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«Aficionado» : Quand le Flamenco embrasse la musique maure

Le dernier album du luthiste virtuose Alaa Zouiten est un hommage à la musique flamenco et marocaine. «Aficionado : Flamenco moro» est l’exemple même de la trans-culturalité, chère au musicologue.

«Aficionado» : Quand le Flamenco embrasse la musique maure
Alaa Zouiten.

Dans l'épicentre du quartier mythique de Sacromonte, Alaa Zouiten effectue plusieurs séjours depuis 2015. Là, face à la silhouette majestueuse de l'Alhambra, l’artiste s’écharne à apprendre cette musique qu’il chérit tant, dans son berceau à Grenade. Mais son but n’est pas de réaliser un énième album flamenco. Car si l’artiste a été happé par la musique du maître Paco de Lucia, c’est parce qu’il a ressenti, dans sa chair, les mêmes vibrations que lui procure la musique marocaine. Ainsi, son intention est de réaliser un album où le flamenco rencontre la musique marocaine. C’est dans ce décor féérique que naissent alors les différents morceaux de l'album «Aficionado», une œuvre musicale enchanteresse qui rivalise de talent avec les plus grandes compositions contemporaines.

La récente sortie de l'album «Aficionado» sur les plateformes de streaming telles que Deezer, Apple Music et Spotify marque une première étape dans le parcours d'Alaa Zouiten. Composé de six morceaux qui transportent les auditeurs dans un voyage transculturel sonore, cet album compte encore deux derniers morceaux, qui feront leur entrée à l'automne, juste avant le lancement des éditions CD et vinyle.

Une création multiple

Le processus de création de «Aficionado» a été un véritable périple musical, guidé par Alaa Zouiten lui-même. Fort de son talent et de sa réputation, Alaa Zouiten n’a eu aucun mal à rassembler autour de lui, une pléiade de talents. Ses collaborations avec des artistes de renommée ont ajouté des couleurs uniques à l'album. Le percussionniste international Rhani Krija, qui a partagé la scène avec des légendes comme Sting, Prince et Omar Sosa, a apporté cette touche distinctive à l'ensemble. «C’était ce côté marocain que je recherchais dès le début du processus créatif», nous explique Alaa Zouiten.

Les talents de la danseuse Sara Sanchez et de la voix iconique du flamenco, Maria del Tango, ont également ajouté des dimensions visuelles et vocales captivantes à l'album. De plus, la réalisation du rêve de Alaa de jouer avec le percussionniste de Paco de Lucía, El Piranha, s'est concrétisée avec l'enregistrement de trois morceaux. Et à l'horizon, un morceau en collaboration avec la chanteuse syrienne vivant à Vienne, Basma Jabr, promet d'enrichir davantage l'expérience musicale.
Seul morceau de l’album qui ne soit pas original, «“Abouab Fès” est une reprise du maestro Saïd Chraïbi à qui je voulais rendre hommage, en faisant le travail inverse, pour le rendre davantage andalou et contemporain. Car la tradition doit se renouveler pour perdurer», s’explique l’artiste.

Passerelles transculturelles

Le parcours d'Alaa Zouiten est une fusion en soi, reflétant son amour pour la musique et sa quête de trans-culturalité. Son talent et la maîtrise de son instrument ne trahissent absolument pas son passé de médecin en devenir, à la faculté de médecine de Marrakech. C’est que sa rencontre avec l’Oud a précédé ses choix d’études et a continué en parallèle. À la faculté, il crée son premier band «Chwiya chwiya Band», qui se joue des genres et des arrangements pour cultiver son unicité. Sa rencontre avec le leader de la fusion Mohamed Jbara lui ouvre la première voie sur le circuit professionnel. Il enregistre alors son premier album «Un oud fou», dans le style jazz arabo-andalou, avant de décider d’en finir avec la médecine et de compléter son parcours par une formation musicale poussée, en Allemagne.
Durant sa formation d’ethnomusicologue, Alaa Zouiten touche à tous les styles. Du flamenco au Rock progressif en passant par le Reggae, Blues, la musique baroque, médiévale et classique, sans oublier le Gharnati, Gnaoua ou Aïta, qu’il manie avec une approche moderne.

C’est cette soif de mélanger les genres qui lui inspire son travail ultérieur. «La trans-culturalité dépasse l’inter-culturalité de l’art. Car la fusion s’évertue à préserver les genres, alors que la trans-culturalité les transfigure», explique l’artiste. Cette notion fait même l’objet de sa thèse, en tant qu’ethnomusicologue, à l’Université d’Erfurt.
En 2012, Alaa Zouiten sort son album «Hada Ma Kane», très franchement jazzy et mettant l’oud au cœur d’une création libre et innovante. En 2016, l’album «Talking Oud» voit le jour. Toujours largement marqué par le jazz, l’album rend hommage à l’instrument arabe, en mettant l’accent sur les sonorités nord-africaines. Le morceau Hilalia rend hommage à Salim Hilali qui lui aussi a inspiré le jeune artiste.

Avec l’album «Aficionado : Flamenco moro», Alaa Zouiten en finit avec le jazz pour plonger corps et âme dans l’univers du flamenco maure. Ce retour aux sons de son enfance, aux sources d’un héritage musical commun, lui procure bien plus de plaisir et de désir de créer. Dans sa musique actuelle, comme dans ses rêves les plus fous, Paco de Lucia rencontre Saïd Chraïbi pour des envolées symphoniques, des partitions de pur bonheur…

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