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Le potentiel de croissance du marché du Cloud selon Hicham Chiguer

Le marché marocain est encore en phase de maturation, avec une adoption initiale concentrée sur les services basiques tels que l’hébergement et l’infrastructure as a service (IaaS). C’est ce qu’avance, dans cet entretien, le président de l’Association des utilisateurs des systèmes d’information au Maroc (Ausim), Hicham Chiguer, pour qualifier le marché du Cloud au Maroc. Par la même occasion, il évalue la protection des données et la digitalisation des services publics au Maroc.

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Le Matin : Comment évaluez-vous le développement du Cloud au Maroc ?

Hicham Chiguer :
Le développement du Cloud au Maroc a connu une croissance notable grâce à la multiplication des opérateurs de Datacenter ou encore les opérateurs télécoms qui se diversifient, sachant bien que certains défis persistent. Les investissements dans les infrastructures Cloud et l'augmentation de la demande pour des solutions flexibles et sécurisées ont stimulé cette croissance.

Le marché du Cloud au Maroc devrait croître de 20% par an au cours des cinq prochaines années.

En 2023, l'Ausim a noté une adoption croissante des services Cloud, avec une ambition de certaines entreprises d'externaliser toutes les applications qui ne sont pas cœur de métier.

Du côté gouvernemental, le ministère de la transition numérique et de la réforme de l’administration et à travers l'Agence de développement du digital (ADD) jouent un rôle crucial en promouvant l'adoption des technologies Cloud à travers des initiatives stratégiques. Quant au secteur privé, des entreprises nationales et multinationales ont intégré le Cloud dans leurs stratégies pour améliorer l'agilité et la sécurité de leurs opérations.



Pourquoi l'offre nationale de services Cloud reste-t-elle limitée aux besoins basiques ?

Le marché marocain est encore en phase de maturation, avec une adoption initiale concentrée sur les services basiques tels que l'hébergement et l'infrastructure as a service (IaaS). Aussi, il y a un déficit de compétences en matière de développement et de gestion des services Cloud avancés (SaaS). À défaut de présence des hyperscalers (AWS, GCP, MS Azure, etc.), nous ne pouvons pas offrir ce service à forte valeur ajoutée ni accéder à l’IA générative tel que Gemini, ChatGPT, CoPilot, etc. (surtout pour les Organismes d’importance vitale)

Les investissements requis pour développer des solutions SaaS à haute valeur ajoutée sont élevés, et les acteurs locaux manquent parfois des ressources nécessaires. On peut quand même noter quelques solutions «made in Morocoo» dans ce modèle, mais reste très restreint.

Les préoccupations concernant la souveraineté des données et les régulations limitent parfois l'adoption de services Cloud avancés. Il y a un vrai sujet sur la définition et la catégorisation de la Data afin de libérer certaines fonctions à aller en dehors du Territoire national et trouver les bonnes solutions adéquates.

Comment développer un écosystème local autour de la protection des données au Maroc ?

• Il faut adapter et renforcer les lois existantes pour mieux protéger les données personnelles et encourager la conformité avec des standards internationaux comme le RGPD.

• Il faut mener des campagnes de sensibilisation et offrir des formations pour développer une culture de protection des données au sein des entreprises et des administrations.

• Il faut encourager la collaboration entre les secteurs public et privé pour partager les meilleures pratiques et développer des solutions adaptées.

• Il faut investir dans des infrastructures de sécurité robustes et des centres de données locaux pour assurer la souveraineté des données critiques.

Quel regard portez-vous sur le volet juridique relatif à la protection des données au Maroc ?

Le Maroc dispose d'un cadre juridique pour la protection des données personnelles, principalement fondé sur la loi n° 09-08, qui a établi les principes d'une protection appropriée des données. Toutefois, des améliorations s'imposent pour faire face aux enjeux actuels. La CNDP doit renforcer ses effectifs pour relever tous les défis d'adaptation et d'évolution. Le gouvernement doit soutenir cette instance dans sa démarche, mettre à jour les régulations pour les conformer aux standards internationaux comme le RGPD, permettant ainsi une meilleure intégration dans l'économie numérique mondiale sans oublier notre adaptabilité pour le marché africain. En plus de l'importance de sensibiliser les entreprises et les citoyens aux régulations et aux bonnes pratiques de protection des données.

L’Ausim a sorti un Livre blanc sur l’administration digitale. Quelle évaluation faites-vous de la e-administration et quelles sont les grandes recommandations de ce livre blanc ?

Le Maroc a fait des progrès significatifs dans la digitalisation des services publics, mais reste à la traîne par rapport aux standards internationaux, passant de la 30e position en 2014 à la 114e en 2022 selon l'«UN E-Government Index».

Seulement, 23% des services digitalisés sont entièrement dématérialisés, les autres restant partiellement ou entièrement physiques.

La notion du parcours du citoyen est à déployer. L’Ausim a toujours milité pour qu’elle soit adoptée lors des design thinking et re-engineering des process e-gov. Voici quelques recommandations principales du Livre blanc :

• Vision et gouvernance : Établir une vision claire et une gouvernance forte pour diriger les efforts de digitalisation.

• Interopérabilité : Promouvoir l'interopérabilité entre les différents systèmes et agences gouvernementales pour améliorer l'efficacité et la transparence des services.

• Acculturation numérique : Former et sensibiliser les ressources humaines à la culture numérique et recruter des talents spécialisés pour soutenir les initiatives de digitalisation.

• Adoption des technologies avancées : Encourager l'utilisation de l'intelligence artificielle et d'autres technologies avancées pour améliorer les services publics et soutenir la prise de décision.

• Open Data : Développer une politique d'Open Data pour rendre accessibles les données non sensibles aux citoyens et entreprises, stimulant ainsi l'innovation et l'efficacité.

Ces recommandations visent à accélérer la transformation digitale au Maroc, en s'inspirant des meilleures pratiques internationales et en répondant aux besoins spécifiques des citoyens et des entreprises.
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