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Ce que dit le premier rapport «Business Ready» de la Banque Mondiale sur le Maroc

Le Maroc brille pratiquement sur toute la ligne dans la première édition du Baromètre Business Ready, qui évalue le climat des affaires et l’investissement dans le monde. Ce nouvel indice que vient de dévoiler la Banque mondiale dans le cadre de son dernier rapport de suivi de l’économie nationale révèle des résultats encourageants pour le pays aussi bien en termes de son cadre réglementaire global que de ses services publics. Le Royaume surpasse ainsi les pays de niveau de revenu similaire en ce qui concerne l’évaluation des cadres réglementaires et des services publics, mais affiche des performances moins favorables en termes d’efficacité opérationnelle. Des contraintes à la pelle demeurent à résoudre notamment en matière d’emploi, de résolution des litiges et d'insolvabilité des entreprises. Le Baromètre qui remplace désormais le Doing Business abandonné en 2021 examine dix domaines clés couvrant l’ensemble du cycle de vie d’une entreprise, de la création à l’insolvabilité, en passant par l’accès aux services d’utilité publique, l’emploi, les services financiers, le commerce international, la fiscalité, le règlement des litiges et la concurrence du marché. Les détails.

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C’est une bonne nouvelle pour l’Exécutif Akhannouch et qui plus est, tombe dans un contexte de crise multi-dimensionnelle que traverse le pays. La Banque Mondiale a révélé, en effet, de bons scores pour le Maroc dans son premier baromètre du climat des affaires et de l’investissement baptisé Business Ready (B-Ready) qui remplace le Doing Business, abandonné par l’Institution de Bretton Woods en 2021, suite au signalement d’irrégularités constatées dans les données des éditions 2018 et 2020 de ce rapport, édité depuis 2003.



La bonne nouvelle c’est que cette première édition de B-Ready place le Maroc dans une position favorable, dépassant à la fois les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (son propre groupe) et les pays à revenu intermédiaire supérieur (le groupe aspirationnel) dans deux des trois piliers : le cadre réglementaire et les services publics. En revanche, le pays obtient de moins bons résultats dans la dimension de l’efficacité opérationnelle, légèrement en dessous de la moyenne des économies à revenu intermédiaire de la tranche supérieure et de la tranche inférieure. Pour les experts de la Banque mondial, ces résultats globaux témoignent des progrès significatifs réalisés par le Maroc dans l’amélioration de son climat des affaires. Néanmoins, une analyse détaillée des sous-indicateurs fournit une interprétation plus nuancée, révélant à la fois des points forts et des faiblesses qui pourraient être utiles pour identifier les principales réformes prioritaires à l’avenir. Le baromètre compare les scores du Maroc à ceux des pays classés selon leur niveau de revenu selon trois piliers : le cadre réglementaire, les services publics et l’efficacité opérationnelle. Prenons le cadre réglementaire. Sur ce critère, le Royaume affiche un score assez élevé, proche de celui des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure. Par rapport aux pays à revenu élevé, le pays obtient un score légèrement inférieur.

Conclusion, le cadre réglementaire marocain est relativement bien développé, mais reste à la traîne si on le compare, évidemment, aux ceux des pays à revenu élevé. Sur les services publics, le baromètre attribue au Maroc un score intermédiaire inférieur à celui des pays à revenu élevé et à revenu intermédiaire tranche supérieure. Mais il se situe, toutefois, au-dessus des pays à revenu intermédiaire tranche inférieure et à faible revenu, qui affichent les scores les plus bas. Les services publics au Maroc demeurent donc relativement faibles par rapport aux économies plus développées, mais restent supérieurs à ceux des pays à revenu plus bas. Une conclusion plus ou moins encourageante pour le gouvernement Akhannouch. Dans l’efficacité opérationnelle, le Royaume décroche un score, disons, correct, dépassant celui des pays à revenu intermédiaire tranche inférieure et à faible revenu. Il est proche des pays à revenu intermédiaire tranche supérieure, mais en dessous des pays à revenu élevé, qui obtiennent le score le plus haut. Le Royaume surpasse, en outre, la moyenne des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure en termes de création et d’implantation des entreprises, où le pays dépasse même les économies à revenu élevé, reflétant les progrès réalisés par l’initiative sur le climat des affaires au cours de la dernière décennie. Il obtient également de meilleurs résultats que les pays à revenu élevé en matière de services d’utilité publique, garantissant l’accès à l’électricité, à l’eau

