Faut-il imputer aux industriels une partie de la responsabilité de l'inflation que subissent les ménages marocains ? De l'avis du vice-président de l’Association marocaine des exportateurs (Asmex) et président de la commission «Fiscalité» à la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), Hakim Marrakchi, les causes de cette inflation tiennent d'abord à des situations de disruption par rapport à ce qui existait auparavant, notamment la hausse des coûts de certains intrants à la suite d'un dysfonctionnement logistique au niveau mondial qui a fait exploser le prix du transport des marchandises.
Ensuite, fait observer M. Marrakchi qui était l’invité de «L’Info en Face», il faut distinguer les secteurs où il y a une situation de concurrence de ceux où il n'y en a pas. Dans un secteur soumis à la concurrence, un industriel va toujours essayer de limiter l'impact de l'augmentation des coûts qui lui est infligée, soit en innovant, soit en augmentant sa productivité, pour ne pas la répercuter sur les prix finaux de ses produits, explique-t-il. Dans le cas de l'entreprise qu'il dirige, M. Marrakchi nous informe que l'on a décidé de remanier les recettes de certaines confiseries pour ne pas avoir à augmenter leurs prix. À l'inverse, comme c'est le cas pour les produits alimentaires où il n'y a pratiquement pas de concurrence, et outre le fait que l’offre est insuffisante, il y a une incitation à augmenter les prix, souligne le vice-président de l’Asmex.
La poussée inflationniste persistera tant que l'offre restera insuffisante
Si on continue à avoir de mauvaises récoltes, à rester ouvert à une forte demande de l’étranger et en même temps à limiter l'approvisionnement du marché intérieur aux seuls producteurs locaux, il est certain que la poussée inflationniste persistera, affirme M. Marrakchi. Faisant observer que l'inflation n’est pas linéaire et qu’elle a surtout touché le prix des fruits et légumes, le vice-président de l’Asmex est d’avis que si l'on n'agit pas sur l'offre, qui reste insuffisante, les prix auront tendance à augmenter.
Priorité au marché domestique
Que faire pour contenir et faire baisser cette inflation qui touche principalement les produits alimentaires, surtout si les rendements de la campagne agricole restent en deçà des espérances ? De l’avis de M. Marrakchi, «aujourd'hui, nous avons gagné en expérience» et «il est probable que les pouvoirs publics vont taxer les exportations pour déverser la production locale sur le marché intérieur et si cela s'avère insuffisant, ils ouvriront les vannes de l'importation».
L’inflation a un effet quasi nul sur la croissance
À la question de savoir si cette inflation aura un impact sur la croissance au Maroc, M. Marrakchi soutient que la croissance provient de la capacité de l'économie marocaine à créer de la valeur et que l’effet de l'inflation sur la croissance est en effet quasi nul. Pour appuyer ses propos, le vice-président de l'Asmex cite l'exemple de la Turquie qui connaît une inflation très importante, voire de l'hyper inflation, mais qui affiche simultanément une croissance extrêmement dynamique grâce à la valeur ajoutée.
«La valeur ajoutée de nos exportations n'est pas très importante. Nous avons obtenu de très bons résultats dans le domaine des engrais. Dans l'aéronautique et l'automobile, nous avons des exportations intéressantes, mais avec une forte part de valeur ajoutée étrangère. Au niveau de l’agroalimentaire, c'est la question dont nous avons commencé à débattre, car nous importons plus de productions agricoles que de produits transformés», dit M. Marrakchi, ajoutant que c'est sur ce niveau que les exportateurs marocains devront se focaliser et faire des investissements.
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