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Football féminin : l’instauration du championnat professionnel porte ses fruits, mais tout n’est pas rose

Il y a un an, la Fédération Royale marocaine de football (FRMF) instaurait le professionnalisme dans le football féminin. Un an après, le football féminin au Maroc a beaucoup évolué. Tout n’est pas rose, mais le produit footballistique est en nette amélioration. Les conditions de jeu et la situation sociale des joueuses sont meilleures. Les joueuses professionnelles touchent de manière systématique leur salaire, versé directement par la FRMF dans leur compte bancaire. Les conditions de déplacement sont également meilleures qu’avant, grâce au minibus offert également par la FRMF aux clubs. Néanmoins, le nombre de pratiquantes reste faible et on note l’absence de cadres qualifiés.

Football féminin : l’instauration du championnat professionnel porte ses fruits, mais tout n’est pas rose
Le niveau du championnat féminin s’est nettement amélioré depuis l’instauration du professionnalisme.

Le développement du football féminin au Maroc s’est accéléré depuis un an, suite à l’instauration du championnat professionnel. Outre les conditions de jeu nettement améliorées, les footballeuses ne sont plus la merci du président du club qui peut parfois les payer et d’autres non, puisque c’est la FRMF qui prend désormais en charge directement leur salaire. Ce changement se reflète aussi bien sur le niveau de la compétition qui s’est sensiblement amélioré avec notamment plus d’engagement dans le jeu.
Au départ, l’idée d’instaurer le professionnalisme dans le football féminin a séduit les présidents de clubs, croyant pouvoir bénéficier de manière directe de la subvention de la FRMF. Cet enthousiasme allait vite laisser place à la frustration. Il faut dire que le projet tel qu’il a été conçu par l’instance fédérale a pris tout le monde de court, puisqu’au lieu de verser la subvention aux clubs, comme cela se faisait avant, la FRMF a décidé que cet argent soit remis directement aux footballeuses. En effet, c’est l’instance fédérale et non plus le club qui paye les pratiquantes.

Dans le détail, la Fédération prend en charge le salaire de l’ensemble des effectifs de première et deuxième division à hauteur de 3.500 DH pour les joueuses évoluant en première division et 2.600 DH pour celles qui jouent en deuxième division. Pour information, chaque club dispose d’un effectif de 25 joueuses. En outre, la FRMF prend aussi en charge les salaires de huit membres appartenant au staff technique et médical, dont l’entraîneur, son adjoint et le médecin. Si l’aide en elle-même a été appréciée, la manière avec laquelle elle octroyée n’est pas appréciée. Elle a frustré plusieurs dirigeants qui y voient un acte de dévalorisation du dirigeant sportif.
«On est pour l’aide de la FRMF, mais pas de cette manière. Verser directement des salaires aux joueuses est en soi une mauvaise idée. Cette manière de faire a encouragé l’indiscipline de certaines filles qui ne craignent plus de sanctions pécuniaires, puisque le chéquier et chez la FRMF. Du coup, la parole des présidents n’a plus aucune valeur», a-t-il regretté.
Une autre source abonde dans le même sens en révélant que le versement de l’argent directement aux joueuses a fait disparaître le principe de méritocratie : «Je comprends que la FRMF veuille s’assurer que son argent ne soit pas détourné, mais sa manière de faire a fait disparaître le principe d’équité entre les joueuses», déplore-t-il. Cette manière faire, dit-il, a mis sur un pied d’égalité les meilleures joueuses et les joueuses quelconques, puisqu’elles reçoivent toutes 3.500 DH ou 2.600 DH, selon la division où elles évoluent. Notre interlocuteur souligne qu’au final les meilleures joueuses ont fini par refuser de jouer ou de se déplacer parce qu’elles gagnent le même salaire que celles qui ne font rien.

Chantage exercé sur les joueuses
Privés de la subvention de la FRMF et de celles des pouvoirs publics en raison de la circulaire du ministère de l’Intérieur qui a demandé aux collectivités locales de ne plus octroyer d’aides aux associations du fait  de la pandémie de Covid-19, certains responsables ont fait chanter certaines pratiquantes pour leur extorquer des fonds. La FRMF a, d’ailleurs, radié plusieurs d’entre eux à vie. Ces sanctions n’ont malheureusement pas mis fin à la triche. Selon des sources bien informées, certains présidents auraient trouvé des parades pour bénéficier d’une partie des salaires des joueuses. La formule utilisée, d’après nos sources, consiste à faire inscrire comme joueuse professionnelle une fille membre de la famille ou du voisinage et, à la fin de chaque mois, une partie de ce salaire est récupérée.

Khadija Illa : La première année du professionnalisme a été un succès
Contactée à ce sujet, la présidente de la Ligue nationale du football féminin, Khadija Illa, a balayé d’un revers de la main les critiques émises par certains présidents. Elle assure que la première année de professionnalisme a été un succès. «Le football féminin avance et il va se développer davantage. Le président de la FRMF, Fouzi Lekjaa, a donné des moyens aux clubs pour travailler. Chaque club de première division coûte pratiquement 200 millions de centimes à la FRMF, soit plus de 70% de leur budget. Ils n’ont à apporter que 30% du budget. Chose que certains sont incapables de faire».
Très offensive, Mme Illa a tiré à boulets rouges sur ceux qui se plaignent d’avoir perdu de l’autorité sur les joueuses : «Ceux qui se plaignent sont généralement ceux qui ne font pas bien leur travail et qui n’ont pas une forte personnalité. Un président fort est quelqu’un qui peut révoquer les joueuses qu’il juge inutiles ou qui sont indisciplinées. Une fois qu’il nous informe, leur salaire est suspendu. Avec ce genre de mesures, les joueuses savent à quoi s’attendre. Nous avons des clubs qui n’ont pas ce genre de problème», a-t-elle indiqué. Pour enfoncer le clou, Mme Illa juge qu’un président qui est incapable d’apporter juste 30% du budget pour faire marcher son club ne doit pas rester en poste : «Que cherchent ces gens, que Fouzi Lekjaa prenne en charge toutes les charges des clubs ? Et qu’eux se contentent de prendre des photos et d’avoir le prestige d’être présidents. Celui qui est incapable d’assumer convenablement ses fonctions doit s’en aller», a-t-elle asséné. 

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