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Accidents de la circulation : pourquoi il est temps de revoir le Dahir relatif à l’indemnisation des victimes

Les dommages corporels causés aux victimes d’accidents survenus par un «véhicule terrestre à moteur» soumis à l’obligation d’assurance sont indemnisés selon les dispositions du Dahir du 2 octobre 1984. Mais 38 ans après, ce cadre juridique, toujours en vigueur, est décrié de partout, notamment par les avocats qui le qualifient d’injuste et de désuet. À cette occasion, le ministre de la Justice, Abdellatif Wahbi, s’est fait fort de de modifier ce Dahir qu’il a qualifié lui-même de «catastrophe». Et on ne peut pas lui donner tort puisque ce texte s’appuie par exemple sur un SMIG obsolète pour le calcul des compensations des préjudices subis pour la victime en cas d’incapacité temporaire de travail.

Accidents de la circulation : pourquoi il est temps de revoir le Dahir relatif à l’indemnisation des victimes

«Le dahir relatif à l’indemnisation des accidents de la circulation», du 2 octobre 1984, est un de ces textes qui font l’unanimité contre eux. Les avocats sont en effet tous d’accord pour le qualifier d’injuste et de désuet, appelant, depuis plusieurs années déjà, à ce qu’il soit révisé ou de procéder carrément à sa refonte. Des appels ont été lancés dans ce sens par le barreaux de Casablanca lors d’une conférence internationale organisée avant la pandémie de la Covid dans le but d’attirer l’attention sur l’injustice et la désuétude de ce texte. Et pas plus loin que lundi dernier, le Dahir du 2 octobre 1984 s’est invité à la séance des questions orales à la Chambre des représentants, à travers une question orale posée par l’ancien bâtonnier des barreaux de Marrakech, Mohamed Sibari, député au nom du PAM, au ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi.

Le Dahir sur l’indemnisation des accidents de la circulation, une catastrophe, selon Ouahbi 

Profitant de cette perche qui lui a été tendue, M. Ouahbi, ancien avocat et maîtrisant bien le dossier, a aussitôt qualifié ce cadre juridique de «catastrophe». «Les sommes versées dans le cadre de cette loi sont indignes et n’ont rien à voir avec l'idée que l’on doit se faire de la valeur du citoyen marocain et de celle de l’être humain en général. La question du réexamen du Dahir de 1984 a été soulevée plusieurs fois, mais la pression que subit le gouvernement au sujet des lois (Code de procédure pénale et Code pénal) présente un handicap majeur». a-t-il indiqué, dans sa réponse aux parlementaires, lors de la séance des questions orales, lundi dernier.

Le calcul des compensations des préjudices subis par la victime d'accident à revoir 

Partant de là, le ministre de la Justice a annoncé que le Dahir de 1984 relatif à l’indemnisation des accidents de la circulation sera reconsidéré, non seulement au regard du barème d’indemnisation, mais aussi de son application puisque, selon lui, les compagnies d’assurances versent les sommes dues aux victimes ou leurs ayants droit avec beaucoup de retard. Le responsable gouvernemental a ainsi exprimé sa ferme intention d’amender ce Dahir qui représente pour lui une priorité. Pour M. Ouahbi, le toilettage de ce cadre légal est une nécessité impérieuse. C’est ce que conforte, ajoute le ministre, les procès en cours et la jurisprudence en la matière, et surtout la nature des dispositions contenues dans ce texte qui sont nettement en déphasage avec la réalité. En effet, pour s’en convaincre, il suffit de relever que ce texte s’appuie sur un SMIG obsolète pour le calcul des compensations des préjudices subis par la victime en cas d’incapacité temporaire de travail, d'incapacité physique permanente ou au profit des ayants droit. Et pire encore, le calcul se fait sur la base des salaires, ce qui expose les étudiants et les sans emploi à des injustices flagrantes.

C’est justement ce qui a fait que les participants aux journées de débat organisées par le barreau de Casablanca avaient dressé un diagnostic désolant, avec une injustice globale en matière d’indemnisation, de détermination du préjudice, des modalités de calcul, des procédures judiciaires et de l’exécution des jugements. Et tant que le cadre juridique représenté par le Dahir de 1984 restera en vigueur, ces aberrations continueront d'être constatées.

Chiffres de l’ACAPS

Il est à souligner que les rapports de l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) montrent qu’en 2020, les ressources du Fonds de garantie des accidents de la circulation (FGAC) ont affiché une augmentation de 28,5% à 275,1 millions de dirhams. Ces ressources sont financées pour 55% par la contribution des assurés qui accuse une légère baisse de 0,9% à 151,3 millions de dirhams et à hauteur de 36% par les produits des placements qui affichent une forte augmentation de 159,5% à 99 millions de dirhams. Pour leur part, la participation des entreprises et le reversement des amendes ne représentent que 9% des ressources.

En revanche, le montant des indemnités payées aux victimes affiche une forte baisse de 60,1% (34,5 contre 86,6 millions de DH). La provision pour sinistre à payer a enregistré un montant de 1,6 milliard de dirhams. Les ouvertures de dossiers «sinistre» ont connu une hausse de 24,1% avec 4.694 nouveaux dossiers ouverts et créés en 2020 contre 3.783 en 2019. Les sinistres créés pour «auteur inconnu» et «défaut d’assurance» représentent 62% des dossiers ouverts, et affichent des hausses respectives de 21,9 et 25,9%. Ce Fonds est chargé d’assurer la réparation totale ou partielle des dommages corporels causés par un véhicule terrestre à moteur non lié à une voie ferrée, ou par ses remorques ou semi-remorques, dans le cas où les personnes responsables de ces accidents sont inconnues ou non assurées et incapables de dédommager les victimes en raison de leur insolvabilité.

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