Menu
Search
Vendredi 25 Avril 2025
S'abonner
close
Vendredi 25 Avril 2025
Menu
Search

Prix des viandes rouges : Les rouages d’un marché foncièrement déréglé

Le marché des viandes rouges au Maroc peine toujours à retrouver son équilibre. S’il est vrai que la succession des années de sécheresse et l’inflation des aliments pour bétail ont fait renchérir les facteurs de production et partant les prix des viandes rouges, il n’en demeure pas moins que les nombreuses mesures introduites par l’Exécutif Akhannouch pour renforcer l’offre et favoriser un retour à l’équilibre du marché n’ont pas produit l’effet escompté. Ni les exonérations des droits de douane sur les importations des viandes fraîches et du bétail, ni l’annulation du sacrifice du mouton, ni les subventions des aliments pour animaux, encore moins les précipitations et leur impact sur la régénération des parcours ne semblent désamorcer la pression sur les prix qui continuent insolemment d’osciller entre 90 et 100 DH le kilo. Où est le problème ? Qui entretient cette inflation et pour quel intérêt ? Pourquoi aucune enquête n’a-t-elle été diligentée par le gouvernement ou les instances chargées du contrôle au sujet des déclarations de Ryad Mezzour qui a évoqué des fiefs de résistance aux mesures de régulation de l’offre sur le marché ? Décryptage.

L’affaire est entendue. La filière des viandes rouges au Maroc est embourbée dans des complexités structurelles. La succession des années de sécheresse, conjuguée aux effets du changement climatique, a décimé les parcours et fait renchérir outre mesure les matières fourragères et les aliments composés. Résultat des courses, les petits éleveurs, dont une grande partie est concentrée dans les régions de la Chaouia, du Gharb, des Doukkala, Abda, l’Oriental et Rehamna, ont été contraints de se séparer de leurs cheptels, bovins et ovins. Les moyens éleveurs, eux, ont reproduit le même scénario ou presque. Ceux opérant dans les zones irriguées ont réduit leurs cheptels de moitié, sinon plus, pour une question d’optimisation des coûts. Les éleveurs se situant dans les zones Bour, quant à eux, n’ont pas le choix : il a fallu tout liquider. Car, pour bon nombre d’entre eux, c’est désormais une question de survie : «c’est ou moi ou le cheptel». Naturellement, ces turbulences ont impacté à la hausse les prix des viandes rouges. Chez le boucher du coin, le prix au kilogramme (viande bovine) a culminé à 120 dirhams, voire 140 dans certaines zones, avant d’emprunter une courbe descendante, quelques jours après la Décision Royale d’annuler le sacrifice du mouton et non pas la fête, évidemment.

Dans les zones périphériques de la capitale économique, les prix ont cédé pratiquement 15 à 20 dirhams par kilo. Mais cette détente n’a pas duré longtemps. Les prix sont vite repartis à la hausse. «L’annulation du sacrifice a poussé un bon nombre d’éleveurs à liquider leur cheptel constitué essentiellement de moutons. Car, son maintien n’est plus possible, l’engraissement d’un mouton coûtant entre 15 à 20 dirhams par jour. C’est donc cette euphorie qui a été derrière la légère baisse générale des prix des viandes rouges», nous explique Abderrahmane El-Majdoubi, président de l’Association nationale des éleveurs ovins et caprins (ANOC). Avant l’annulation du sacrifice, la viande ovine, elle, se faisant de plus en plus rare, avait atteint le prix insolent de 140 dirhams. Actuellement, elle a subi une légère détente, se situant aux alentours de 100 dirhams le kilo. Si la montée des prix est jugée scandaleuse par la ménagère, les professionnels de la filière, eux, évoquent une seule raison : «La rareté de l’offre et la multiplicité des intermédiaires !» Loin de toute spéculation stérile ou manipulatrice sur cette hausse vertigineuse des prix, des interrogations légitimes s’imposent. Est-ce vraiment la sécheresse et ses impacts sur la filière qui justifient, à eux seuls, cette inflation insolente des prix ? Y a-t-il d’autres facteurs qui auraient contribué à cette rage des prix ? L’Exécutif a-t-il réagi en prenant les bonnes mesures ? Quelle est sa part de responsabilité dans cette situation ? Pour tenter de révéler les véritables raisons ayant été derrière cette poussée frénétique des prix de la viande rouge au Maroc, «Le Matin» s’est prêté à l’exercice de remonter la chaîne de valeurs de la filière, du boucher du coin à l’éleveur passant par les différents maillons de la chaîne dont le négoce des têtes bovines et ovines à la ferme, le transport, l’abattage et la distribution. Nous démarrons notre aventure chez le boucher du coin.



