Comme pronostiqué quelques jours avant le mois sacré du Ramadan par le président de l'Association nationale des producteurs de viande de volailles (APV), Mostafa El Mountassir, les prix de la volaille connaissent, ces derniers jours, une légère détente. À la ferme, le prix au kg vif est de 15 dirhams. En y incluant les frais de transport et la marge des «riachate», ce prix monte à 18 ou 19 dirhams le kilo. Quelques jours avant le mois sacré, le prix au consommateur culminait à 25 dirhams le kilo.
Mais quelles sont les véritables raisons derrière la baisse de ces derniers jours ? Est-elle liée à une baisse des coûts de production ou s’agit-il tout simplement d’une demande qui diminue ? Pour le patron de l’APV, cette petite baisse, si précieuse dans un contexte d’inflation quasi générale, est l’effet d’un gain en productivité assorti d’une baisse de la demande, souvent constatée pendant le mois sacré. «Le marché connaît actuellement l’arrivée de poulets de chair pesant les 2,5 kg et plus. Ce qui contribue à la baisse constatée. Il faut dire aussi que la demande est timide pendant ce mois sacré. Une tendance récurrente d’ailleurs pendant ce mois», nous explique M. El Mountassir.
Sauf que cette détente n’est pas vouée à perdurer. À en croire le patron de l’APV, la profession fait toujours les frais de l’inflation insolente qui touche les prix des aliments composés. «À 15 dirhams le kilo à la ferme, l’éleveur rentre à peine dans ses frais», regrette M. El Mountassir qui revient à la charge pour dénoncer une cherté anormale des prix des aliments composés. En effet, détaille le patron de l’APV, les aliments composés pèsent pour 70% dans les coûts de production chez l’éleveur. «Le problème c’est que cette inflation des aliments composés ne se justifie pas au regard du niveau actuel des cours du maïs et du soja sur le marché mondial. Ces deux intrants constituent les principaux ingrédients des aliments composés. En fait, les prix du maïs ont chuté de 40%, tandis que ceux du soja ont décru de 30%, et ce il y a déjà plus de 4 mois», explique M. El Mountassir.
Selon lui, cette baisse des cours n’a pas été répercutée sur les prix des aliments composés. Ce qui risque, selon M. El Mountassir, d'enflammer encore les prix de la volaille dans les semaines qui viennent. «La petite baisse actuelle n’est certainement pas durable. Une fois la production actuelle écoulée, les prix réemprunteront le chemin de la hausse», alerte l’éleveur. Pour lui, plusieurs opérateurs vont devoir tailler dans leurs poulaillers, les coûts de production étant insupportables. En plus de l’inflation des coûts de production, la profession est confrontée à l’aggravation du stress hydrique. Bon nombre d’élevages ont ainsi été mis à l’arrêts pour manque d’eau. Ensemble, ces facteurs (coûts de production, stress hydrique) risquent de favoriser l’installation d’une inflation structurelle des viandes blanches.
Avec une production estimée à près de 655.000 tonnes de viandes de volaille et 5 milliards d’œufs de consommation, la filière avicole couvre actuellement 100% des besoins en viandes de volaille, soit 55% de la consommation totale, toutes viandes confondues, et 100% des besoins en œufs de consommation. Le secteur compte aujourd’hui quelque 46 usines de fabrication d'aliments composés, 56 unités d'accouvage, 3 couvoirs de poussins de type ponte, 4 couvoirs de dindonneaux et pas moins de 7.627 élevages de poulets de chair autorisés. À cela s’ajoutent 900 élevages de dindes de chair autorisés, 252 élevages de poules pondeuses autorisés et 30 abattoirs avicoles agréés. Par ailleurs, les investissements cumulés du secteur s’élèvent à 13,9 milliards de dirhams. La filière génère un chiffre d’affaires de 36,9 milliards de dirhams et emploie directement 142.000 personnes et 328.000 de manière indirecte.
Maïs et soja : une abondante production mondiale attendue cette année
Selon les données de la l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), publiée le 8 mars, l’indice des prix des céréales, calculé par l’organisme onusien, a chuté de 5% en février 2024 pour atteindre un niveau inférieur de 22,4% à celui de février 2023. Les prix du maïs à l’exportation ont ainsi enregistré la plus forte contraction, en raison des abondantes récoltes attendues en Amérique du Sud et des prix compétitifs offerts par l’Ukraine. De même, les prix internationaux de l’huile de soja ont accusé un fort recul, étant donné que l’on prévoit une importante production de soja en Amérique du Sud.