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Transactions de fusion et d'acquisition : il y aura indéniablement un avant et un après covid

Transactions de fusion et d'acquisition : il y aura indéniablement un avant et un après covid

Christophe Bachelet, Managing Partner DLA PIPER & Camilia Benani, Counsel DLA PIPER

La pandémie de coronavirus Covid-19 a mis en suspens plusieurs projets de rapprochements entre grands groupes. Elle a également modifié le paysage des risques et les protocoles de diligence pour les transactions de fusion et d'acquisition.

Plusieurs opérations d’acquisition ont été mises en suspens ou retardées, ce qui ne veut pas dire pour autant qu’elles aient été simplement abandonnées. La période de confinement a mis en exergue le retard dans la digitalisation de nos processus de signature, la gestion des dossiers par nos autorités de régulation, nos systèmes de visioconférence des organes de gouvernance ne répondant pas notamment aux critères de confidentialité requis par le législateur. Autant de lacunes qui nous l’espérons seront comblées par des réformes à instaurer dès que possible mais qui ont contribué à retarder significativement les transactions en cours.

La notion de pandémie était oubliée des définitions usuelles de la place en matière de cas de force majeure capturée dans les clauses dites de material adverse change couvrant des événements significatifs dont la nature et l’ampleur permettent aux parties de renoncer à réaliser l’opération envisagée si ceux-ci se réalisent durant la période courant entre la signature du protocole de cession et la réalisation des opérations convenues. Ces clauses peuvent couvrir des événements très larges (retournement du marché financier mondial ou local, du secteur d’activité concerné) jusqu’à des sujets plus réduits (perte totale ou partielle de l’actif clé de la cible) on parle alors de Business Mac.

Le cas du COVID s’est invité dans les négociations et rédactions de ces clauses du fait de son ampleur et impact sans précédent. Il se doit d’être adressé contractuellement mais sans pour autant devenir une exit clause trop aisément exerçable pour devenir un sujet d’insécurité juridique en fixant par exemple un seuil de matérialité objectif quant à son effet sur la valorisation de la cible. L’on en vient ainsi à la principale « révolution » selon nous d’un tel évènement qui est la fin du recours à des comptes de référence anciens dans les protocoles (10 mois voire parfois plus d’un exercice financier).

Des nouveaux audits financiers ont été lancés pour fixer des comptes de référence récents permettant de mesurer l’impact du covid sur l’activité de la cible avec en toile de fond la volonté de l’investisseur de renégocier le prix à la baisse avec in fine une décote liée au risque pris par celui-ci dans un climat d’incertitude des marchés post COVID. Pour le moment on ne peut parler d’un retour aux clauses d’ajustement de prix post closing mais plus à des confirmatory due diligences menées entre le signing et le closing pour confirmer ou réajuster le prix sur la base de comptes plus récents certifiés ou justifier, le cas échéant, la fin de la transaction quand les résultats ne sont pas positifs. Des contrats clients clefs sont aussi revus sous le prisme de la force majeure pour s’assurer de leur robustesse juridique. La cible a-t-elle été en mesure d’honorer ses engagements auprès des institutions financières ? Y-a-t-il des clauses dans la documentation de crédit permettant un remboursement anticipé en cas de décrochage du marché ? La qualité des garanties de paiement (garantie bancaire, retainer ou retenue sur le prix d’acquisition, garantie maison mère) est également revue davantage et les plafonds et durée des déclarations et garanties sont naturellement revus à la hausse ? Quid du sort des dividendes initialement prévus ?

Dans les secteurs industriels les plus touchés où les lignes de production ont été arrêtées, le covid est vu comme un test du management en place à gérer des situations de crise. Dès lors dans la recherche des futurs managers le critère d’aptitude à gérer des situations post crise sanitaires et crise financière est plus mis en avant. Faut- il instaurer une période de transition post-closing que seule l’ancienne équipe de management est en mesure d’assurer du fait de sa connaissance des équipes ou au contraire recruter immédiatement un manager de transition expérimenté ? Le volet ressources humaines est regardé avec plus d’attention dans les due diligences, un comité d’hygiène et de sécurité a-t-il été mis en place, quel plan de retour au travail a été mis en place, mesures sanitaires et économiques prises ?

Il y aura indéniablement un avant et un après covid, celui-ci ayant prouvé que l’imprévisible peut malheureusement se réaliser et l’importance d’un encadrement contractuel lourd des processus d’acquisition pour parer à toutes les situations.

 

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