Menu
Search
Vendredi 27 Décembre 2024
S'abonner
close
Vendredi 27 Décembre 2024
Menu
Search

Bovins importés : entre infox, craintes et mauvaise foi... comment démêler le vrai du faux

Les bovins importés du Brésil pour approvisionner le marché national en viande rouge font polémique depuis quelques semaines. Des photos circulant sur internet et montrant des bêtes aux corps rabougris suscitent des interrogations chez de nombreux internautes, alors que certains vétérinaires expriment des inquiétudes quant à  l’état sanitaire des bêtes importées. Mais pour l'ONSSA et les professionnels, cette polémique n'a pas lieu d'être. Les bovins importés sont en bonne santé et leur viande est exempte de tout ce qui peut nuire au consommateur marocain.

Bovins importés : entre infox, craintes et mauvaise foi... comment démêler le vrai du faux

Sur les réseaux sociaux, les images des bovins importés du Brésil, ou présentés comme tels, font beaucoup jaser. L’allure des bêtes tout comme les conditions de leur admission donnent lieu à beaucoup de commentaires, craintes et incompréhensions légitimes, certes, mais pas toujours fondés. L’absence d’une communication claire et précise de la part des autorités compétentes a ajouté au désarroi des consommateurs et favorisé l’apparition de beaucoup d’infox. Les fausses informations ont concerné les photos des bovins, leur prix au kilo dans le monde et leurs conditions d’élevage.

Les photos des bovins importés postées sur les réseaux sociaux sont trompeuses

En ce qui concerne la véracité des photos circulant sur les réseaux sociaux où l'on voit des bovins aux corps chétifs, une source vétérinaire ayant requis l'anonymat nous indique que ces photos ne sont pas celles des bêtes importées. Au contraire, confirme cette source, tous les bovins importés à ce jour ont une apparence physique irréprochable, sont tous des mâles et pèsent plus de 550 kilos. Cette affirmation nous a été attestée par des photos et des vidéos que cette source nous a montrées de ces bovins logés dans une étable lazaret.

Néanmoins, poursuit notre source, ce qui peut susciter des inquiétudes, c'est bien le mode d'élevage pratiqué au Brésil. Dans ce pays, comme en Argentine et en Uruguay, également grands producteurs de viande bovine, l'utilisation massive d'hormones de croissance et d'antibiotiques, de farines animales, de céréales génétiquement modifiées (soja et maïs) est banalisée, fait remarquer cette source. Il est donc nécessaire, insiste-t-elle, de procéder à des analyses sur la viande après l'abattage pour s'assurer qu'elle est sans danger pour la santé du consommateur marocain. Ainsi, le fait que des farines animales servent à nourrir ces bêtes pose des problèmes éthiques : est-il permis de consommer leur viande ou non ? s’interroge notre source.

Les assurances de l’ONSSA quant aux bovins importés

Joint par «Le Matin» pour apporter son éclairage et répondre à ces interrogations, l'Office national de la sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) nous assure que ses services effectuent un contrôle sanitaire rigoureux et strict des bovins importés dans le but de garantir la santé des animaux importés sur le territoire national.

Ces contrôles interviennent à plusieurs étapes, allant du pays d'origine à l'arrivée des bovins importés sur le territoire national, nous précise-t-on. «Ainsi, au niveau du pays d’origine, le contrôle sanitaire des bovins destinés à l’export est assuré par l’autorité vétérinaire officielle, conformément aux exigences sanitaires précisées dans le modèle de certificat sanitaire vétérinaire en vigueur validé d’un commun accord entre les deux pays, y compris les analyses de laboratoires relatives à certaines maladies animales contagieuses», nous explique l’ONSSA. «Une fois arrivés sur le territoire national, les bovins importés sont soumis à deux types de contrôle par les services vétérinaires de l’ONSSA :

• D’abord, un contrôle à l’arrivée au niveau des postes d’inspection (les ports) qui concerne la vérification des documents accompagnant les animaux (certificats sanitaires, bulletins d’analyse, etc.).

• Et le contrôle physique afin de s’assurer de leur état sanitaire et de leur conformité par rapport aux documents les accompagnant.

