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La tomate marocaine fait trembler les producteurs français

Alors que les étals français sont abondamment garnis de tomates cerises venues du Maroc, une levée de boucliers s’organise au sein de la filière française. En cause : le succès fulgurant de la tomate marocaine, devenue incontournable dans les rayons européens grâce à sa compétitivité, sa qualité et son mode de production durable. Un succès salué par les consommateurs, mais qui suscite l’irritation de certains producteurs français, déstabilisés par l’écart du coût de production entre les deux rives de la Méditerranée.

Selon les chiffres observés sur le marché, les tomates cerises marocaines sont vendues jusqu’à trois fois moins cher que leurs homologues françaises. Cette différence tarifaire, loin d’être artificielle, repose sur des fondamentaux économiques réels : un coût de main-d’œuvre naturellement plus bas, lié au différentiel de niveau de vie entre les deux pays, et une économie d’énergie significative grâce à un climat favorable. Contrairement aux serres chauffées françaises, les producteurs marocains cultivent en conditions naturelles, permettant une réduction de près de 30% de la facture énergétique.



Ces avantages structurels se traduisent par une offre compétitive et respectueuse des normes internationales, qui séduit les distributeurs européens. En 2024, le Maroc a exporté 760.000 tonnes de tomates, dont 580.000 tonnes vers l’Union européenne, pour un chiffre d’affaires avoisinant 11,5 milliards de dirhams. Rien qu’en France, la tomate cerise marocaine représente près de 10% du marché.

La riposte française : entre inquiétude et posture

Face à ce dynamisme, l’Association des producteurs de tomates et de concombres de France a récemment mené une campagne médiatique virulente, appelant à « consommer souverain » à travers des messages affirmant que « la souveraineté alimentaire commence dans l’assiette ». Elle vante ainsi les mérites d’une tomate française « juste, fraîche, transparente et responsable », tout en mettant en cause les standards marocains, notamment sur le plan social, environnemental et de traçabilité.

Mais pour l’Association marocaine des producteurs et exportateurs de fruits et légumes (APEFEL), ces critiques relèvent davantage de la désinformation que du débat de fond. Elle rappelle que les tomates marocaines sont rigoureusement contrôlées, d’abord par les autorités marocaines, puis par les services douaniers européens, avant leur mise sur le marché. Toutes les normes phytosanitaires, sociales et d’étiquetage sont respectées.

De plus, les producteurs marocains ont consenti à des efforts notables de modernisation et de durabilité : systèmes d’irrigation goutte-à-goutte, lutte intégrée contre les ravageurs, serres de dernière génération, pilotage agronomique, etc. Sur le plan social, le SMAG a été revalorisé à plusieurs reprises, avec une nouvelle hausse de 10% prévue pour 2025/2026.

Une agriculture sobre, durable et tournée vers l’avenir

La filière marocaine s’est imposée comme une réponse crédible et efficace à la demande européenne. Elle s’inscrit dans une logique de production durable, quatre fois moins émettrice de CO₂ que la culture sous serres chauffées, et capable de garantir la fraîcheur, la sécurité et l’accessibilité des produits, même en hiver.

Le Maroc est aujourd’hui le troisième exportateur mondial de tomates. Ce rang n’est pas le fruit du hasard, mais celui d’un écosystème performant, structuré, et aligné sur les standards internationaux. Un positionnement assumé, qui ne cherche pas à remplacer la production locale européenne, mais à compléter l’offre en répondant à une demande croissante et constante: 96% des ménages français achètent des tomates chaque année.

Liberté de choix et équité commerciale

Pour les exportateurs marocains, les critiques sur la “concurrence déloyale” sont infondées. Le cadre commercial est strictement encadré par l’accord d’association Maroc-UE, en vigueur depuis plus de 12 ans, avec des quotas qui limitent volontairement le volume exporté. L’APEFEL appelle d’ailleurs à une révision de ces quotas, devenus obsolètes au regard de la demande actuelle et des efforts réalisés par la filière.

« Le consommateur européen a le droit de choisir », rappelle l’Association. Remettre en cause ce choix libre revient à ignorer la réalité du marché, et à nier la capacité d’un pays émergent comme le Maroc à produire avec rigueur, ambition et respect de l’environnement.

Face aux tentatives de discrédit, la filière marocaine affiche sa sérénité et sa fierté. En conjuguant compétitivité, durabilité et conformité, elle incarne un modèle de développement agricole performant, au service du Maroc mais aussi des marchés européens. Dans un monde confronté à la hausse des coûts, aux défis climatiques et aux impératifs de souveraineté alimentaire, la tomate marocaine démontre qu’il est possible d’allier qualité, accessibilité et responsabilité. Une réussite qui inspire... et qui, parfois, dérange.
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