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Plus de la moitié des enfants victimes d’abus sexuels sont des garçons

L’extrême pauvreté serait le principal facteur de risque d'exploitation sexuelle des enfants au Maroc, et plus de la moitié des victimes sont des garçons qui n’osent pas dénoncer leurs agresseurs pour de multiples raisons. C’est ce que révèlent les résultats d’une enquête réalisée par l’Association Meilleur Avenir pour nos enfants en collaboration avec ECPAT international.

Plus de la moitié des enfants victimes d’abus sexuels sont des garçons

Si l’on parle souvent de la nécessité de promouvoir les droits des enfants à la santé et à l’éducation, on évoque moins l’importance de les protéger contre toutes formes de violence, notamment les violences sexuelles. Il s’agit, en effet, d’une des formes les plus abjectes des violences subies par de nombreux enfants dans le monde, mais aussi au Maroc. Et contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce phénomène ne touche pas spécialement les filles, mais touche aussi beaucoup les garçons.

Violences sexuelles à l'égard des enfants : l'enquête choc 

Une enquête menée par l’Association Meilleur Avenir pour nos enfants (AMANE) en collaboration avec l’ONG ECPAT International, auprès des travailleurs sociaux de première ligne en lien avec des enfants victimes de violences sexuelles au Maroc, montre que 54% de leurs dossiers étaient constitués de garçons victimes d'exploitation et/ou d’abus sexuels. «La tranche d'âge des 6-10 ans est la plus touchée par la violence sexuelle. En moyenne, 40% des garçons appartenant à cette tranche d’âge avaient été exposés plus souvent que les garçons des autres groupes d'âge», précise l’enquête réalisée en 2021 dans le cadre de l’Initiative mondiale pour les garçons.

L’enquête révèle, également, que 19% du total des travailleurs sociaux interrogés ont affirmé avoir traité des cas où des garçons avaient partagé des images et/ou des vidéos sexuelles d'eux-mêmes alors que 17% des travailleurs avaient géré des cas de garçons victimes de traite à des fins sexuelles. Les travailleurs de terrain ont aussi indiqué que les contreparties les plus courantes dans les situations d’exploitation sexuelle des garçons au Maroc étaient l'argent, la sécurité, un abri... «Plus de la moitié des travailleurs de première ligne ont indiqué que l'extrême pauvreté était le principal facteur de risque d'exploitation sexuelle des garçons. Viennent, ensuite, parmi les autres facteurs de risque socio-économiques identifiés, le fait de vivre, de travailler ou de passer du temps dans la rue (36%), l'abandon scolaire (31%), la migration de leur famille (28%) et la migration des garçons pour le travail (17%)», indiquent les auteurs de l’étude.

Qui sont ces auteurs de l'exploitation sexuelle des enfants

Il s’agit généralement d’hommes, bien que des femmes aient également été signalées. «Concernant les garçons victimes, les travailleurs de première ligne ont indiqué que les auteurs étaient des hommes dans 67% des cas, alors que dans 33% des cas, il s’agissait de femmes. Les travailleurs estiment que la majorité de ces délinquants sexuels étaient de nationalité marocaine. Ce sont souvent des personnes adultes âgées de plus de 18 ans : parent ou beau-parent, ami de la famille, proche ou une personne en position d’autorité...», rapporte l’enquête.

Les travailleurs sociaux soulignent, en outre, que le tabou de la sexualité aggravait la vulnérabilité des garçons à l'exploitation sexuelle, et contribuait à passer sous silence les crimes sexuels. Ces enfants choisissent aussi de se taire à cause de la stigmatisation et la honte auxquelles ils sont souvent confrontés, mais également à cause des croyances ou normes sociales selon lesquelles les garçons sont censés être forts et capables de se protéger eux-mêmes.

Les conséquences des abus sexuels sur les enfants sont importants 

Ces exploitations et abus sexuels ne sont évidemment pas sans conséquence sur ces enfants. Interrogés sur le sujet, les travailleurs sociaux ont répondu que les garçons exposés à ce type de violence étaient victimes de discrimination et de stigmatisation, souffraient de maladies sexuelles et, dans certains cas, développaient des troubles psychologiques, physiques et cognitifs. En outre, ils ont également rapporté que certains garçons victimes se sentaient menacés, non compris, avaient des difficultés à développer des relations de confiance et parfois même étaient abandonnés par leurs parents.

Le cadre juridique se doit de protéger davantage les enfants 

Enfin, l’enquête a permis d’identifier des lacunes spécifiques au cadre juridique national qui ont, par conséquent, un impact sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels, en particulier pour les garçons. «Les enfants de plus de 15 ans ne sont pas protégés de la même manière que les enfants d’autres tranches d’âge contre la violence et les abus. Les enfants de plus de 15 ans sont exclus des dispositions législatives relatives à la protection des enfants contre la violence et les abus. De même, le cadre juridique marocain n'offre pas de protection aux garçons victimes de viol, l'article 486 du Code pénal définissant le viol comme “l'acte par lequel un homme a des relations sexuelles avec une femme contre sa volonté”. Une telle disposition exclut donc les garçons victimes de la protection de la loi», révèle l’étude.

Des lacunes dans les dispositions relatives aux infractions en ligne ont également été soulevées. Il s’agit essentiellement de l'absence de dispositions dans le Code pénal qui criminalisent explicitement les situations d’abus et d'exploitation sexuels en ligne des enfants comme la diffusion en ligne et en direct d'abus sexuels sur des enfants, le grooming – ou pédopiégeage – qui consiste à solliciter des enfants à des fins sexuelles à travers la manipulation psychologique, ou encore le chantage sur des enfants à des fins sexuelles.

>> Lire aussi : Les enfants également concernés par les violences basées sur le genre

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