et à Internet. Le Maroc surpasse également la plupart de ses pairs en matière de commerce international en bénéficiant d’un accès favorable aux marchés internationaux et de la numérisation des importations-exportations. En revanche, en comparaison à des pays similaires aspirants, le Maroc présente certaines faiblesses qui méritent une attention particulière.

Attention à l’insolvabilité des entreprises

En effet, les domaines clés dans lesquels le pays est en deçà par rapport à d’autres pays à revenu intermédiaire et à revenu élevé incluent l’emploi, la résolution des litiges et l’insolvabilité des entreprises. Il est essentiel de noter que les faiblesses observées dans ces domaines se concentrent principalement sur les services publics et l’efficacité opérationnelle, plutôt que sur le cadre réglementaire, qui performe généralement bien. Bien que les scores globaux du Maroc soient proches de la moyenne des économies à revenu intermédiaire supérieur dans plusieurs domaines, tels que les services financiers ou la concurrence sur le marché, cette performance masque une divergence entre la performance du cadre réglementaire élevée et une performance relativement faible en termes de services publics ou d’efficacité opérationnelle. Dans l’ensemble, expliquent les experts de B-Ready, cela suggère que, bien qu’il y existe une marge d’amélioration dans certains cadres réglementaires, Le Royaume devrait prioriser le renforcement de sa capacité à mettre en oeuvre efficacement des politiques visant à améliorer le climat des affaires.

Les coûts liés à l’emploi à améliorer

Comparer la performance du Maroc à celle des pays les plus performants dans les domaines couverts par les données B-Ready peut servir d’outil pour prioriser les réformes ayant le plus grand potentiel de développement. Plutôt que de se contenter de comparer les moyennes des différents pays, le baromètre fournit une analyse de frontière. Ainsi, la frontière la plus éloignée concerne le cadre réglementaire et l’efficacité opérationnelle des marchés du travail. Dans le cadre réglementaire, les données révèlent un contraste : tandis que le Maroc enregistre de bons résultats en matière de conditions de travail, plus précisément sur les droits des travailleurs et la cessation d’emploi, il accuse un retard dans des domaines tels que les restrictions et les coûts liés à l’emploi, notamment les conditions d’emploi, les taux de salaire minimum et les procédures de licenciement. De même, l’efficacité opérationnelle montre également des écarts substantiels concernant les restrictions et les coûts liés à l’emploi. Ces indicateurs suggèrent que, bien que les travailleurs formels au Maroc soient bien protégés, les entreprises rencontrent des obstacles et des coûts importants pour embaucher formellement. Ce qui contribue probablement à la forte prévalence de l’informalité dans le pays, même au sein des entreprises formelles, créant un écart marqué entre les «insiders» et les «outsiders», concluent les experts de la Banque mondiale. Dans ce scénario, les travailleurs formels (les insiders) bénéficient d’une protection juridique et d’avantages significatifs, tandis que les travailleurs informels (les outsiders) sont confrontés à des conditions très précaires. Cette disparité est susceptible d’exacerber les inégalités sociales et la création d’emplois, soulignant la nécessité d’une révision du Code du travail. Des différences importantes existent également dans le domaine de la résolution des litiges, qui est essentiel pour réduire l’incertitude des entreprises et renforcer la confiance des investisseurs. Le fait est que la distance à la frontière est particulièrement marquée dans plusieurs sous-indicateurs : la sécurité judiciaire dans les litiges juridiques (cadre réglementaire), la structure organisationnelle des tribunaux, la numérisation et la transparence des processus (services publics) et la fiabilité des tribunaux et des mécanismes de résolution alternative des litiges pour résoudre les affaires commerciales (efficacité opérationnelle). Pour améliorer la performance du système judiciaire, le Maroc pourrait envisager un certain nombre de mesures.

