L’intelligence artificielle (IA) fait son entrée dans nos vies et celles des entreprises. Ses usages se multiplient de jour en jour portés par des solutions tout aussi innovantes les unes que les autres. La majorité de ces solutions sont l’œuvre de jeunes entrepreneurs qui osent franchir le pas. En plus de la hausse du nombre de startups spécialisées sur ce créneau, on note également l’engouement croissant des investisseurs en la matière. Certes, au Maroc on ne dispose pas de statistique ou de mapping des startups tech, mais de nombreux experts s’accordent à dire que leur nombre est en nette croissance. «Nos jeunes entrepreneurs sont friands de technologies digitales. On observe le développement de «startups tech» quotidiennement qui innovent en matière d’usage dans tous les domaines de la vie économique. Mais, on observe aussi l’engouement d’autres jeunes entrepreneurs moins tech à utiliser la technologie digitale dans le développement de leur business, comme le marketing digital qui prend une plus grande ampleur», indique Nasser Kettani, entrepreneur, membre du bureau de la Fédération des technologies de l’information, des télécommunications et de l’offshoring (Apebi).
Les domaines les plus ciblés par les jeunes entrepreneurs dans la technologie
Le premier domaine reste le e-commerce. Mais les startups marocaines se développent également ailleurs comme dans la santé (HealthTech), l’agriculture (AgriTech), la finance (FinTech), ou encore l’éducation (EdTech). Toutefois, comme le souligne M. Kettani, «le système réglementaire n’aide pas les startups dans ces secteurs qui subissent des réglementations très contraignantes. Nous devons absolument innover en matière réglementaire pour aider lever des barrières au développement de notre industrie tech».
À noter également la grande révolution provoquée par ChatGPT qui a révélé au monde à quel point l’IA va être la révolution technologique clé de ces prochaines années. Ainsi, les usages sont appelés à se démultiplier rapidement dans différents secteurs. Une belle opportunité pour les jeunes entrepreneurs qui travaillent dans ce domaine.La concurrence sera rude pour les startups dans l’intelligence artificielle
Le monde de l’intelligence artificielle impose une intense concurrence mondiale qui oblige à aller encore plus vite pour rester dans la course. Mais si les jeunes entrepreneurs ont des idées innovantes, il faut un écosystème agile qui va assurer l’aboutissement de ces projets dans les meilleures conditions et, surtout, délais. Pour Zakaria Fahim, entrepreneur IT & fondateur du Hub Innovation Nokturn, les entrepreneurs doivent porter la révolution IT made in Morocco. «Plus qu’un choix, c’est une nécessité ! Nous devons développer un système d’intelligence artificielle pour chaque industrie. La première raison est d’ordre sécuritaire. La data de notre industrie doit rester au Maroc. C’est une conviction pour moi», affirme-t-il.
Selon lui, l’écosystème entrepreneurial marocain a progressé. On parle aujourd’hui de pôles d’expertises : Agritech avec notamment l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), Fintech avec un certain nombre d’incubateurs installés surtout à Casablanca… Toutefois, quelques failles subsistent. «Je cite en particulier le système d’incubation qui de manière générale dure 6 mois avant d’arriver à l’étape de présentation du projet, la recherche du financement et son octroi qui souvent se fait sur des tranches. Ce processus pour un startupper est long et peu agile. C’est en contradiction justement avec l’agilité très sollicitée dans le domaine des IT. À cela s’ajoute le problème lié à l’accompagnement. À mon avis, il faut inclure une étape pré-accompagnement pour installer le mindset d’entrepreneurs et créer un pont entre cette passion d’un étudiant à créer son entreprise et le monde réel de l’entrepreneuriat avec le vrai esprit d’entreprendre», explique le jeune entrepreneur.
Même son de cloche chez Chaimae Baj, responsable Relations publiques chez Brando-Digital Marketing Agency, qui estime que les différents acteurs de cet écosystème entrepreneurial doivent communiquer entre eux pour faire avancer les choses vers davantage d’agilité.
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Nasser Kettani, entrepreneur, membre du bureau de l’Apebi et consultant en transformation digitale : Innover en matière réglementaire pour lever des barrières au développement de l’industrie Tech
E-commerce, HealthTech, AgriTech, FinTech, EdTech… les jeunes investissent le domaine de l’industrie numérique, mais restent bloqués par une réglementation assez rigide qui a grandement besoin d’être mise à jour. Nasser Kettani, entrepreneur, membre du bureau de l’Apebi et consultant en transformation digitale, appelle également au soutien à l’investissement et à la R&D pour accélérer le développement de solutions digitales marocaines prêtes à rivaliser avec le reste du monde.
