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Don d’organes: le Maroc compte 34.000 patients sous dialyse qui espèrent être transplantés (Pr Amal Bourquia)

Nous célébrons ce lundi 17 octobre la Journée mondiale du don d'organes et de la greffe. La célébration de cette Journée mondiale permettra de sensibiliser davantage à cet acte de générosité et de solidarité qui sauve des vies, d’autant plus que le Maroc accuse toujours un énorme retard dans ce domaine. Pourquoi avons-nous si peu de donneurs ? Que peut-on faire pour promouvoir le don d’organes au Maroc ? Réponses avec Pr Amal Bourquia, néphrologue et présidente de l’association «Reins».

Don d’organes: le Maroc compte 34.000 patients sous dialyse qui espèrent être transplantés (Pr Amal Bourquia)
don d'organes

Pr Amal Bourquia : Après plusieurs années de combat, est-ce qu’on peut dire aujourd’hui que le don d’organes commence à se développer au Maroc ?
Le Matin
: Malheureusement non, le Maroc accuse toujours un grand retard, en matière de transplantation d'organes, en général, et rénale, en particulier. Chaque jour, des hommes, des femmes et des enfants meurent parce qu’ils n’ont pas pu être transplantés au moment opportun... Pour parler chiffres, le Maroc compte actuellement près de 34.000 patients sous dialyse qui espèrent être transplantés, pour soulager leur souffrance et améliorer la qualité de leur vie. Une simple analyse des chiffres actuels, 610 transplantations rénales depuis 36 ans et près de 1.200 donneurs potentiels inscrits sur le registre du don, permet de noter qu’ils ne traduisent ni le niveau médical du Maroc ni la générosité des Marocains avec un besoin sans cesse en augmentation.

Selon vous, qu'est-ce qui bloque ?
L’analyse de toute l’activité de greffe et de tous les acteurs supposés intervenir dans sa progression montre qu’il n’y a pas vraiment d’efforts consentis pour offrir aux Marocains ce traitement. Et ce pour de nombreuses raisons. En effet, plusieurs problèmes limitent l’accès à la transplantation, dont l’insuffisance de fonds alloués, le manque d’informations et la faible sensibilisation. Sans parler de l’épineux problème de la perception avec de nombreuses fausses informations et une grande place des rumeurs qui bloquent beaucoup de nos concitoyens.

Est-ce que vous pensez que l’État s’investit assez pour la promotion du don d’organes ?
Pas vraiment. Non ! Mais allons-nous rester dans cette situation et ignorer les Marocains qui en ont besoin ou allons-nous travailler sur des actions de promotion du don et de la transplantation d’organes ? Une réflexion nationale, avec l’implication de tous les acteurs, s’avère nécessaire pour optimiser les dépenses et tracer une stratégie pour le futur où l’on verrait la transplantation rénale comme une thérapeutique pour sauver des vies.

Quelles sont les mesures qui doivent être prises pour promouvoir le don d’organes au Maroc ?
Les mesures qui doivent être prises sont nombreuses, à différents niveaux et dans différents secteurs. Par exemple, «Reins» a toujours organisé de grandes campagnes de sensibilisation et d’information au don et la transplantation d’organes à travers tous ses réseaux sociaux. Nous nous fixons toujours comme objectif la motivation des citoyens pour le don afin d’aider à l’essor de cette pratique thérapeutique. La mobilisation et le soutien de toutes les composantes de la société marocaine, en particulier les professionnels de la santé et les médias, sont de nature à contribuer à ancrer la culture de don chez les citoyens marocains. Notre association demande depuis des années de modifier la loi afin que nous soyons tous des donneurs sauf ceux qui s’inscriraient sur le registre du refus. À l’instar d’autres pays, cette procédure pourrait favoriser le développement du don d’organes après le décès en permettant au moins une disponibilité d’organes.

Certaines personnes sont réticentes, car elles ont peur des conséquences sur leur santé, lorsqu’il s’agit du don de rein par exemple. D’autres encore craignent de tomber dans un réseau de trafic d’organes… Comment les rassurer ?
Pour le don de rein de son vivant, l’équipe s’assure toujours du bon fonctionnement du rein, mais aussi de l’organisme afin de protéger le donneur de tout risque futur. Et les différentes études ont montré qu’il n’y avait pas de problème particulier chez les donneurs vivant avec un seul rein même après de nombreuses années, au contraire ils sont en bonne santé. Au Maroc, le don et la transplantation d’organes humains sont gérés par des textes de loi publiés dans le Bulletin officiel (loi n° 16-98 relative au don, au prélèvement et à la transplantation). Ces textes régissent aussi bien le don à partir du sujet vivant que le donneur en état de mort encéphalique. Aucun commerce d’organes n'existe dans notre pays. La loi est très sévère vis-à-vis des dérapages avec de très lourdes sanctions.

Vous avez publié récemment un nouvel ouvrage sur le don d’organes. Quels sont les principaux axes de ce livre et quel message souhaitez-vous transmettre aux Marocains ?
Dans ce nouvel ouvrage, je fais le point sur la situation du don et de la transplantation d’organes au Maroc et traite la transplantation sur tous les aspects, humains, législatifs, religieux, sociaux et économiques. Cet ouvrage met en évidence les éléments qui peuvent influencer l’acceptation ou le refus du don telles que les croyances, les convictions et la perception de la mort, ainsi que les valeurs éthiques qui doivent guider cette thérapeutique. Il est aussi important d’insister sur le besoin urgent de développer la transplantation d’organes, en générale, et rénale, en particulier, et de discuter des différents moyens à mettre en œuvre et à développer pour l’essor de ce moyen thérapeutique. Un livre pratique et didactique qui traite de la réalité et des perspectives de la maladie rénale chronique, ce fléau de XXIe siècle, et les possibilités d’atténuer ses conséquences. Par cet ouvrage, je voudrais mettre l’accent aussi sur les espoirs pour la réduction de la maladie rénale et également pour le développement de la transplantation rénale à court, moyen et long terme.

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