La réforme du code de procédure civile à accélérer

L’Institution de Bretton Woods suggère ainsi d’accélérer la réforme du Code de procédure civile, de moderniser et numériser les procédures judiciaires, de renforcer l’accès aux données ouvertes et la transparence des données et de développer les compétences des magistrats et des officiers judiciaires spécialisés en justice commerciale.

Le cadre d’insolvabilité des entreprises au Maroc affiche un écart important par rapport aux économies les plus performantes. Ce qui affecte la restructuration et la liquidation des entreprises et limite ainsi la réallocation des ressources vers des usages plus productifs. Un cadre d’insolvabilité solide est essentiel pour minimiser les risques pour les créanciers, maintenir l’activité économique et stimuler le dynamisme des entreprises et la croissance de la productivité. Selon les indicateurs B-Ready, il existe un écart important en ce qui concerne les normes post-commencement sur la liquidation et la réorganisation (cadre réglementaire), la numérisation des services publics et le temps requis pour accomplir les procédures de réorganisation (efficacité opérationnelle). Pour améliorer le système d’insolvabilité, le pays pourrait se concentrer sur l’achèvement du cadre juridique de la loi sur l’insolvabilité, y compris l’adoption de décrets relatifs à la qualification et aux honoraires des administrateurs, la numérisation des services clés pour la liquidation des entreprises en difficulté, et l’amélioration de la rapidité et de l’efficacité des procédures.

Le paiement électronique a encore du pain sur la planche

Le rapport souligne par ailleurs les progrès réalisés par le Maroc en matière de services financiers, bien que certains écarts localisés soient observés dans les indicateurs B-Ready. Les sous-indicateurs des services financiers montrent ainsi de grandes disparités, certains sont proches de la frontière, tandis que d’autres ont des écarts importants, notamment dans l’utilisation des sûretés mobilières pour garantir des prêts (pertinent pour les PME) et le développement des systèmes de paiement électronique. Certaines mesures pourraient être adoptées pour réduire ces écarts, à l’instar des ajustements réglementaires visant à étendre les types sûretés mobilières, de dettes et d’obligations pouvant servir de garantie, tout en sensibilisant aux avantages du Registre national électronique des sûretés mobilières afin de promouvoir son utilisation et son impact. La priorité pourrait aussi être donnée au développement des systèmes de paiement électronique en vue de diminuer les coûts et d’encourager leur adoption à plus grande échelle. Enfin, une meilleure collecte et un partage des données par les bureaux de crédit sont essentiels pour accroître la transparence et l’efficacité du marché financier.

L’innovation, le talon d’Achille du privé

Selon l’institution mondiale, les réformes récentes ont permis de rapprocher le Maroc des économies les plus performantes en matière de concurrence sur le marché. Toutefois, des progrès restent à réaliser notamment dans les domaines de l’innovation et des marchés publics. La réforme récente du cadre juridique concernant la liberté des prix et la concurrence, ainsi que celle du Conseil de la concurrence mise en oeuvre en 2022, a permis au Maroc de se conformer aux normes juridiques internationales, tel qu’il est confirmé par les résultats des indicateurs B-Ready. Ceux-ci montrent, en effet, un rapprochement de frontière sur les aspects du cadre réglementaire et de services publics. Pourtant, le Maroc présente un grand écart en matière d’efficacité opérationnelle. Cela est dû au faible nombre d’entreprises qui innovent ou adoptent des certifications de qualité internationales. Ce qui souligne la nécessité de renforcer les politiques publiques favorisant l’innovation, essentielle pour la croissance de la productivité. Un autre écart se manifeste dans le processus de passation des marchés publics, en raison des difficultés rencontrées par les entreprises privées lors de la soumission de leurs offres et des retards observés dans le processus d’attribution. Pour améliorer cette situation, la Banque suggère que le ministère de l’Économie et des finances pourrait continuer à revoir le cadre juridique et opérationnel des marchés publics et le Conseil de la concurrence pourrait intervenir pour garantir que les processus de passation des marchés soient compétitifs, transparents et efficaces, comme c’est le cas fait dans d’autres juridictions.
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