Le Matin : Avec le grand succès de ChatGPT au niveau mondial, y a-t-il un engouement pour l’intelligence artificielle au sein de l’écosystème digital au Maroc ?Nasser Kettani : L’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) au sein de l’écosystème digital au Maroc n’a pas attendu chatGPT pour se mettre en route. Depuis plusieurs années, nous voyons l’utilisation de l’IA dans différents secteurs comme la finance ou encore le gouvernement, mais les plus friands restent les startups et des laboratoires de recherche, dans des domaines comme la santé ou encore l’agriculture. ChatGPT, GPT et les IA génératives plus généralement vont donner une nouvelle impulsion à cet engouement, car ils démocratisent l’accès à l’AI à une échelle jamais atteinte
auparavant.Qu’en est-il de l’appétence des jeunes entrepreneurs pour les solutions IT et robotique ?
Nos jeunes entrepreneurs sont friands de technologies digitales. On observe le développement de «startups tech» quotidiennement qui innovent en matière d’usage dans tous les domaines de la vie économique. Mais on observe aussi l’engouement d’autres jeunes entrepreneurs moins tech à utiliser la technologie digitale dans le développement de leur business, comme le marketing digital qui prend une plus grande ampleur.Quels sont les domaines les plus ciblés par les jeunes entrepreneurs ?
Clairement, le premier domaine reste le e-commerce. Mais les startups marocaines se développent dans tous les domaines d’activité en particulier la santé (HealthTech), l’agriculture (AgriTech), la finance (FinTech) et l’éducation (EdTech) qui restent les plus prometteurs. Mais notre système réglementaire n’aide pas les startups dans ces secteurs qui subissent des réglementations très contraignantes. Nous devons absolument innover en matière réglementaire pour aider lever des barrières au développement de notre industrie Tech.Les entreprises marocaines sont-elles intéressées par les solutions proposées par les startups locales ?
Malheureusement pas assez. Nous avons encore un très grand gap à combler dans ce domaine. D’un côté, beaucoup de nos startups locales doivent améliorer la qualité de leurs produits et services pour répondre aux exigences de nos entreprises. Mais de l’autre côté, nos entreprises privées et le gouvernement en particulier, doivent repenser leur mode d’acquisition de solutions technologiques qui est non seulement inadapté au monde technologique digital (on continue à acheter de la même manière un stylo, un pont et une solution digitale), mais qui ne fait pas la place qu’elle doit avoir à l’entreprise marocaine, trop souvent reléguée derrière l’entreprise internationale.Comment l’Apebi peut-elle booster le business IT et soutenir les jeunes entrepreneurs ?
La Fédération des technologies de l’information, des télécommunications et de l’offshoring (Apebi) est la place principale des producteurs et fournisseurs de technologies digitales au Maroc. Les startups constituent plus du tiers des adhérents actuels de l’Apebi, mais je pense que la Fédération doit faire davantage pour accueillir plus de startups. L’Apebi a une chance historique qu’elle doit saisir, travailler avec l’ensemble de l’écosystème digital au Maroc et même la CGEM, pour accompagner le développement de ce secteur, en faire le premier secteur économique dans notre pays. Plusieurs axes pourraient être visés en priorité. Pour ma part, j’en retiendrais 3 :1. La réglementation positive ou la déréglementation pour libérer les chaînes de l’innovation.2. L’accélération de la formation et le développement des compétences à très grande échelle.3. Le soutien à l’investissement et la Recherche & Développement (R&D) pour accélérer le développement de solution digitale marocaine prête à rivaliser avec le reste du monde.--------------------------------------------------------------------------------------------
Zakaria Fahim, entrepreneur IT & fondateur du Hub Innovation Nokturn : Les programmes d’incubation doivent intégrer des formations sur les technologies de pointe
Jeune entrepreneur passionné par la technologie, Zakaria Fahim a pu franchir des barrières en adoptant une approche d'auto-apprentissage et en cherchant des structures qui encouragent l'innovation et l'esprit d'entreprise chez les jeunes. Il a pu décrocher un poste de responsable de l'innovation et du business developer chez SGMG Startup pour la technologie des drones dans le domaine de la géomatique. Il devient, par la suite, mentor et coach ayant pour objectif de promouvoir la culture de l'innovation auprès des startups et des jeunes entrepreneurs. Il crée alors Nokturn, un hub d’innovation «dans le but d'engager et d'intégrer des profils marginalisés d'étudiants et d'individus non scientifiques dans le monde de l'entrepreneuriat». Il a été l’invité de «L’Info en Face» pour partager sa vision du développement des startups IT au Maroc.
