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Conseils des préfectures et des provinces : les attributions et les moyens à renforcer

Le chantier de la régionalisation avancé est en marche. Mais à l’épreuve de la pratique, des lacunes se font jour, nécessitant des réajustements. Le cas des conseils des préfectures et des provinces est significatif à cet égard. Après le bouclage d’un premier mandat dans le cadre de la loi 112-14, ces collectivités territoriales sont confrontées à des difficultés en relation notamment avec l’imprécision de leurs attributions et le manque de moyens. Une conférence organisée mercredi à la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Rabat a jeté une lumière crue sur cette problématique.

Cinq années après la promulgation de la loi organique 112-14 relative aux conseils des préfectures et des provinces, nombre de problématiques opérationnelles ont fait surface à travers la pratique sur le terrain. En effet, outre l’existence de certaines lacunes juridiques, les instances dirigeantes de ces collectivités territoriales sont confrontées à d’autres contraintes, notamment le chevauchement des compétences et la non-convergence entre les politiques publiques et les programmes locaux, surtout dans le domaine social. «Certaines prérogatives des Conseils des préfectures et des provinces sont également prises en charge par le gouvernement ou s’inscrivent dans le cadre d’initiatives lancées par la société civile, comme le transport scolaire ou encore l’aménagement des routes dans les zones rurales. Même l’Initiative nationale pour le développement humain finance ce genre de projets», souligne Jawad Nouhi, professeur universitaire à l’Université Mohammed V de Rabat, lors d’une conférence organisée mercredi au sein de la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Rabat à l’initiative de l’Association marocaine des présidents des conseils des préfectures et des provinces.

En effet, bien que la loi organique ait renforcé les prérogatives de ces conseils et les ait dotés de pouvoirs accrus en leur conférant le statut d’ordonnateur des dépenses et des recettes, ce qui a permis de renforcer la démocratie participative, comme le souligne Khalid Safir, wali directeur général des collectivités territoriales, dans une allocution lue en son nom par le gouverneur Mohammed Jabri, la pratique a démontré l’existence de certaines difficultés, dont certaines sont partagées entre les trois collectivités territoriales (régions, préfectures et provinces et communes), tandis que d’autres concernent particulièrement les conseils des préfectures et des provinces. «Les préfectures et les provinces ont pu s’imposer comme un acteur reconnu, de proximité, vecteur de stabilité. Mais dans une organisation territoriale en perpétuelle évolution, elles ont longtemps présenté une image institutionnelle “brouillée”, jouissant à la fois de statut de collectivité territoriale (CT) et constituant dans les faits un échelon de régulation et de commandement de l’administration territoriale, d’une part, et leurs compétences marquées par des imprécisions, voire de chevauchements avec les autres niveaux de CT, d’autre part», nous explique Hassane El Arafi, professeur à l’Université Mohammed V de Rabat. Selon cet expert des collectivités territoriales, les manifestations de cette situation peuvent être ressenties à travers plusieurs insuffisances. Premièrement, soulève le même professeur, en dépit du rôle qui leur est dévolu de «mutualisation territoriale» pour appuyer l’intercommunalité, la mission de ces structures reste une notion malaisée à circonscrire et constamment soumise à des interprétations instables en fonction du contexte.

Deuxièmement, les compétences propres aux préfectures et provinces ne sont pas, à vrai dire, des compétences exclusives, mais sont souvent exercées en partenariat avec les autres collectivités territoriales (communes et régions), au point de réduire le rôle des provinces et préfectures à celui de simples concours financiers infra-régionaux. Troisièmement, l’exercice des compétences partagées reste conditionné par l’initiative de l’État, en faisant des provinces et préfectures tantôt des contributeurs financiers et tantôt des meneurs de projets territoriaux. Quatrièmement, les compétences transférables restent «brouillées» en l’absence d’un cadrage juridique des mécanismes de «subsidiarité», dont le sens demeure non vulgarisé auprès des élus. Cinquièmement, l’ascension de l’intercommunalité est susceptible de faire disparaître progressivement l’échelon préfectoral et/ou provincial. À tous ces aléas, s’ajoute la problématique du manque de ressources financières. «Il existe un véritable problème lié aux ressources financières, ce qui entrave l’élaboration de plans de développement ambitieux, dans la mesure où il faut adapter les projets prévus en fonction du budget mobilisé par l’État et non le contraire», explique Hamza Id Moussa, président du conseil provincial d’El Haouz, dans une déclaration accordée au «Matin» en marge de cet événement.

Le budget limité accordé aux conseils des préfectures et des provinces laisse en effet peu de marge de manœuvre pour une administration libre des projets, surtout lorsqu’on sait que les principales rentrées de ces conseils sont composées essentiellement des taxes sur le permis de conduire, celles sur la visite technique et la TVA sur les permis de chasse. «Le budget alloué est accordé en fonction de la taille de la population et du territoire, mais en général, le budget est dérisoire», ajoute le même responsable. Outre le problème du budget, une autre contrainte est relevée. Elle concerne la qualification des fonctionnaires. En effet, l’expérience a montré que ces salariés peinent à suivre l’évolution en se mettant à niveau. D’où la nécessité de prévoir des formations continues afin de leur permettre d'être au diapason des nouvelles exigences attendues de ces conseils.

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