Pour pouvoir recueillir des informations qui reflètent plus ou moins la réalité du marché, nous avons choisi une zone périphérique de Casablanca, Chellalate. Une commune réputée pour ses bonnes viandes et qui connaît une grande affluence des clients qui font le déplacement, chaque week-end, des 4 coins de la région pour faire leur emplette en viandes rouges. On est samedi 15 mars. Chez Abdelfattah Saâdi, un boucher de la place, les clients se bousculent. Chacun personnalise sa commande et en revendique la priorité. Saâdi vend ses viandes à 90 dirhams le kilogramme. «C’est de la viande bon marché ici et qui est, en plus, de bonne qualité», témoigne un client, la quarantaine, qui jure ne jamais s’approvisionner ailleurs, lui qui vient chaque week-end du quartier des Roches Noires à Casablanca. Il faut dire qu’un simple checking des différents bouchers de la commune permet de révéler des prix contrastés. C’est d’ailleurs un constat que nous avons pu confirmer auprès des marchés dans d’autres villes. Les prix varient ainsi entre 75 et 100 dirhams le kilo.

Comment expliquer alors une telle disparité ? À en croire Abdelfattah Saâdi, ces différences des prix sont dues aux sources d’approvisionnement des bouchers. Le fait est que les bouchers qui offrent des viandes avec un bon rapport qualité-prix s’approvisionnent directement chez l’éleveur. En effet, les plus futés d’entre eux ont tissé des liens très étroits avec leurs éleveurs-fournisseurs, généralement de tailles petite et moyenne et opérant, pour la plupart d’entre eux, dans les régions de la Chaouia, des Doukkala et du Gharb. Des zones où ces producteurs font encore preuve de résilience grâce à l’irrigation. En cultivant leurs propres matières fourragères, à l’instar de l’avoine, de l’orge et du maïs, ces éleveurs résistent tant bien que mal à l’inflation des aliments pour bétail. Les négoces directs permettent du coup aux bouchers de sécuriser à l’avance la disponibilité du bétail à l’abattage et bénéficier des avantages de la vente directe. Pas donc de «Chennaka» (intermédiaires). Mais ce mode d’approvisionnement direct chez l’éleveur est quasiment minoritaire dans un secteur où les souks hebdomadaires constituent la principale bourse du bétail au Maroc. Ces plateformes concentrent pratiquement la majorité des transactions autour des bovins, ovins et caprins. Hicham M., également boucher dans la commune de Aïn Harrouda (Mohammedia), s’approvisionne, lui, dans les souks hebdomadaires. Très souvent, il fréquente, chaque samedi, le marché à bestiaux de Tit Mellil. Et il doit y être dès vendredi soir. Avant son arrivée au souk, les intermédiaires ont d’ores et déjà fait le premier boulot : l’achat des têtes aux éleveurs.

Les «Chennakas», maîtres absolus des marchés aux bestiaux

À l’entrée de la «Rahba», les «Chennaka» font la première rafle. Et c’est là où tout se joue côté prix. Les éleveurs qui ramènent leur bétail au souk cèdent facilement à la pression des intermédiaires et leur lâchent leurs bêtes avec des prix parfois très en deçà de leur valeur réelle. L’éleveur ne maîtrisant pas vraiment l’art de commercer, ce n’est d’ailleurs pas son métier, se contente d’une petite marge et s’en va. Très souvent, il rentre à peine dans ses frais. Mais pourquoi ne vend-il pas directement au boucher ? «Et bien, tout simplement parce que le marché des bestiaux est fait de cette manière. Les intermédiaires reprennent le bétail à l’entrée et s’occupent de la deuxième vente. En moins de 4 heures de marché, leurs marges subissent l’effet boule de neige. D’un intermédiaire à l’autre, les prix ne cessent d’enfler. Les marges sont élastiques et se réajustent en fonction de l’offre et de la demande. La succession des années de sécheresse et la diminution du cheptel ont fait monter les prix, certes, mais les marges des intermédiaires ont grimpé d’une manière indécente», nous confie un éleveur. Il se trouve que ces marges sont très souvent exagérées, comme nous avons pu le constater. C’est dire que l’opportunisme de ces négociants alimente sensiblement l’inflation des viandes.

