Le Maroc entre dans un cycle épidémique à cause du nombre de sous-variants de l’omicron qui émergent, notamment le BA4 et le BA5, qui circulent beaucoup plus vite dans un contexte où les mesures barrières ne sont plus respectées et où l’immunité vaccinale est en train de baisser. À cela s’ajoute le contexte de la saison estivale et le retour en force des rassemblements qui favorise la circulation du virus. «Cette augmentation des cas, partout dans le monde, n’est pas plus grave ni dangereuse que les précédentes vagues de la Covid que nous avons subi depuis le début de la pandémie. Toutefois, il ne faut pas baisser la garde», prévient Pr Heikel, invité de «L’Info en Face». En effet, la vigilance doit doubler parce qu’il va s’agir d’un sous-variant qui circule plus vite et qui peut être grave chez les personnes à risque.
«Il est grand temps d’apprendre à vivre avec ce virus et d’autres d’ailleurs. Le monde assiste, et assistera, à l’émergence d’autres virus avec le temps, il n’est plus concevable de vivre confiné tout le temps, il faut gérer, communiquer et maintenir la vigilance», réaffirme le spécialiste en maladies infectieuses et professeur d'épidémiologie. Mais pourquoi surveiller ce sous-variant BA5 qui circule aujourd’hui au Maroc à hauteur de 72% ? «On le surveille particulièrement au niveau des études génomiques, car il a cette caractéristique d’échappée immunitaire.
C’est-à-dire que les personnes, notamment à risque, sont moins protégées par le vaccin ou l’infection en comparaison à d’autres sous-variants», explique le professionnel. Et de préciser que cela ne veut pas dire que les vaccins utilisés aujourd’hui ne sont pas efficaces, mais il y a des facteurs qui font que leur efficacité baisse. Il cite dans ce sens trois niveaux : celui de transmission, des symptômes et le développement de risques graves chez les personnes âgées ou vulnérables. «Il faut être honnête intellectuellement et scientifiquement et dire que l’octroi des doses de vaccins ou les rappels ne peuvent pas empêcher la transmission du virus ou empêcher les symptômes. Par contre, cela permet de réduire les risques de développement de formes graves de la maladie et donc les hospitalisations», indique Pr Heikel. Les vaccins, qui à la base n’était pas conçus pour lutter contre ces nouveaux variants, permet de réduire la gravité des cas et non la transmission du virus ou les symptômes, réaffirme l’expert. Dans une dynamique microbienne comme celle que les scientifiques identifient actuellement, et dont l’humain est l'acteur principal en raison des agressions multiples de l’environnement, il est primordial de s’adapter. Cette dynamique crée parfois des états stables marqués par une certaine harmonie entre les écosystèmes, mais dans d’autres cas, des incidents peuvent survenir à cause d’une certaine disharmonie entre ces écosystèmes.
C’est là où l’on voit par exemple l’émergence de certains virus improbables», explique Pr Heikel. C’est dans ce sens d’ailleurs que le scientifique s’attend à une rentrée encore perturbée d’où l’urgence de continuer à préparer notre système de santé à de nouvelles vagues pandémiques, voire de nouvelles situations épidémiologiques dans l’avenir. Ce constat amène notre invité à rappeler la gestion efficace que le Maroc a assurée depuis le début de la pandémie tout en travaillant sur la réforme du système de santé national. Il note toutefois l’importance de communiquer davantage avec la population pour éviter la circulation d’informations erronées, rassurer et expliquer.
Cette approche est cruciale pour ne pas avoir à gérer des situations de panique, insiste Pr Heikel qui rappelle que ce manque de communication avait eu un impact négatif sur la population lors de la gestion de la troisième dose. «Par manque de communication, nous n’avons pas pu convaincre un large public de recourir à la dose de rappel du vaccin, un déficit qui continue d’ailleurs jusqu’à aujourd’hui», regrette l’invité. Interrogé sur l’utilité de maintenir l’urgence sanitaire, le spécialiste affirme que les données scientifiques disponibles actuellement sont rassurantes, mais ne peuvent expliquer, à elles seules, la persistance de cette situation. «Je ne peux pas confirmer dans l’absolu que l’urgence sanitaire n’a plus lieu d’être, mais, selon les données scientifiques dont nous disposons, et compte tenu des avancées réalisées par le Maroc dans sa lutte contre la pandémie, je peux dire que le maintien de l’urgence sanitaire n’a plus lieu de persister», explique le spécialiste.