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Visite de Pedro Sanchez au Maroc : Rabat et Madrid se projettent dans l’avenir

Le Président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, se rendra en visite officielle au Maroc ce jeudi 7 avril. Ce déplacement est le premier du Chef du gouvernement espagnol au terme d'une crise sans précédent qui a éclaté au mois d'avril de l'année dernière entre les deux pays. Une crise qui relève désormais du passé après que M. Sanchez a adressé une lettre à S.M. le Roi Mohammed VI, dans laquelle il affirme que le Maroc et l'Espagne sont inextricablement liés par une histoire, une géographie, des intérêts et une amitié communs, et déclare que «l’Espagne considère que la proposition marocaine d’autonomie présentée en 2007 est la base la plus sérieuse, crédible et réaliste pour résoudre ce différend». Décidément, Rabat et Madrid sont déterminés à ériger leurs relations en partenariat stratégique qui soit un modèle de coopération Nord-Sud.

Visite de Pedro Sanchez au Maroc : Rabat et Madrid se projettent dans l’avenir

Les relations entre Rabat et Madrid reprennent leurs droits, et sont même promises à un bel avenir. Le ministère de la Maison Royale, du Protocole et de la Chancellerie avait en effet annoncé mardi que sur invitation de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Son Excellence Monsieur Pedro Sanchez, Président du gouvernement espagnol, effectuera une visite au Royaume du Maroc, jeudi 7 avril 2022. Le chef de la diplomatie espagnole, José Manuel Albares, dans une déclaration relayée par l’AFP, a affirmé que «le Chef du gouvernement se rendra jeudi après-midi au Maroc (...) où il s'entretiendra avec le Roi du Maroc», ajoutant qu’«il (M. Sanchez) participera ensuite au côté du Roi du Maroc à la rupture du jeûne en ce mois du Ramadan, ce qui est un signe d'amitié très fort de la part de Mohammed VI». M. Albares a indiqué, toujours selon l’AFP, qu’il participera à cette visite qui se prolongera vendredi.

Pour le journaliste spécialiste des relations hispano-marocaines, auteur du livre «La vecindad cautelosa» (le voisinage prudent), Nabil Driouch, «cette visite de M. Pedro Sanchez vient illustrer la réconciliation au plus haut niveau entre le Maroc et l'Espagne et marque officiellement le début d'une nouvelle étape dans les relations bilatérales entre Rabat et Madrid, comme annoncé par S.M. le Roi dans Son discours du 20 août dernier». «Ce déplacement du Président du gouvernement espagnol revêt également une dimension symbolique, dans la mesure où il intervient durant le mois sacré du Ramadan et qu'à cette occasion, le Souverain offrira un Iftar en l'honneur de Son illustre hôte, ce qui témoigne de toute la place qui lui est désormais réservée», ajoute M. Driouch.

Un partenariat économique à consolider

Cette nouvelle page qui s'ouvre dans les relations maroco-espagnoles, à la suite du soutien de Madrid au plan d'autonomie, présenté par le Maroc pour résoudre le conflit artificiel autour du Sahara, sera marquée par l'intensification de la coopération dans différents domaines, a soutenu ce spécialiste des relations hispano-marocaines, affirmant que l'économie sera la locomotive qui tirera vers le haut cette coopération dans un futur proche. Et de rappeler que «l’Espagne est le premier partenaire économique du Royaume et elle est vouée à préserver et à consolider sa présence économique dans le Royaume, de même qu'à intensifier la coopération sur des questions vitales telles que la lutte contre l'immigration illégale ou le terrorisme, surtout à la lumière des menaces qui pèsent sur la région».