De l’aveu de plusieurs professionnels, la commercialisation du bétail demeure anarchique au Maroc. La chaîne de valeurs est très éclatée, comptant plusieurs acteurs dont de multiples intermédiaires qui se font des marges sur le dos de l’éleveur et du consommateur, sans réellement générer une valeur ajoutée. Ce même constat avait, d’ailleurs, été relevé par le président du Conseil de la concurrence, dans une récente sortie médiatique. Selon Ahmed Rahhou, les intermédiaires sont nécessaires dans les chaînes de valeurs des filières agricoles. Car ce sont ces opérateurs qui constituent le trait d’union entre le producteur et le consommateur. Mais leurs marges doivent correspondre à la valeur ajoutée générée, soulignait avec insistance le patron du Conseil qui promettait, au passage, l’émission d’un avis sur la filière des viandes rouges dans les mois qui viennent. Pour le patron de l’ANOC, la chaîne de valeurs de la filière est sujette à de nombreux dysfonctionnements. «En effet, explique-t-il, à l’instar d’autres filières agricoles, le secteur des viandes rouges pêche par l’anarchie qui caractérise ses circuits de commercialisation. Le négoce de bétail se fait généralement dans les souks où les intermédiaires jouent un rôle important dans la détermination de la courbe des prix. Le perdant dans tout cela est bien évidemment l’éleveur qui ne récupère pas la valeur de son travail et le consommateur qui doit supporter les marges excessives sur toute la chaîne», constate non sans amertume le président de l’ANOC qui estime que le salut de la filière viendra, entre autres, d’une rupture dans les modes actuels de commercialisation.

Dans les marchés à bestiaux, la définition des prix des ovins et bovins se fait exclusivement à l’observation des bêtes exposées. Le prix est ainsi estimé selon un simple examen de la corpulence de la bête et non pas en fonction de son poids. «Les marchés du bétail pêchent également par cette manière de faire. Si les bovins étaient négociés dans la première vente en fonction de leurs poids moyennant un prix clair au kilogramme, l’on aurait au moins la possibilité d’assurer une traçabilité du prix, de l’éleveur au consommateur. À défaut, il est difficile de déterminer avec exactitude les marges faites par les uns et les autres sur toute la chaîne de valeurs», explique Majdoubi. L’opérateur appelle ainsi le gouvernement à redoubler d’efforts pour enclencher une véritable révolution dans les circuits de commercialisation. «L’expérience de l’agrégation dans la filière introduite par le Plan Maroc Vert avait donné des résultats probants. Je pense qu’il serait opportun de continuer dans le même sens. La modernisation des circuits de commercialisation permettra aux institutionnels d’avoir une vue d’ensemble, aux éleveurs d’être dûment rémunérés pour leur travail et aux consommateurs d’accéder à des prix transparents en plus d’avoir une traçabilité des produits», développe le patron de l’ANOC.

L’éleveur, le plus faible maillon de la chaîne

L’éleveur est donc le maillon le plus faible de la chaîne. Son travail n’est pas rémunéré à sa juste valeur. La filière compte en effet deux catégories d’éleveurs. D’un côté, il y a les petits et moyens éleveurs qui possèdent 2 à 5 vaches laitières et, de l’autre, ceux, de grande taille, qui sont spécialisés dans l’engraissement des veaux. Ces derniers sont en grande partie intégrés et disposent, pour bon nombre d’entre eux, de leurs propres chaînes d’abattage. Nous nous intéressons aux premiers, les petits et les moyens. Ces derniers vendent du lait pour pouvoir couvrir les frais liés à l’entretien du bétail, comprenez les aliments fourragers et d’autres intrants (produits vétérinaires, équipements dédiés à l’élevage, etc.). La seule rémunération qu’ils perçoivent de leur travail provient de l’engraissement des veaux. En effet, après chaque vêlage, l’éleveur fait passer ses veaux à l’engraissement. Généralement, ce processus peut couvrir 4 à 8 mois, parfois moins lorsque le producteur a besoin du cash pour faire tourner son élevage.

Mais combien leur coûte l’engraissement ? Difficile de le calculer avec précision. C’est une opération que même les éleveurs n’en maîtrisent pas réellement le coût. Selon de nombreux éleveurs sondés par nos soins, la fluctuation des cours des aliments fourragers du fait de la sécheresse rend difficile un calcul précis des charges. Mais une chose est sûre, le coût d’engraissement a augmenté et partant le coût de revient par tête bovine et ovine. Cette hausse du coût de revient corrode les marges des éleveurs qui n’arrivent pas à gober, comme le consommateur d’ailleurs, le prix de vente de leurs viandes rouges affiché chez le boucher du coin.