Le Matin : Révolution IT, ChatGPT… qu'en pensez-vous ?Zakaria Fahim : La révolution de l’intelligence artificielle (IA) doit être comprise dans son sens large. La technologie ChatGPT n’est qu’un des axes développés dans ce cadre. À mon avis, il faut simplifier les concepts pour lever toute ambiguïté et dépasser la frustration qui peut subsister par rapport aux usages de l’IT. Il faut comprendre que si la technologie fait disparaître des emplois, elle en crée beaucoup d’autres que les jeunes peuvent occuper. Les secteurs et les usages sont très larges, l’important est de maîtriser la data, quel que soit sa nature, et les outils pour optimiser la valeur ajoutée. Je pense que le Maroc peut développer ses propres solutions IT pour répondre à ses besoins et notamment via les startups. Beaucoup de pistes s’offrent aux jeunes pour répondre aux besoins des industriels.
Les entrepreneurs peuvent-ils porter la révolution IT made in Morocco ?Plus qu’un choix, c’est une nécessité. Nous devons développer un système d’intelligence artificielle pour chaque industrie. La première raison est d’ordre sécuritaire. La data de notre industrie doit rester au Maroc. C’est une conviction pour moi. Dans le cadre de mon premier projet en tant qu’entrepreneur, j’utilisais des drones importés. Cela me mettait devant plusieurs contraintes : d’abord, je n’ai pas la possibilité d’optimiser les usages en fonction des besoins, puis, je ne pouvais pas optimiser la capacité des drones et, enfin, et c’est le plus important, une copie de la data que j’utilise est envoyée systématiquement au constructeur. Cela nous pose le problème de confidentialité que nous avons avec nos clients ainsi que le risque de toucher à la compétitivité de l’entreprise. Mais pour développer nos propres solutions IA, le Maroc doit d’abord s’équiper en infrastructure. À ce jour, nous ne disposons pas de Cloud marocain pour conserver notre propre data et en faire une vraie force pour dynamiser l’économie. Il faut qu’on arrive à la conviction que la data est primordiale et qu’elle peut transformer l’économie de tout un pays si elle est bien maîtrisée, gérée et utilisée.Quel regard portez-vous sur l’écosystème entrepreneurial digital au Maroc ?Notre écosystème est bien développé. On parle aujourd’hui de pôles d’expertises : Agritech avec notamment l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), Fintech avec un certain nombre d’incubateurs installés surtout à Casablanca… Toutefois, quelques failles subsistent dans cet écosystème. Je cite en particulier le système d’incubation qui de manière générale dure 6 mois avant d’arriver à l’étape de présentation du projet, la recherche du financement et son octroi qui souvent se fait sur des tranches. Ce processus pour un startupper est long et peu agile. C’est en contradiction justement avec l’agilité très sollicitée dans le domaine des IT. À cela s’ajoute le problème lié à l’accompagnement. À mon avis, il faut inclure une étape pré-accompagnement pour installer le mindset d’entrepreneurs et créer un pont entre cette passion d’un étudiant à créer son entreprise et le monde réel de l’entrepreneuriat avec le vrai esprit d’entreprendre.Comment peut-on aider les porteurs de projets à cibler la bonne technologie ?
À mon avis, c’est le rôle des incubateurs. Le jeune peut avoir une idée de projet pertinente, mais il n’a pas encore la maîtrise de la technologie adéquate pour développer sa solution. À mon avis, les programmes d’incubations doivent évoluer vers ça, c’est-à-dire donner aux jeunes entrepreneurs l’occasion, à travers des formations avec des experts, de choisir la technologie qui ne risque pas de mourir du jour au lendemain, comme ce qui est arrivé avec le metaverse. Il faut donc veiller à fournir des technologies scalables et les initier à la nécessité de surveiller l’évolution des technologies avec le temps pour développer leurs solutions et anticiper les changements.----------------------------------------------------------------------------------
Entretien avec Chaïmae Baj, responsable Relations publiques chez Brando-Digital Marketing Agency : Les investisseurs montrent un intérêt croissant pour les projets innovants dans l’IT
Le Matin : L’Intelligence artificielle révolutionne-t-elle le marketing digital ?Chaïmae Baj : L’Intelligence artificielle (IA) est en train de révolutionner le marketing digital en offrant de nouvelles opportunités pour les entreprises de mieux comprendre et interagir avec leur audience. Grâce à l’IA, les entreprises peuvent collecter et analyser des données en temps réel pour personnaliser les offres, prédire les comportements des consommateurs, automatiser les processus marketing et améliorer l’expérience de l’utilisateur. Ce qui ne revient pas souvent aux esprits, c’est l’aide que procure l’Intelligence artificielle aux designers et toute personne opérant dans une activité de teinte artistique. Dall-E et Mid Journey sont devenus des outils incontournables qui suggèrent et aident à la réalisation des logos, palettes, design de flyers...
En tant que jeunes entrepreneurs, comment mettez-vous l’IT au service de votre projet ?
