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L'État abandonnera-t-il le projet de port de Kénitra Atlantique faute de financement ?

Le projet du port de Kénitra Atlantique ne connaîtra peut-être pas son premier coup de pioche sous le mandat de l’Exécutif Akhannouch. En tout cas, tout porte à le croire. Face au flou qui entoure les vraies raisons de son retard, le ministre istiqlalien de l’Équipement s’était seulement contenté, en mai dernier, lors d’une séance de questions-réponses au parlement, d’avancer que la «programmation de cette infrastructure dépend des financements». Or sa réalisation était pensée selon le principe du partenariat public-privé. Cette formule permet justement à l’État de partager les coûts et les risques avec le partenaire privé potentiel. Les secrets du retard sont peut-être scellés dans le Rapport préalable de réalisation du projet selon le contrat PPP, réalisé en 2022 et soumis au département des Finances pour décision. Quel a été le verdict des Finances ? L’on n’en saura rien tant que l’Équipement n’aura pas réagi à nos interrogations qui ont fait l’objet d’une correspondance électronique datée du 19 décembre dernier.

La première phase du projet, d’un coût de 5,7 milliards de DH, comprendra une digue principale d’une longueur d’environ 2.660 mètres linéaires (ml) à -20,5 m/ZH et une autre secondaire d’une longueur de 765 ml en plus de deux quais.
La première phase du projet, d’un coût de 5,7 milliards de DH, comprendra une digue principale d’une longueur d’environ 2.660 mètres linéaires (ml) à -20,5 m/ZH et une autre secondaire d’une longueur de 765 ml en plus de deux quais.
Le projet du port de Kénitra Atlantique risque de demeurer très longtemps prisonnier des tiroirs du département de l’Équipement. Pourtant, cette future infrastructure portuaire constitue l’une des pièces maîtresses de la stratégie nationale portuaire à l’horizon 2030 aux côtés d’autres à l’instar du port de Dakhla Atlantique et Nador West Med dont les travaux d’aménagement ont atteint des stades très avancés.



Valeur aujourd’hui, le processus d’aménagement de ce port stratégique du Gharb accuse du retard et risque probablement de déroger au calendrier initial de sa réalisation et de son entrée en service (première phase). Du côté du monde de la logistique, les interrogations s’accumulent quant aux véritables raisons de ce retard. Certains opérateurs sont même prêts à croire à un abandon définitif du projet. Pour tirer ce dossier au clair, nous avons tenté de saisir le département de l’Équipement. Notre mail portant nos différentes interrogations, envoyé le 19 décembre dernier au ministère, est resté sans réponse. Un check des différents documents accompagnant le Budget de 2025 ne relève rien de particulier autour de ce projet hormis une petite mention dans le Rapport économique et financier.
Dans un paragraphe traitant de la consolidation des performances du transport maritime du Royaume, l’Exécutif s’est contenté d’affirmer dans ce document que le Maroc affiche une forte volonté de conserver ses acquis et de poursuivre sa progression pour maintenir son positionnement en tant que hub portuaire et logistique régional. Ainsi, poursuit le Rapport, plusieurs chantiers ont été lancés dont notamment le projet du Nador West Med qui sera opérationnel à partir de l’année 2025 et le port de Dakhla Atlantique dont les travaux ont été lancés pour une mise en service en 2028. Et d’ajouter «il s’agit également du port Atlantique de Kénitra, dont les études techniques ont été achevées, du nouveau port à Tan-Tan en phase d’étude ainsi que les nouveaux ports de phosphate de Laâyoune et de Safi en cours de construction». L’on en retiendra seulement donc que les études techniques du futur port de Kénitra Atlantique ont été bel et bien achevées. Mais ce qui semble sûr c’est que le projet est confronté à un problème de soutenabilité budgétaire.
Ce défi était déjà exposé dans le Rapport économique et financier accompagnant la Loi de Finances de 2023. Nizar Baraka, qui a été interpellé par rapport à ce projet, en mai 2024, dans une séance de questions-réponses à la première chambre du parlement, a laissé les curiosités sur leur faim, se contentant d’avancer que «la programmation des travaux de construction de cette infrastructure dépend de la disponibilité des financements nécessaires du projet, dont le coût est estimé à 7,7 milliards de dirhams, dont 5,7 milliards pour la première phase». Or, le projet devait normalement être réalisé dans le cadre d'un partenariat public-privé (PPP). Ce qui veut dire que la soutenabilité budgétaire du projet ne doit pas dépendre si étroitement du Budget de l’État qui, selon cette formule, ne supportera pas la totalité des coûts de sa réalisation.

Les véritables secrets entourant le retard de réalisation de cette infrastructure sont peut-être scellés dans le Rapport d’évaluation préalable pour sa réalisation selon la formule PPP qui a été finalisé en 2022 et soumis au département des Finances pour décision. Quel a été le verdict des Finances sur la base de ce document ? L’on n’en saura rien tant que le département de Nizar Baraka, maître d’ouvrage du projet, n’aura pas réagi à nos interrogations. L’article 1 de la Loi 86-12 sur les contrats de PPP, définit cette formule comme «un contrat de durée déterminée, par lequel une personne publique (l’État, établissements et entreprises publiques) confie à un partenaire privé (personne morale de droit privé, y compris celle dont le capital est détenu partiellement ou totalement par une personne publique) la responsabilité de réaliser une mission globale de conception, de financement de tout ou partie, de construction ou de réhabilitation, de maintenance et/ou d’exploitation d’un ouvrage ou infrastructure ou de prestations de services nécessaires à la fourniture d’un service public».
Pour rappel, cette future infrastructure était programmée dans l’objectif de renforcer l’offre portuaire du pôle Kénitra-Casablanca par un nouveau port de commerce sur la façade atlantique de la région de Rabat-Salé-Kénitra. Le site du projet est situé à 24 km au nord de l’embouchure d’Oued Sebou et à 2 km de l’autoroute reliant Rabat et Tanger et longeant le littoral. Il est structuré en deux phases.
La première (5,7 milliards de DH) comprendra une digue principale d’une longueur d’environ 2.660 mètres linéaires (ml) à -20,5 m/ZH (zéro hydrographique ; mesure de profondeur en mer) et une autre secondaire d’une longueur de 765 ml en plus de deux quais. Le premier, d’une longueur de 280 ml, de sera dédié aux céréales, tandis que le second (270 ml) sera réservé au trafic voiturier. L’infrastructure abritera également un poste hydrocarbures raffinés à -16,5 m/ZH et un quai de services de 150 ml. S’agissant de la deuxième phase (2,3 milliards de DH), elle abritera 2 quais pour minerais avec un linéaire de 270 m chacun, un autre pour le sucre (270 ml) et trois autres pour le trafic divers faisant chacun 245 ml.
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