Les deux pays ont donc en commun un ensemble d'intérêts majeurs sur différents plans ainsi qu'une grande complémentarité, comme le souligne l'ancien ministre espagnol de l'Industrie, du tourisme et du commerce, Miguel Sebastian. «Le Maroc est un pays stratégique et important pour nous et pour tous les pays européens», a affirmé M. Sebastian dans une déclaration à l’agence MAP à la veille de cette visite de M. Sanchez au Maroc. «Le Maroc est notre porte vers le continent africain et l’Espagne est la porte d’entrée du Maroc vers l’Europe, d’où la nécessité de tirer profit de cette situation géostratégique pour aller de l’avant dans le partenariat économique et commercial», a-t-il expliqué.

Une reprise bénéfique pour toute la région

L'ancien président du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, a de son côté indiqué dans un entretien à la MAP que «la redynamisation des relations bilatérales est très importante pour l'Espagne, pour le Maroc, pour l'Afrique du Nord, pour le Maghreb et pour la communauté internationale, notamment dans la conjoncture actuelle». La relation Nord-Sud, incarnée par l'Espagne et le Maroc, est primordiale et il est important de faire en sorte que ces liens prennent le chemin de la consolidation, du renforcement, de l'amitié et de la coopération, comme il se doit entre les deux pays, a dit M. Zapatero.

Pour sa part, le professeur de droit et politologue, Mustapha Sehimi, a souligné dans un entretien accordé au «Matin» que «le changement historique de la position de l’Espagne à propos du Sahara marocain est une nouvelle donnée majeure (…). Le voisin ibérique affirme sa totale adhésion à des principes devant fonder l’avenir des relations bilatérales». «En appuyant désormais le Maroc sur la question nationale, Madrid a fait montre d’une appréhension bien comprise des intérêts supérieurs de l’État espagnol», a affirmé M. Sehimi.

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Des relations économiques en plein essor

En 2021, le Maroc a exporté pour environ 7,3 milliards d’euros vers l’Espagne, soit une hausse de 14,6% par rapport à l’année précédente, au moment où ses importations de ce pays ont atteint les 9,3 milliards d’euros. Ces chiffres dévoilés par l’ambassade d’Espagne à Rabat reflètent la qualité des relations économiques entre les deux pays, malgré un contexte fortement marqué par les impacts de la Covid-19. En effet, les échanges commerciaux entre Rabat et Madrid ont doublé au cours des dix dernières années, avec des taux de croissance supérieurs à 10% par an depuis 2011. Des résultats qui ont permis à l’Espagne d’occuper, depuis 8 ans, le rang du premier fournisseur et client du Maroc. La courbe des échanges commerciaux entre les deux pays est sur une tendance haussière depuis 2016 malgré le contexte économique. Affichant une légère baisse en 2020 avec des exportations vers l’Espagne qui ont atteint 6,37 milliards d’euros, contre 6,96 milliards d’euros une année auparavant. Les importations au cours de la même année se sont élevées à 7,35 milliards d’euros, contre 8,45 milliards d’euros en 2019.

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Une coopération sécuritaire exemplaire

La coopération judiciaire et sécuritaire entre Rabat et Madrid est exemplaire. En 2022, un rapport de l’Observatoire international d’études sur le terrorisme (OIET) est venu confirmer la solidité de cette coopération à toute épreuve. Mettant en exergue l’importance de l’aide anti-djihadiste du Maroc, l’observatoire basé en Espagne avait loué les «grands efforts» consentis, conjointement, par le Maroc et l’Espagne en matière de lutte contre le terrorisme. Selon le rapport, les deux Royaumes n’ont pas cessé de collaborer en matière de lutte contre le terrorisme. «La coopération antiterroriste entre l’Espagne et le Maroc est une réussite en soi, du fait qu’elle n’a pas été perturbée par les divergences entre les deux pays, mais au contraire, elle s’est renforcée par la mise en œuvre de plusieurs accords en l’objet», indique le rapport. Le rapport précise que la collaboration entre les deux pays est passée d’un simple partage de renseignements sur les cellules ou les individus extrémistes à la formation d’équipes conjointes et de groupes mixtes, composés de militaires espagnols et marocains.

