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Mères célibataires : l'association Insaf appelle à réviser les lois

L’association Insaf a organisé, ce jeudi 3 novembre à Casablanca, un séminaire sur le thème «Mères célibataires, entre l’ambition de l’État de droit et la Réforme escomptée». Cette rencontre a été l’occasion d’appeler à adapter les textes de loi aux conventions internationales adoptées par le Maroc afin de faire valoir les droits des mères célibataires et leurs enfants qui sont toujours obligés de faire face au regard dur de la société.

Mères célibataires : l'association Insaf appelle à réviser les lois
Ph. Sradni

Malgré quelques progrès réalisés par le législateur marocain, les mères célibataires, généralement jeunes, voire mineures, continuent de subir l’exclusion familiale, sociale, économique et toutes formes de discrimination. C’est le constat qu’a fait l’association Insaf lors de son séminaire sur «Les mères célibataires, entre l’ambition de l’État de droit et la Réforme escomptée», qui s’est tenu ce jeudi 3 novembre à Casablanca. Organisé en partenariat avec l'ONG suisse CFD, cette rencontre a été l’occasion de rappeler une nouvelle fois le quotidien tragique des mères célibataires malgré plusieurs années de combat. «Nous devons saluer les grands progrès qui ont été réalisés par le législateur marocain. Actuellement, on ne peut plus distinguer un enfant légitimement conçu d’un enfant né hors mariage.

Le deux ont le même dossier avec un nom du père et du grand-père même s’il est fictif dans le cas d’une mère célibataire. Toutefois, il reste encore beaucoup de progrès à faire notamment en ce qui concerne le livret de famille qui n’est toujours pas remis à la mère célibataire. Suite au dernier discours de Sa Majesté, l’espoir de voir disparaître les nombreuses injustices existantes encore renaît», a souligné Meriem Othmani, présidente de l'association Insaf, dans une allocution lue en son nom à l’ouverture du séminaire. Et d’ajouter que «si les textes sont là pour protéger les femmes, il existe un mal qui est loin d’être soigné. C’est le regard de mépris qu’une grande partie de la société porte sur la mère célibataire. Elles sont obligées d’affronter chaque jour des personnes qui vont les juger sans appel et leur infliger leur agressivité. La société ne leur pardonne pas leur état, les chasse et les rejette sans aucune pitié».

Les participants à cette rencontre ont rappelé, en outre, que le Maroc a adhéré quasiment à tous les instruments internationaux de protection des droits de l’Homme, des femmes, des enfants… tels que le CEDAW (Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes) qui appelle à résoudre la problématique des mères célibataires et à faire valoir leurs droits et ceux de leurs enfants sans crainte d'aucune forme de poursuite et de stigmatisation. Ils ont également souligné que le nouveau modèle de développement (NMD) a appelé à faire avancer le débat sur le statut social des mères célibataires et assurer la responsabilité du père lors d’une naissance en dehors du cadre du mariage notamment grâce aux technologies et au test ADN. Il s’agit d’ailleurs d’une démarche qui sera appliquée prochainement, comme annoncé par le ministre de la Justice, Abdellatif Ouhabi, mardi dernier.

Questions à la présidente de l'association Insaf

Meriem Othmani : «Une existence légale des mères célibataires contribuerait à leur rendre leur dignité»

Comment pouvez-vous nous décrire le quotidien des mères célibataires au Maroc en 2022, et quelles sont les difficultés auxquelles elles se heurtent toujours malgré plusieurs années de combat ?

Une des principales difficultés que vivent les mères célibataires au quotidien, c’est le rejet et le mépris de la société. Ce sont très souvent des victimes et elles sont traitées comme si elles étaient coupables. Elles sont condamnées d’avance et on les enferme au ban de la société dans des ghettos ou la compassion n’existe pas. Grâce à l’appui de toutes les associations, la législation leur a donné des droits certes, mais nous devons continuer à lutter pour qu’elles aient le droit d'obtenir un livret de famille et que les tests ADN soient reconnus pour les aider à prouver la paternité de leur bébé.

Il faut aussi que la procédure les obligeant à aller au commissariat et au tribunal pour enregistrer l’abandon de leur bébé soit modifiée pour qu’elles puissent laisser bébé à l’hôpital au moins au lieu de l’abandonner dans la rue. Nous militons aussi pour que le statut de mères célibataires soit reconnu ou celui de famille mono-parentale. On parle souvent de femmes mariées, de femmes divorcées, de femmes veuves ou de femmes non mariées, mais pas de mères célibataires. Ces dernières doivent aussi avoir droit aux aides prévues par l'État comme les femmes veuves qui bénéficient d’une dotation. Leur existence légale contribuerait à leur rendre leur dignité.

Quels sont les principaux textes de loi qui portent préjudice aux mères célibataires ?
La loi qui les pénalise le plus c’est l’article 490 qui punit de prison toute relation hors mariage. Toutes les mères célibataires connaissent cette loi et toutes sont persuadées qu’elles vont aller en prison si elles se dénoncent au commissariat. Pour toutes celles qui ne veulent pas de leur bébé, elles souhaiteraient le confier à une gentille famille pour qu’il soit heureux, mais pour cela il faut qu’elles passent par le commissariat et elles ne peuvent pas par crainte d’être emprisonné et par crainte aussi que ses parents soient prévenus.
Malheureusement, plusieurs choisissent de laisser leur bébé fragile dans la rue seul et à la merci de tous les dangers. C’est un drame qui les hantera toute leur vie.

Quelles sont les actions de Insaf pour soutenir ces femmes et leurs enfants et les aider à réussir leur vie ?
Depuis plus de 22 ans, Insaf s’évertue à offrir à ces mères célibataires une vie meilleure. Des psychologues les reconstruisent. Des assistantes sociales résolvent leur problème de papier d’identité pour elle et pour leur bébé. Elles tentent de les réintégrer dans leur famille quand cela est possible ou de retrouver le père. Des animatrices les aident à s'adonner à des activités récréatives. Elles sont formées à l’apprentissage de leurs droits et devoirs. Des formatrices leur apprennent un métier.
Puis Insaf et ses partenaires leur offrent une mallette complète pour leur permettre d’exercer le métier qu’elles ont appris. Elles vont pouvoir vivre dignement en gagnant leur vie. D’autres bénéficiaires sont placées dans des entreprises avec des contrats en règle et bénéfices des prestations de la CNSS. Insaf garde le contact avec elles pendant longtemps si elles le souhaitent.

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