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Dangers sur internet : La protection des enfants nécessite un travail collaboratif entre informaticiens, parents et enseignants

La pandémie Covid-19 a bousculé nos pratiques numériques, en particulier chez les enfants. Ces derniers passent de plus en plus de temps en ligne et sont souvent victimes de cyberviolence et cyberharcèlement. Afin de les sensibiliser ainsi que leur entourage aux différents dangers sur la toile, le ministère de la Transition numérique et de la réforme de l’administration et le Centre marocain de recherches polytechniques et d’innovation (CMRPI) organisent, tout au long de ce mois de novembre, la première édition de la campagne nationale de prévention contre la cyberviolence et le cyberharcèlement.

Dangers sur internet : La protection des enfants nécessite un travail  collaboratif entre informaticiens, parents et enseignants
L’usage d’Internet en tant que moyen de communication s’est considérablement développé dernièrement en raison de la pandémie liée au Covid-19

Les outils technologiques et les appareils connectés font aujourd’hui partie du quotidien de nos enfants. Mais comment les mettre à l’abri des dangers qu’ils peuvent rencontrer sur la toile ? C’est une question que se posent souvent les parents face à l’augmentation des cas de cyberviolence et cyberharcèlement qui touchent les plus jeunes surtout depuis la pandémie de Covid-19.

En effet, de nombreux experts à travers le monde affirment que l’usage d’internet en tant que moyen de communication s’est considérablement développé dernièrement en raison de la pandémie liée au Covid-19. Résultat : certains comportements dont le cyberharcèlement et la cyberviolence ont augmenté de manière exponentielle au cours de cette période. «La pandémie a accéléré le phénomène de cybercriminalité et cyberviolence, pour d’une part, des raisons techniques telle la quantité d’heures à passer sur les écrans à cause du télétravail et du télé-enseignement, des jeux et des loisirs sur internet pour pallier aux restrictions de sortie. D’autre part, la pandémie a engendré une augmentation du taux des troubles psychologiques, voire psychiatriques, dont les moindres sont des dépressions dues à la diminution des contacts physiques, mais plus particulièrement de la population sensible et donc la population des enfants», explique au Matin Bernard Corbel, psychologue, précisant que la crise sanitaire a engendré ce que l’on appelle les déviances psychopathiques. «Il y a donc selon moi dans le contexte de la pandémie à la fois une augmentation des personnalités dangereuses et des personnalités vulnérables.

Nombreux sont les petits psychopathes autant que les adultes. Ces derniers trouvent sur internet une magnifique occasion d’exercer leur force maléfique et leur jouissance criminelle à l’encontre des victimes séduites dans un premier temps. Internet va permettre de faire des menaces ainsi qu’un chantage très efficace. Tellement efficace qu’un certain nombre de jeunes personnes peuvent se suicider à cause de celui-ci».

Face à l’ampleur de ce phénomène, le ministère de la Transition numérique et de la réforme de l’administration organise du 4 au 30 novembre la première édition de la campagne nationale de prévention contre la cyberviolence et le cyberharcèlement. Organisée en partenariat avec le Centre marocain de recherches polytechniques et d’innovation (CMRPI) et le Conseil de l’Europe, cette campagne de sensibilisation qui se tient sous le thème «Contribuons tous pour protéger nos enfants contre la cyberviolence et le cyberharcèlement», vise à sensibiliser les enfants et leur entourage, à savoir la famille et l’école, ainsi que l’ensemble des acteurs de la société marocaine, au sujet de la cyberviolence et cyberharcèlement à l’encontre des enfants. «Nous souhaitons à travers cette campagne sensibiliser au fait que nous sommes tous responsables de la protection des enfants en ligne. Il est temps de mettre en place des règles et de bonnes pratiques de cybersécurité. Il faut éduquer les plus jeunes à la citoyenneté numérique afin de comprendre qu’internet est un espace de droits et d’obligation, similaire au monde réel. Tout cela nécessite un travail collaboratif et coordonné entre les différents acteurs», a déclaré au Matin Youssef Bentaleb, président du CMRPI.

«Le plan d’action de cette campagne est axé sur la formation des acteurs qui opèrent pour la protection de l’enfance, à savoir l’entourage de l’enfant, les parents et tuteurs, ainsi que les enseignants. Quant à la sensibilisation, la campagne dans cette édition se déroule dans le monde virtuel, sur les réseaux sociaux, avec des ressources de sensibilisation adaptées aux plateformes de communication des enfants et des jeunes, puisque ces derniers y sont omniprésents», ajoute Bentaleb. 

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Que faire pour mieux protéger les enfants en ligne ?