D’après des sources proches des marchés d’aliments pour bétail, une balle de luzerne (25 à 30 kg) est actuellement négociée à 80 dirhams. Elle coûtait jusqu’à 130 dirhams avant les dernières précipitations. Celle de la paille est à 50 dirhams. Son prix culminait à 60 DH, il y a quelques semaines. Le son de blé, également utilisé dans l’engraissement, est vendu à 2,25 DH le kilogramme, en baisse de 40%. «C’est l’effet des dernières pluies qui constitue une véritable bouffée d’oxygène pour la régénération des parcours», se félicite le patron de l’ANOC qui entrevoit de belles perspectives pour la filière si toutefois de nouvelles mesures de soutien venaient à être entérinées en sa faveur par l’État. Interpellé par «Le Matin» par rapport à la montée des prix des viandes rouges, le département de l’Agriculture pointait, il y a quelques semaines, essentiellement l’inflation des facteurs de production du fait des sécheresses successives. Les intermédiaires ne sont pas évoqués. De même, plus aucun mot sur l’anarchie qui gangrène les circuits de commercialisation. Selon les services d’Ahmed El Bouari, «les six dernières années ont été marquées par des précipitations faibles et irrégulières ayant impacté la productivité des parcours et les disponibilités des ressources hydriques et alimentaires pour le cheptel.

Cette situation, conjuguée à la persistance des prix élevés des aliments de bétail sur les marchés locaux, dans un contexte d’inflation et de diminution du pouvoir d’achat des éleveurs, a mis le cheptel national dans une situation de vulnérabilité. Ce qui aura entraîné une baisse de la productivité et une réduction des effectifs et, partant, une baisse de l’offre en produits animaux et une augmentation de leurs prix». Le ministère relève également d’autres facteurs : la demande croissante en viandes rouges dans le pays et les défis structurels de la production nationale. L’Agriculture confirme, par ailleurs, nos constats. L’impact des sécheresses récurrentes a affecté gravement la filière des viandes rouges et poussé les éleveurs à vendre une partie de leur cheptel pour maintenir leur production. Pour juguler l’inflation de cette ressource vitale dans le panier de la ménagère, l’État avait décidé le recours à l’importation des viandes (fraîches, réfrigérées ou congelées). Une option qui s’est imposée comme une mesure d’urgence et une solution adaptée pour assurer un approvisionnement régulier du marché et alléger la pression sur le cheptel national. Sauf que cette mesure, le ministère nous en excusera, a eu un effet pratiquement nul sur les prix des viandes rouges. Il suffit de faire le tour des marchés pour s’en assurer.

Des prix têtus, malgré toutes les mesures

Selon les données mises à jour le 18 mars par Casa Prestations qui gère les abattoirs de Casablanca, les prix de la viande rouge bovine sur le marché du gros de la capitale économique s’élevaient à 90 dirhams le kilo. Ceux de la viande ovine oscillaient entre 60 et 97 dirhams/kg. Où est donc le problème ? Pourquoi l’opération d’importation, qui a d’ailleurs bénéficié d’une exonération des droits de douane, n’a-t-elle pas produit l’effet escompté ? Difficile d’obtenir une réponse à cette question. Mais des sorties médiatiques de certains ministres de l’Exécutif Akhannouch, notamment celle du ministre istiqlalien de l’Industrie et du commerce, Ryad Mezzour, sur la problématique des viandes rouges méritent d’être sérieusement examinées. Lors d’un débat télévisé diffusé sur «Medi1TV», fin février dernier, au sujet de l’inflation, le ministre affirmait qu’en dépit des efforts déployés, le modèle économique du secteur de la viande rouge résiste aux tentatives de régulation. Mais qui entretient cette résistance ? Ryad Mezzour ne mâche pas ses mots : «Parmi les facteurs de cette résistance figure la présence d’un nombre limité de spéculateurs, au nombre de 18, dans ce secteur».

