La dernière résolution du Parlement européen (PE) sur le Royaume du Maroc n’aurait jamais pu être adoptée sans le contexte de crise régnant au sein de cette institution. C’est ce qu’a affirmé hier le président de la Commission parlementaire mixte Maroc-UE, Lahcen Haddad, qui était l’invité du Forum de la MAP. Profitant de la crise qui secoue actuellement le PE en raison des accusations de corruption qui pèsent sur plusieurs de ses membres (dont certains sont aujourd’hui en prison), certains eurodéputés hostiles au Maroc ont profité de ce contexte pour faire passer cette résolution, qui n’a finalement été cautionnée que par quelque 350 voix, explique M. Haddad. Le principal parti allié du Maroc, qui est le Parti populaire européen (PPE), qui compte plus de 170 eurodéputés, a préféré de ne pas prendre part à ce vote ni préparer le projet de résolution, car il ne souhaitait pas s’engager dans l’élaboration de résolutions présentant un caractère d’urgence, précise le député istiqlalien. Les socialistes européens, deuxième groupe d’eurodéputés de l’UE, qui assurent un certain équilibre en ce qui concerne le Maroc, étaient divisés sur l’adoption de cette résolution, dit M. Haddad, faisant remarquer que les socialistes espagnols n’ont pas voté en faveur de la résolution, à l’exception de leur présidente, Iratxe García Pérez.
Volte-face des libéraux européens sous impulsion française
La position la plus étrange en ce qui concerne cette résolution du PE reste toutefois celle du Parti du «Renew», qui réunit les démocrates et libéraux européens. Cette formation, sous l’impulsion de son président français, Stéphane Séjourné (proche de la présidence française selon M. Haddad), est passée d’un parti allié du Maroc en un parti qui lui est hostile. M. Séjourné a joué un rôle important et est l’un des «architectes» de cette résolution, précise M. Haddad. «Nous avons été surpris par cette attitude de Renew, qui est un parti modéré et d’ordinaire un soutien du Maroc et des équilibres. Mais nous pensions également que les Français étaient nos partenaires et nous n’avions jamais eu de soucis avec eux, que ce soit avec les socialistes, ou ceux de droite ou même d’extrême droite», affirme le président de la Commission parlementaire mixte Maroc-UE. Un revirement qui amène M. Haddad à soutenir qu’«une fraction de l’État profond en France est dérangée par les victoires sécuritaires et diplomatiques du Maroc et a profité de cette crise pour pousser les libéraux français à adopter cette résolution».
La commission parlementaire mixte Maroc-UE est en panne
Revenant sur la Commission parlementaire mixte Maroc-UE, M. Haddad fait remarquer qu’elle est en panne et se heurte à plusieurs obstacles. «Mon homologue, le coprésident, Andrea Cozzolino, nous boycottait, nous évitait et ne traitait pas avec nous. Son assistant, Francesco Giorgi, ne répond pas à nos courriels. L’ancien président de la commission, qui est actuellement derrière les barreaux, Antonio Panzeri, ne traitait pas non plus avec nous», dit-il. «Ceux qui sont montrés du doigt comme agissant en faveur du Maroc ont en fait dressé des barrières pour que nous ne puissions pas travailler», souligne M. Haddad. Et d’expliquer qu’en raison de cet état de fait, les parlementaires marocains étaient obligés de se rendre à chaque fois à Strasbourg ou à Bruxelles, surtout dans un contexte hostile au Maroc au sein du PE, où rien qu’en 2022, pas moins de 12 questions à charge contre le Maroc ont été posées et pas moins de 18 amendements défavorables au Royaume ont été soumis en relation avec différents rapports.
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