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Les Mardis du PCNS

Larbi Jaïdi plaide pour une vision à long terme pour la préservation des relations maroco-espagnoles

Larbi Jaïdi, Senior Fellow au Policy Center for the New South (PCNS), a plaidé pour l'instauration des bases d’une vision à long terme pour la préservation des relations maroco-espagnoles, tout en tirant les enseignements du passé commun, notamment dans un contexte «très tendu». En dépit des tensions qu’ont connues les relations bilatérales, les deux pays voisins ont toujours réitéré leur engagement en faveur du bon voisinage, a relevé M. Jaïdi qui intervenait dans le cadre de l'émission hebdomadaire «les Mardis du PCNS» sous le thème de l’avenir des relations entre le Maroc et l'Espagne. La relation exceptionnelle entre les deux Royaumes par rapport à leur environnement régional les a amenés à faire preuve de sagesse et de sérénité, a-t-il estimé.

Le chercheur a aussi indiqué que les conflits territoriaux demeurent la grande problématique entre les deux pays, appelant à rompre avec ces conflits à travers le respect de l’intégrité territoriale du Royaume et à chercher des solutions aux problèmes territoriaux complexes. Il a, par ailleurs, salué l’audace de la direction politique en Espagne qui s'est traduite par la nouvelle position au sujet du Sahara marocain, qualifiant de «saut qualitatif» cette nouvelle position. Le chercheur a rappelé que l’Espagne soutenait avec pragmatisme, au sein de l’ONU, l'initiative marocaine, notant que les conflits territoriaux en suspens doivent être réglés dans le cadre d’une approche clairvoyante basée sur l’ouverture sur l’avenir, dans le respect des droits du Maroc, tout en prenant en considération les intérêts mutuels. M. Jaïdi a également affirmé que la gestion du dossier de la migration clandestine doit être axée sur une approche prospective, en prenant en considération les aspects socio-économiques, en instaurant l’équilibre dans le co-développement et en soutenant les mécanismes de contrôle des flux migratoires, tout en créant les opportunités de développement en Afrique et au Maroc.

La migration est une problématique au niveau de la gouvernance des relations bilatérales, a-t-il relevé, faisant observer que le dialogue entre les deux pays au sujet de la gestion de l'immigration clandestine a connu des développements importants et positifs depuis 2005-2006. M. Jaïdi a, à cet égard, souligné que la détermination du Maroc à limiter la migration clandestine et son engagement à respecter les conventions signées à ce sujet ont épargné à l’Espagne de grands problèmes, rappelant que le Royaume a assuré l’intégration socio-économique de plusieurs migrants africains. Évoquant les relations économiques bilatérales, le chercheur a précisé que l’économie est un facteur essentiel pour faire face aux chocs diplomatiques et politiques, faisant remarquer que l’Espagne demeure le premier partenaire du Maroc au sein de l’UE en termes d’échanges commerciaux.

Il a aussi rappelé que les échanges commerciaux bilatéraux augmentent de 10% annuellement, de même que plus de 1.000 sociétés espagnoles opérant dans divers secteurs sont implantées au Maroc, appelant à la consolidation des liens entre les économies marocaine et espagnole et à promouvoir les investissements conjoints, d’autant plus que le Royaume constitue la porte d’entrée de l’Espagne vers l’Afrique. Au volet culturel, M. Jaïdi a indiqué que les relations bilatérales ne peuvent englober tous les champs à l’avenir sans la prise en considération des rapports humains et la mobilité, insistant sur l’importance d’associer la société civile en tant que mécanisme fondamental pour accompagner les relations officielles. Le Maroc a veillé à promouvoir la langue espagnole, de même qu’il œuvre à assurer une présence remarquable de la langue arabe en Espagne pour faire face aux stéréotypes, a-t-il poursuivi, plaidant pour la promotion de la coopération entre les institutions culturelles des deux pays.

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