Les conseils de Bernard Corbel, psychologue

Les enfants passent dernièrement plus de temps sur internet. Certains sites de discussion peuvent les emmener dans les filets d’un pédocriminel pouvant éventuellement se faire passer pour un autre enfant et lui proposer des échanges d’images, propos de séduction, rendez-vous sur le chemin de l’école... Aussi, très jeunes, les enfants s’intéressent aux questions sexuelles qui font l’objet d’une omerta dans beaucoup de familles ; ce qui les laisse en quête d’informations et de renseignements. Il suffit en général à ces enfants de taper quelques mots sur internet concernant la sexualité pour que des files de sites leur fournissent des images, des vidéos... Très rapidement, les enfants à partir de l’âge de 8-9 ans vont se faire une opinion erronée sur la sexualité et accumuler des émotions déplacées.
Pour bien les protéger, je pense qu’il faut bien mettre en place avec des informaticiens tous les systèmes de contrôle parental, de veiller à ce qu’aucun appareil (PC ou smartphone) connecté sur internet ne soit pas à disposition même par oubli. En parallèle, il faudrait que les parents créent un climat d’ouverture et de discussion avec leurs enfants sur les sujets de la sexualité et des relations humaines afin que ceux-ci puissent les alerter au moindre doute ou vécu embarrassant. Sachez enfin que si ce n’est pas chez eux ce sera peut-être sur le PC ou le smartphone d’un copain ou d’une copine qu’ils trouveront des accès à ce genre de contenu. Je propose donc que la famille se constitue comme une petite équipe qui se protège et à l’intérieur de laquelle il y a une bonne ambiance et une bonne communication. Les enseignants de leur côté devraient semblablement à la famille faire bloc pour protéger les enfants dont ils ont la charge. La pédophilie peut parfois frapper à l’intérieur d’un établissement. Il faudrait penser qu’une personnalité pédophile dangereuse l’est d’autant plus qu’elle est isolée et qu’elle frappe dans l’obscurité, à l’insu de tous. C’est la qualité de la communication basée sur la confiance qui permettra aux enfants de parler aux enseignants.

 

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Questions au président du Centre marocain de recherches polytechniques et d’innovation (CMRPI)

Youssef Bentaleb : «Les chiffres de cyberviolence et cyberharcèlement ont certainement augmenté avec l’impact de la pandémie Covid-19»

Quels sont les objectifs de cette campagne nationale de prévention contre la cyberviolence et le cyberharcèlement ?
Cette première édition de la campagne vise à sensibiliser la société marocaine aux multiples formes de violence en ligne, justement le cyberharcèlement à l’encontre des enfants, un tel phénomène qui commence à prendre de plus en plus d’ampleur chez les enfants et les jeunes sur les réseaux sociaux. Ces derniers ont aujourd’hui plus souvent recours aux nouvelles technologies de l’information et de la communication avec la conjoncture liée à la pandémie Covid-19. La campagne veut ainsi rappeler aux jeunes les bonnes pratiques de vigilance numérique, de tolérance ainsi que l’instauration d’un climat sain de cyberconfiance chez les internautes. Nous souhaitons leur rappeler qu’internet est surtout un espace d’opportunités, de connaissances, de développement, de création de la valeur ajoutée, de communication et non pas un espace de violence ou de règlement de compte ou de vengeance.

Peut-on dire que la crise sanitaire a été un accélérateur de la cybercriminalité et la cyberviolence chez les enfants ?
Bien que le niveau de maturité de la cybersécurité au Maroc soit assez bon, selon le dernier rapport de l’Union international des Télécommunications, la question de la protection des enfants en ligne pose toujours problème. Les chiffres sont relativement inquiétants, comme c’est le cas de la plupart des pays dans le monde. La cyberviolence et le cyberharcélement et généralement la cybercriminalité à l’encontre des enfants commencent à prendre de plus en plus de l’ampleur. Un rapport de l’UNESCO de 2020 sur les indicateurs d’usage d’internet le confirme d’ailleurs.
Aussi d’après l’enquête réalisée par le CMRPI, en 2019-2020 dans 9 régions du Maroc, environ 31% des enfants enquêtés ont été victimes d’actes de cyberviolence, et 25% d’entre eux ont recours à leurs parents après un évènement bouleversant sur internet. Ces chiffres ont certainement augmenté avec l’impact de la pandémie Covid-19, et le recours à l’enseignement à distance comme seule alternative permettant d’assurer la continuité des activités pédagogiques pendant le confinement.
Ceci dit, un effort supplémentaire de sensibilisation et de formation des internautes s’avère nécessaire. Cet effort doit être fait d’une façon continue, puisque la technologie est en évolution permanente, et les risques de la cybercriminalité sont de même en évolution.

Quels conseils donnerez-vous aux parents et aux enseignants pour protéger les enfants, d’autant plus que les appareils connectés sont devenus omniprésents dans la vie de ces derniers ?
Pour les parents, je leur demanderai de communiquer plus avec leurs enfants. Donnez-leur le temps nécessaire pour les écouter. Ils peuvent parfois avoir des problèmes sur internet, il est nécessaire qu’ils vous dévoilent leurs souffrances en ligne. Cela ne peut malheureusement pas se faire si vous gardez une grande distance entre vous et vos enfants. D’après les chiffres, peu d’enfants au Maroc se confient à leurs parents ou tuteurs s’ils sont victimes de cyberviolence. 
Deuxièmement, les parents doivent désormais éduquer leurs enfants au numérique. Les enfants sont influencés par la masse des informations qu’ils reçoivent chaque jour et à chaque instant sur leurs réseaux sociaux, y compris les fausses informations. Il incombe alors aux parents d’habituer leurs enfants à un usage modéré d’internet et les encourager à être responsables de la manière dont ils utilisent internet et sur le temps qu’ils passent sur la toile.
Quant aux enseignants, je leur recommande d’adapter leurs pédagogies pour inclure la composante d’internet, et des réseaux sociaux, comme étant un nouvel élément qui intervient aussi dans la classe. 
Je leur recommande aussi d’accompagner leurs élèves pour mieux utiliser internet et exploiter ses avantages, mais aussi être attentifs à l’ensemble des élèves, afin d’identifier en classe les élèves qui peuvent souffrir en silence du cyberharcèlement. 

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