Les militants et associations de protection de l’environnement de Kénitra n’ont eu de cesse de tirer la sonnette d’alarme afin d’attirer l’attention des départements concernés sur la détérioration de la réserve naturelle de Sidi Boughaba. On constate, tout d’abord, au niveau du lac, un phénomène d’eutrophisation caractérisé par un déséquilibre du milieu aquatique provoqué par l'augmentation de la concentration d’azote et de phosphore dans le milieu. Cette forte concentration entraîne une croissance excessive des plantes et des algues due à la forte disponibilité des nutriments. Selon Abdelmajid Saligane, président de l’Association du Gharb pour la protection de l’environnement (AGPE), le phénomène d’eutrophisation est accentué par la présence des déchets solides aux abords du lac de Sidi Boughaba générés par les activités humaines. Des rejets, précise-t-il, qui favorisent la multiplication des bactéries et autres micro-organismes ayant un impact négatif sur l’équilibre écologique.
Tout en saluant les efforts déployés par les départements concernés en vue de limiter les dégâts, le président de l’AGPE n’a pas manqué d’émettre le souhait de renforcer davantage les mesures de contrôle et d’appliquer de manière rigoureuse les règlements et lois en vigueur, afin de mettre fin, à ce qu’il appelle, d’actes d’agression continus contre la nature. D’un autre côté, la réserve naturelle de Sidi Boughaba a longtemps résisté aux aléas climatiques. Cependant, son équilibre écologique est menacé par l’avancée du béton. Ce site écologique commence déjà à être assiégé par des propriétés privées et autres édifices publics.
La sauvegarde de ce site naturel est une responsabilité collective. Par ailleurs, la réserve naturelle de Sidi Boughaba constitue l’une des destinations privilégiées des habitants de Kénitra et des villes environnantes. Situé à quelques encablures de la forêt de la Maâmora et à un kilomètre de la côte atlantique, tout près de la plage de Mehdia, ce milieu naturel est considéré comme l’un des plus beaux sites naturels du pays. La particularité de ce site naturel réside dans sa situation géographique, sur l'axe migratoire paléarctique Europe-Afrique subsaharienne, constituant ainsi une aire de repos et de nourrissage des oiseaux y transitant où y hivernant. Compte tenu de son importance écologique, la réserve naturelle de Sidi Boughaba a été déclarée site naturel et culturel en 1951 par arrêté du ministère des Affaires culturelles (Direction des monuments historiques et sites). Elle a aussi été reconnue comme une zone d'importance internationale pour les oiseaux d'eau par le Bureau international de recherches sur les oiseaux d’eau et les zones humides en 1964.
Elle est en outre considérée comme «réserve biologique» depuis 1974 par l'Administration des eaux et forêts et de la conservation des sols, et inscrite, en 1980, sur la liste «Ramsar» relative aux zones humides d'importance internationale. En effet, sur le plan faunistique, le site de Sidi Boughaba constitue un important carrefour de migration, entre l'Europe et l'Afrique, d'oiseaux appelés à faire escale avant de transiter vers l'un des deux continents. L'avifaune de la réserve compte quelque 171 espèces, dont certaines deviennent de plus en plus rares, voire menacées d'extinction. C'est le cas de la sarcelle marbrée, de la foulque à crête ou du hibou du cap. La durée du séjour de la plupart des espèces d'oiseaux est plus longue en automne qu'au printemps. Leur effectif connaît une augmentation durant la période estivale et plus spécialement vers la fin du mois de juin. Durant cette période, on observe l'arrivée des premiers oiseaux non nicheurs tels la berge, l'avocette et divers chevaliers.