Les banques participatives lancées au Maroc, il y a cinq ans, ont accompli bien des réalisations. Leur bilan global est globalement positif et le chantier de la finance participative trace son chemin vers la réussite qui permettrait de positionner le Maroc comme un hub financier régional. C’est la conclusion d’un rapport sur les cinq années d’activité de la finance participative au Maroc, réalisé par le cabinet Fineopolis & Al Maali. «Depuis leur démarrage en 2017, l’encours des financements accordés par les banques participatives n’a cessé de progresser pour atteindre les 21,5 milliards de DH à fin juin 2022, soit un taux de croissance annuel moyen (TCAM) de 96% entre juin 2018 et juin 2022», soulignent les auteurs de ce rapport publié vendredi.
Le document de 51 pages indique également que sur les 16,7 milliards de DH d’encours global réalisé par ce secteur, les financements participatifs immobiliers dominent avec 80%. Ils sont suivis par ceux destinés à l’équipement (12%) et ceux de trésorerie et à la consommation (7%). Pour les créances en souffrance, qui se logent au poste «Autres crédits et financements participatifs», elles représentent un total de plus de 70 millions de DH au terme du premier semestre 2022. Sur la période étudiée, ces créances «ont continué à progresser. Si l’on retraite la tendance en éliminant l’effet report des échéances de juin 2020 imposé par le contexte exceptionnel de première vague de la Covid, la pente de la courbe d’évolution des créances en souffrance perd considérablement de sa vigueur», note le rapport. Toutefois, de juin 2021 à juin 2022, les créances en souffrance ont affiché un net bond de 150%, expliqué par la généralisation progressive de la commercialisation de financements pour les entreprises et les professionnels. En ce qui concerne le taux de sinistralité, les banques et fenêtres participatives enregistrent un niveau moyen, sur toute la période, de 0,4% contre 8,8% pour le secteur bancaire conventionnel.
Durant ces cinq années d’existence, les ressources, composées de dépôts à vue (30%), dépôts d’investissement (10%), contrats de refinancement Wakala Bil Istithmar (20%) et du capital social (40%), ont connu une croissance moyenne annuelle de plus de 50%.Les banques participatives moins impactées que les conventionnelles par la crise sanitaire
De décembre 2017 à juin 2022, les banques et fenêtres participatives ont réalisé un carton plein en termes de résultats financiers. Leur produit net bancaire (PNB) a ainsi connu une progression annuelle moyenne de plus de 130%, passant de 2 millions de DH à plus de 312 millions. Cependant, un ralentissement de la tendance entre juin 2021 et juin 2022 a été souligné par les auteurs du rapport, «dans la mesure où le PNB n’a progressé que de 30% entre les deux dates». En contrepartie, Attijariwafa bank (AWB) n’affiche qu’une «timide» croissance de 3% sur toute période. À noter qu’aux fins de Benchmarking et par manque de données comptables consolidées du secteur bancaire conventionnel, les auteurs du rapport ont fait le choix de retenir les données d’AWB comme référence de comparaison, étant donné, expliquent, que cette dernière est la première banque de la place en termes de taille et de parts de marché, mais aussi car il est notoire que, globalement, les banques présentent plus ou moins la même structure de charges d’exploitation. «L’évolution du PNB chez AWB a enregistré un léger déclin de 55% en décembre 2020 pour ensuite marquer une évolution de 7% à fin décembre 2022», relève le rapport.
Par ailleurs, l’analyse note que malgré le contexte difficile de la crise sanitaire et ses répercussions sur les résultats des établissements bancaires, les banques participatives ont été plus résilientes en maintenant une tendance haussière du produit net bancaire sur les cinq ans, contrairement aux banques conventionnelles. En outre, le résultat net global des banques participatives est orienté dans le rouge. En juin 2022, il était de -65 millions de DH. Les plus grosses pertes ayant été enregistrées en juin 2019 (-207 millions de DH) avant de commencer à être résorbées à partir de juin 2020 (-183 millions de DH). «L’exercice de projection révèle que le secteur atteindrait son seuil de rentabilité vers la fin du premier semestre 2023», est-il estimé.
D’après les auteurs, cette situation permettra au secteur d’envisager plus sereinement des stratégies de croissance et d’entreprendre des actions allant dans le sens du développement de ses activités notamment sur le plan de l’extension du réseau. Pour ce qui est des produits d’exploitation, ils ont connu une évolution haussière. Cette performance qui s’illustre par la diversité des produits et services des banques participatives qui ont affiché une amélioration, notamment avec la mise en place de financements adéquats répondant aux besoins d’un segment de la population. «En recourant aux dépôts d’investissement, mais aussi et surtout aux contrats WBI pour le financement de leur activité, les banques et fenêtres participatives supportent un coût financier qui s’est élevé à 105,232 millions de DH à fin juin 2022», est-il noté. Aussi, avec une évolution moyenne de 13% sur les cinq ans, les charges générales d’exploitation du secteur ont signé une enveloppe globale de 360 millions de DH environ. Le rapport note que cette évolution «s’est faite sur deux phases. Une première phase d’augmentation, allant du démarrage jusqu’en juin 2019 avec TCAM d’un peu plus de 20%, suivie d’une deuxième phase de baisse, s’étendant jusqu’au 30 juin 2022, avec un taux de progression de seulement 8%».
En ce qui concerne l’évolution du réseau, 89 banques ont été implantées sur les trois premières années sur l’ensemble du territoire national alors que sur les trois dernières années seulement 47 ont été installées. Cela dit, malgré le contexte de la crise sanitaire et les difficultés par lesquelles les banques participatives passent, ces dernières maintiennent leurs efforts d’investissement qui se manifestent à travers l’évolution des dotations aux amortissements qui vont franchir le cap de 75 milliards de DH à fin décembre 2022. Cette évolution est marquée principalement par l’acquisition d’un système d’information bancaire participatif pour accompagner le développement des produits et services bancaires. De l’autre côté, les dotations nettes CES se sont établies à 9 millions de DH en juin 2022. Ces dernières poursuivront leur croissance sur les années à venir traduite par l’évolution annuelle des encours de financement et l’ouverture des banques participatives sur les entreprises.
Réseau des banques participatives : ouverture de 33 agences en moyenne annuelle
Depuis son lancement en 2017, le réseau des banques participatives est passé de 44 à 176 agences en décembre 2021, soit une croissance annuelle moyenne de plus de 63%. Toutefois, malgré cette dynamique, le secteur reste déficitaire et la tendance du «Big Crunch» en termes de fermetures d’agences chez les banques conventionnelles n’arrangeant pas les choses et freinant l’élan et l’ambition des banques participatives. En ce qui concerne la couverture géographique, et selon les derniers indicateurs de Bank Al-Maghrib de 2021, la région de Casablanca-Settat vient en tête avec 34% du réseau. Le podium est complété par Rabat-Salé-Kénitra (18%) et Fès-Meknès (11%). Comparativement au secteur conventionnel, «l’implantation des banques participatives ne représente guère les 3%. Il va sans dire que ces dernières devraient maintenir, pendant encore un certain temps, leur effort de création d’agences si elles veulent assumer pleinement la mission d’inclusion financière qui leur est dévolue».
Cependant, sur le volet productivité par agence, beaucoup reste à faire. Par rapport aux données de l’exercice 2021, ces établissements réalisent une productivité «Financements» de 96 millions de DH et «Dépôts» de 34 millions, contre une productivité de 165 et 172 millions de DH pour les banques conventionnelles.
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