première année dans les parcours des centres d’excellence (dont 3.403 femmes). Dans l’énergie, 910 nouveaux villages ont été électrifiés, permettant l’accès à l’électricité à 19.980 nouveaux foyers. Le taux d’électrification national atteint 99,91% et la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique est passée de 38,2% en 2023 à 45% en 2024. La capacité installée en renouvelables a progressé de 4.100 mégawatts (MW) à 5.439 MW.

Dans le secteur de l’eau, vital pour un pays confronté au stress hydrique, le taux d’accès à l’eau potable est de 100% en milieu urbain et de 97,6% en milieu rural à fin 2024. Le Projet de pérennisation et de sécurisation de l’accès à l’eau affiche un taux de réalisation physique de 98,5% et un taux de décaissement de 100% sur le prêt initial et de 83% sur le prêt

additionnel.

Dans les transports, le projet autoroutier Guercif-Nador affiche un taux d’avancement de 50% des travaux (à fin mai 2025), tandis que le projet d’aménagement de la zone d’activités du port de Nador West Med contribuera au renforcement de la compétitivité portuaire du Maroc et au développement de la région de l’Oriental. Le projet d’extension et de modernisation de l’aéroport de Rabat-Salé a permis la création de 3.000 emplois indirects, dont 1.020 en faveur des femmes.

Un portefeuille sans projet à risque, mais des lenteurs à corriger

L’âge moyen des opérations est de 2,87 ans, traduisant un portefeuille jeune et dynamique. Le taux de décaissement global est de 48,76% au 2 septembre 2025, ce qui est satisfaisant compte tenu de l’introduction de 14 nouvelles opérations au cours de l’année écoulée (10 en 2024 et quatre en 2025).

Point particulièrement positif : le portefeuille ne comprend aucune opération à risque, témoignant d’une bonne qualité globale. Toutefois, 20,6% des projets sont épinglés (6 sur 36), représentant 447 millions d’UC (612 millions de dollars), principalement en raison de lenteurs de décaissement. Sept instruments sont éligibles à l’annulation, notamment le Complexe solaire de Midelt (phase I), en raison du retard du premier décaissement, ou des lenteurs héritées de la crise de la Covid-19 dans le secteur de

l’énergie.

Le Rapport note néanmoins que le taux d’opérations épinglées a été divisé par deux entre janvier 2024 et septembre 2025, signe d’une amélioration progressive de la performance.

Des défis transversaux identifiés

La Revue 2025 formule des recommandations pour surmonter les difficultés identifiées, notamment au niveau de la mise en œuvre et de la gestion des projets, de la passation des marchés, de la gestion financière, du suivi-évaluation, des sauvegardes environnementales et sociales, du genre et de la résilience. Selon la BAD, si la performance du portefeuille est restée stable au cours des deux dernières années et devrait s’améliorer avec la mise en œuvre des enseignements de 2025, des efforts restent néanmoins nécessaires pour surmonter les insuffisances causant des épingles, principalement liées aux lenteurs en matière de décaissement. Malgré une bonne performance globale, notamment ces dernières années, celle-ci pourrait encore s’améliorer si ce problème récurrent était résolu dans certains projets.

La mise en place d’un pipeline de projets solide, construit en étroite coordination avec les partenaires techniques et financiers (PTF), constitue un levier essentiel pour améliorer la planification et l’efficacité des interventions. Adossé à des études analytiques approfondies et à des notes thématiques de qualité, ce dispositif permettrait non seulement d’anticiper les besoins et priorités stratégiques, mais aussi de renforcer la visibilité, la cohérence et la pertinence des projets proposés. En outre, un tel pipeline favoriserait une meilleure préparation en amont, alignant le calendrier d’instruction de la Banque sur celui du cycle de projet et améliorant la qualité globale des opérations financées.

L’opérationnalisation du nouveau Plan d’amélioration de la performance du portefeuille (PAPP) 2025 sera déterminante pour renforcer l’impact du partenariat stratégique entre la Banque et le Maroc.
Lisez nos e-Papers