Nous exploitons les avantages de l’IT au service de notre projet en utilisant les technologies de pointe pour améliorer nos produits et services, optimiser nos processus, améliorer l’expérience client et trouver de nouveaux moyens de se connecter avec notre public cible. Par exemple, nous utilisons les chatbots pour automatiser le service client, les réseaux sociaux pour construire une communauté autour de notre agence Brando et nous utilisons des outils de collaboration tels que Slack, Trello et Google Drive pour communiquer avec notre équipe et collaborer sur des projets en temps réel. Nous avons également adopté des solutions de Cloud computing pour stocker nos données et applications en ligne, ce qui nous permet d’accéder à nos fichiers et projets de n’importe où, à tout moment, tout en permettant une collaboration en temps réel entre nos équipes. Nous utilisons également des outils d’analyse de données pour mieux comprendre les besoins de nos clients et de leur public cible.L’écosystème entrepreneurial marocain est-il sensible à l’importance de booster les projets innovateurs dans le domaine de l’IT ?
Encouragé par une prise de conscience croissante, l’écosystème entrepreneurial marocain reconnaît de plus en plus l’importance de l’IT pour soutenir les projets innovants. Pour cette raison, le gouvernement marocain a mis en place une stratégie visant à encourager l’innovation et l’entrepreneuriat, en particulier dans le domaine de l’IT, avec la multiplication d’incubateurs et d’accélérateurs pour les jeunes entrepreneurs comme Emerging Business Factory à Marrakech, Smart Z à Casablanca et le Technopark de Tanger. Les investisseurs montrent un intérêt croissant pour les projets innovants dans l’IT, et les événements et les conférences dédiés à cette thématique sont de plus en plus nombreux. Le gouvernement marocain a mis en place des initiatives pour encourager la croissance de l’industrie de l’IT, comme la création de clusters technologiques et de zones d’activités dédiées et même des programmes d’accompagnement comme «Forsa». Cependant, le développement de l’écosystème entrepreneurial marocain dans le domaine de l’IT est encore en cours et il y a des défis à relever, notamment en termes d’accès au financement pour les projets innovants. En outre, pour favoriser l’émergence de projets encore plus innovants et ambitieux, il est essentiel de renforcer la collaboration entre les différents acteurs de l’écosystème entrepreneurial marocain.Quelle a été votre propre expérience dans ce sens ?
Nous avons eu une expérience très favorable en matière de soutien et d’accompagnement. Nous avons eu la chance de participer à des programmes d’accélération qui nous ont aidés à développer notre entreprise. En outre, nous avons bénéficié de programmes de financement tels que le programme «Forsa» pour soutenir notre croissance. À notre tour, nous avons également animé des formations sur le marketing digital dans des espaces d’incubation, afin de partager notre expertise avec d’autres jeunes entrepreneurs.Comment les grandes entreprises accueillent-elles vos solutions digitales ?
Brando a travaillé avec plusieurs grandes entreprises pour développer des solutions digitales personnalisées répondant à leurs besoins spécifiques. Dans l’ensemble, notre expérience avec les grandes entreprises a été positive et elles ont accueilli nos solutions digitales avec enthousiasme. Cependant, nous avons constaté que les grandes entreprises sont souvent confrontées à des défis importants lorsqu’il s’agit de l’adoption de nouvelles technologies et solutions digitales, et ce à cause des processus décisionnels qui peuvent être plus longs. En conséquence, il est souvent plus difficile de convaincre les parties prenantes de l’efficacité des nouvelles technologies. C’est pourquoi nous avons pris le temps de comprendre les besoins et les défis de chaque entreprise avec laquelle nous travaillons, afin de leur proposer des solutions digitales sur mesure alignées à leurs objectifs stratégiques et qui répondent à leurs besoins spécifiques.Nous avons également établi des relations de confiance avec nos clients pour comprendre leurs objectifs commerciaux à long terme et leur fournir des solutions adéquates. Nous programmons des formations pour faciliter l’adoption de nos solutions digitales et nous nous assurons toujours que ces dernières sont hautement personnalisées et répondent aux besoins uniques de chaque entreprise. Bien que les grandes entreprises puissent être plus lentes à adopter les nouvelles technologies, nous constatons que leur engagement est souvent un partenariat à long terme ce qui nous permet d’approfondir notre compréhension des besoins de nos clients et de continuer à innover pour augmenter la performance de nos solutions, tout en offrant une valeur ajoutée continue. Pour résumer nos dires, nous sommes convaincus que les grandes entreprises peuvent bénéficier grandement de l’adoption de nos solutions digitales pour faciliter l’atteinte de leurs
objectifs.Lire aussi : Agilité et digitalisation : la force des startups