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À la mémoire Mohamed Benmejdoub, le plus ancien rotarien du monde (Tribune)

À la mémoire Mohamed Benmejdoub, le plus ancien rotarien du monde (Tribune)
Feu Mohamed Benmejdoub.

Ssi Mohamed Benmejdoub nous a quittés le 2 août 2023, à 90 ans, dont 65 consacrées principalement au Rotary, c’est-à-dire au service à autrui. C’était le plus ancien rotarien du monde ! L’un de ses grands donateurs (Major Donor) et de ses dirigeants qui ont laissé leur empreinte en divers domaines de l’action du Rotary à l’échelon national et à l’international. Il fut aussi en 1958, lorsqu’il avait été accueilli par le Rotary club d’Agadir à 26 ans, le plus jeune rotarien du monde ! C’est dire qu’il faisait exception en tout. D’ailleurs l’année 1958 fut dans sa vie l’une des plus riches en événements : Ce fut l’année de son mariage avec Frederique-Kenza, sa moitié pendant 65 ans, mais aussi l’année de la naissance de sa première fille Amina, et l’année de sa nomination en tant qu’Ingénieur TP, à la tête du service des routes et des ponts de la ville d’Agadir.

Envers cette ville, il garda d’ailleurs toujours une affection particulière : il y a vécu avec sa petite famille le séisme de 1960 qui emporta l’un de ses frères. Il y déploya tout son savoir d’ingénieur, toute son énergie de rotarien dans les opérations de sauvetage. Qui ne se souvient de M. Mohamed Benmejdoub, ingénieur municipal de Casablanca, dont le nom demeure associé à la planification des voies de circulation et des grands ouvrages de la ville, mais aussi au sport, notamment au tennis et aux œuvres sociales. Qui peut oublier le premier arabe et musulman à accéder au Board du Rotary International et être ainsi membre de son conseil d’administration, après une ascension fulgurante qui lui a fait gravir, sans s’arrêter, tous les échelons du Rotary. On ne peut compter toutes les missions importantes qui lui ont été confiées ni les commissions internationales qu’il a présidées et encore moins le nombre de conventions internationales auxquelles il a assisté ni enfin le nombre de représentations des présidents internationaux aux conférences du District dans des dizaines de pays à travers le monde dont il a fait le tour plus d’une fois avec Kenza, son épouse. Ne fut-il pas, par exemple, un des artisans de l’action menée contre la poliomyélite et le président de diverses commissions internationales et régionales chargées de la mettre en œuvre. Que ne fut sa joie chaque fois qu’un pays était annoncé Polio free et que ne fut son bonheur d’avoir réussi au Maroc à libérer les enfants du danger et du risque d’attraper cette maladie en procurant des millions de vaccins en collaboration avec l’Unicef.

Des vaccins offerts gratuitement grâce à ses liens et amitiés au sein du Rotary International ainsi qu’avec l’inventeur du vaccin oral (Dr Albert Bruce Sabin, un autre rotarien), ainsi qu’avec les producteurs et amis rotariens italiens. D’autres missions d’envergure également lui avaient été confiées et l’une d’elles était concentrée sur la paix et l’entente mondiales. Il était l’un des rares, il y a plus de 30 ans, à croire que la paix était chose possible par le Rotary et, à titre d’exemple, Ssi Mohamed fut à l’origine de la première réunion ad hoc entre rotariens arabes et israéliens, ce qui n’était pas imaginable à cette époque. Il faudrait, pour relater toute son œuvre, tout un ouvrage et notre chance est que notre ami a pris le soin de rédiger ses mémoires qu’il acheva quelques jours avant de nous quitter. Ils seront publiés prochainement. Il aurait pu devenir le premier président arabe à la tête du Rotary International, mais le sort à deux reprises l’a contrarié, car Ssi Mohamed menait un combat qui n’était pas le sien et pensait que le Rotary qu’il avait connu 60 ans plutôt était toujours le même.

Cela ne le découragea point et bien au contraire, il continua de toutes ses forces à accomplir de nombreuses tâches et l’une des dernières, et non la moindre, fut justement celle de membre de la commission de nomination du président international. D’autres s’en sont suivies jusqu’il y a peu de temps, quand sa santé lui a imposé la réduction de ses voyages. Il n’empêche qu’il a continué à inspirer tous les rotariens et à prendre la parole à diverses occasions jusqu’en ce juillet dernier, le 8, lorsqu’il assista à Rabat à la soirée de passation du collier du gouverneur sortant, l’ami tunisien Hamadi Siala à notre gouverneure 2023-24, Saadia Aglif. Qui peut oublier ses joutes oratoires à chaque événement national ou international du Rotary ? Qui ne garde en mémoire un conseil, une recommandation, une idée ou une leçon reçue de lui en privé ou lors d’un événement ou d’un séminaire de formation au Rotary.

Chacun de ceux qui l’ont connu, le pleure aujourd’hui quelque part pour quelque chose, y compris ceux qui, dans une absolue discrétion, bénéficiaient de sa générosité. Tous les Rotariens du District maghrébin, au Maroc, en Algérie, en Tunisie et en Mauritanie le pleurent et plusieurs se sont déplacés pour ses obsèques. N’est-ce pas à Ssi Mohamed que ce District doit sa création et n’est-ce pas lui, alors chargé du comité de redistricting au Rotary International en tant que directeur, qui put réussir à détacher ces pays du district français (173), nous apportant ainsi une autre indépendance.

Tous les grands dirigeants et anciens dirigeants du Rotary International partagent notre peine et les messages du Président international actuel R. Gordon I. Mc Inally et du secrétaire général et CEO John Hewco sont très éloquents à ce sujet et expriment avec sincérité la grande tristesse qui les affecte. Un être exceptionnel est parti, laissant dans le désarroi sa famille et ses nombreux amis. Il a laissé une épouse aimante et dévouée qui était sa boussole et qui, aujourd’hui est plongée dans le noir, dans un vide absolu. Il était toute sa vie. Il était aussi le père affectueux, le parfait éducateur, le guide protecteur de ses enfants, et cette affection s’est étendue tout naturellement à ses petits-enfants et arrière-petits-enfants. Tous aujourd’hui pensent qu’il n’est pas loin et qu’il reviendra… C’est son esprit qui survit, son sourire, la lumière par laquelle il a éclairé leurs chemins qui seront toujours là. Pour ma part, j’ai plus d’un demi-siècle de souvenirs, de voyages partagés, de réflexions et de décisions difficiles à prendre en Rotary. J’étais – comme il se plaisait à le dire et à l’écrire –, son compagnon, son confident. J’en étais honoré et j’en resterai fier.

C’est cela que je garde au fond de mon cœur avec son image que le temps ne saurait ternir. Il aimait et encourageait Naïma, mon épouse, et était fier de la guider en Rotary et d’avoir contribué à faire d’elle la première femme gouverneure en Afrique. Adieu mon ami ! Puisse Dieu assister Lalla Kenza et ses enfants, Amina, Nadia, Samia, et toute la famille dans cette épreuve à nulle autre pareille !
 

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