Les bovins sont ensuite mis en quarantaine dans des lazarets agréés par l’ONSSA, et le contrôle de leur état sanitaire est assuré par un vétérinaire sanitaire mandaté sous la supervision du service vétérinaire provincial de l’Office. Aussi, des prélèvements sont réalisés sur le lot importé et analysés dans les laboratoires de l’ONSSA les plus proches, afin de s'assurer de l'absence de certaines maladies contagieuses chez ces bêtes», nous explique encore l’ONSSA.

Au terme de ces contrôles, seuls les bovins en bonne santé, indemnes de toute maladie contagieuse et répondant aux exigences sanitaires de l'ONSSA sont définitivement admis sur le territoire national, souligne l’Office, précisant que le Maroc exige de tout pays exportateur de bovins de remplir les conditions sanitaires requises vis-à-vis de certaines maladies animales et de disposer d'un statut sanitaire reconnu par l'Organisation mondiale de la santé animale.

Bovins importés : Les éleveurs rassurent aussi

De leur côté, les professionnels assurent également que les bovins importés du Brésil sont en bonne condition sanitaire. Le président de la Fédération marocaine des acteurs de la filière élevage (FMAFE), Mohamad Jabli, nous affirme que les premiers de ces bovins abattus dans les abattoirs de Casablanca ne posent aucun problème. «Qu'il s'agisse de leurs carcasses ou de leurs entrailles, nous n'avons décelé aucune anomalie visible», atteste le président de la FMAFE, ajoutant que l'ONSSA a également procédé à des prélèvements d'échantillons de viande afin d'effectuer les analyses requises.

Au sujet des inquiétudes relatives aux recours intensifs aux hormones de croissance et aux antibiotiques pour l'élevage de ces bêtes, M. Jabli répond que les pouvoirs publics brésiliens, sous la pression des importateurs et des consommateurs brésiliens, ont durci la législation sur l'alimentation et les médicaments pour bétail.

À une autre question relative à la possibilité d'indiquer l'origine de ces viandes au niveau des boucheries de proximité (comme c'est le cas dans certaines grandes surfaces), pour laisser au consommateur marocain le choix de les acheter ou non, M. Jabli répond que cette possibilité n'est pas disponible à l'heure actuelle, mais elle sera envisagée à l'avenir.

Pourquoi importer du bétail vivant et non simplement de la viande ?

Dans le sillage de cette polémique sur les bovins importés du Brésil, certaines voix ont fait valoir qu'il était plus judicieux d'importer tout simplement de la viande. À l'appui de cette position, on rappelle que les armées du monde entier s'approvisionnent en viande dans les pays d'Amérique latine. En réponse, une source au sein du ministère de l'Agriculture nous explique que l'objectif derrière l'importation de bovins vivants était non seulement d'approvisionner le marché en viande rouge, mais aussi de faire travailler toute la filière. À cela il faut ajouter le facteur du coût. Le prix du kilogramme de viande est bien plus élevé que celui du kilogramme vif, fait remarquer notre source.

Récupération politique du dossier des bovins importés

Dans la polémique qui enfle au sujet des bovins importés, il y a, estiment certains observateurs, une sacrée dose de mauvaise foi. Certains y voient même des règlements de comptes entre acteurs partisans. Pour preuve, ils avancent que beaucoup d’informations sont fausses et difficiles à vérifier et que certaines images circulant sur les réseaux sociaux sont tout bonnement trompeuses. Pour eux, «certains internautes cherchant le buzz et le sensationnel ont amplifié l’affaire, mais des parties ont surfé sur la vague en essayant de faire de la récupération politique». Entre les premiers et les seconds, il n’y a qu’un pas que beaucoup ont franchi intentionnellement et dans le but de décrédibiliser l’Exécutif. Tout en soulignant que l’opinion publique a le droit de se poser des questions et d’avoir des réponses à ses inquiétudes, ces observateurs déplorent le «déficit de communication des pouvoirs publics et leur mutisme qui a alimenté les craintes et favorisé les fake news».

Lire aussi : Viandes rouges : les importations de bovins vont s'accélérer pour réguler les prix

Lisez nos e-Papers