Le ministre a ainsi lâché un pavé dans la marre. Et pourtant, ses déclarations n’ont eu aucune suite malgré leur gravité. Or, une telle assertion doit normalement faire l’objet d’une enquête urgente du Conseil de la concurrence pour tirer au clair cette affaire. L’opinion publique se demande, et c’est totalement légitime, qui sont ces 18 spéculateurs qui font la pluie et le beau temps sur le marché ? Et sur quels bases et critères monopolisent-ils l’importation des viandes rouges et du bétail ? Pourquoi le gouvernement ne réagit-il pas à leurs pratiques qui biaiseraient les prix sur le marché ? En attendant un rebondissement du Conseil d’Ahmed Rahhou par rapport à ce dossier et bien sûr des autres institutions chargées de contrôle, reprenons les réactions du ministère de l’Agriculture à nos questions. Ce dernier affirme que d’autres mesures ont été prises pour tenter de réguler le marché. Il s’agit notamment du nouveau programme d’intervention urgent lancé dernièrement et qui est structuré autour de plusieurs axes visant à développer et à restaurer le cheptel et à contribuer au renforcement de la sécurité alimentaire du pays. Au niveau de l’abattage, le ministère de l’Agriculture assure avoir entrepris des efforts dans la mise à niveau des plateformes d’abattage en les intégrant au cœur du Contrat-Programme 2021-2030 conclu avec les professionnels de la filière des viandes rouges.

Le repeuplement du cheptel, une priorité pour l’État

En actionnant ces mesures, le ministère demeure optimiste, soulignant que la chaîne d’abattage évolue dans une dynamique positive. «Nous comptons actuellement 17 abattoirs agréés, ce qui permet de produire une viande dans des conditions d’hygiène et de sécurité sanitaire conformes aux normes. Génération Green prévoit, en outre, l’agrément de 120 abattoirs créés ou modernisées à l’horizon 2030», fait-il valoir. Et qu’en est-il réellement des perspectives de la filière dans ce contexte de complexités structurelles ? Réponse du ministère : «Les perspectives de la filière à moyen terme sont celles de la stratégie Génération Green et qui sont déclinées au niveau du contrat-programme du secteur». Il ajoute que l’objectif actuel est de rééquilibrer la filière des viandes rouges par le repeuplement du cheptel bovin, ovin et caprin notamment par la mise en place d’un programme portant sur des mesures d’urgence à entreprendre pour accompagner les éleveurs face aux difficultés rencontrées suite à l’impact de la sécheresse sur les facteurs de production. Il convient de noter que les récentes pluies observées au début du printemps et de l’automne sur les zones pastorales des régions de l’Oriental et du Sud-Est ont contribué à l’amélioration de l’état des parcours. «Cette amélioration, couplée à l’engagement du gouvernement, vise à soutenir les éleveurs grâce à un approvisionnement continu en aliments pour bétail subventionnés, ce qui permet d’espérer un retour rapide à une situation normale», espère le ministère. Le consommateur aussi.

Élevage ovin : des opérateurs pris au piège de la dette

Les éleveurs d’ovins traversent une crise. Depuis la décision d’annulation du sacrifice du mouton, les opérateurs de cette filière revendiquent des mesures d’accompagnement. «Le fait est qu’une grande partie des éleveurs spécialisés dans l’élevage ovin cumulent des dettes. Ils étaient sur des programmes d’engraissement pour la fête du sacrifice qu’ils avaient financés via des crédits bancaires et crédits – fournisseurs. Aujourd’hui, bon nombre d’entre eux sont menacés de faillites», regrette le président de l’ANOC. Selon lui, deux réunions ont été initiées dernièrement entre la profession et le département de l’Agriculture sur les problématiques que vit le secteur actuellement. L’ANOC a ainsi soumis au ministre de tutelle toute une série de propositions incluant notamment l’intensification du soutien aux aliments pour bétail et l’instauration d’une subvention dédiée à la brebis génitrice suite à l’interdiction de son abattage. La profession appelle également à accorder une attention particulière à l’élément humain dans le secteur afin d’encourager l’entrepreneuriat dans l’élevage. Ce qui a la vertu de lutter contre l’exode rural dont la cadence ne cesse de monter du fait de la succession des années de sécheresse et les effets du changement climatique. «La tutelle nous a promis des mesures novatrices et audacieuses. De notre côté, nous demeurons engagés pour le développement de la filière notamment la recapitalisation du cheptel ovin et l’optimisation de sa productivité. Nous gardons espoir suite aux dernières précipitations qui auront des effets très positifs sur la régénération des parcours», nous confie le patron de l’ANOC qui vient de déposer un dossier auprès des autorités compétentes pour la constitution d’une nouvelle Fédération interprofessionnelle pour le secteur des viandes rouges. «Nous espérons que les procédures se dérouleront bien pour qu’on puisse disposer d’un nouveau cadre institutionnel permettant de représenter les différentes professions de la filière des viandes rouges», souligne Majdoubi.
Lisez nos e-Papers