La surpopulation carcérale est assurément l’un des plus grands défis auxquels se trouve confrontée la Délégation générale à l'Administration pénitentiaire et à la réinsertion. Selon son dernier rapport d’activités (2022) publié récemment, le nombre des détenus a atteint 97.204 à la fin 2022, contre seulement 83.757 prisonniers en 2018. Un nouveau record est donc établi reflétant le rythme accéléré de croissance de la population carcérale. En effet, bien que le nombre de prisonniers ait connu une baisse significative entre 2019 et 2020, estimée à -1,6%, en raison du contexte de la pandémie de Covid (mesures exceptionnelles, notamment le ralentissement de l’activité des tribunaux et l’instauration de mesures d'amnistie exceptionnelle), cette baisse a été vite revue à la hausse entre 2021 et 2022.
Un constat valable également pour les détenus de sexe féminin dont le nombre a fortement augmenté en 2022, passant de 2.085 détenues en 2021 à 2.351, soit une hausse de 13%. «En un an seulement, c'est-à-dire depuis fin décembre 2021, le nombre des détenus a augmenté de près de 10%, ce qui représente un pourcentage inquiétant en raison de son incidence directe sur la capacité de la DGAPR à mettre en œuvre ses programmes de sécurité et de réforme, surtout au vu des crédits limités qui lui sont alloués», souligne Mohamed Salah Tamek délégué général à l’Administration pénitentiaire et à la réinsertion.
Le surpeuplement des prisons appelé à s’accentuer dans les années à venir
Mais le phénomène du surpeuplement des prisons est loin d’être conjoncturel, tant s’en faut. Ce problème sera appelé à s’accentuer dans les années à venir. Selon les prévisions établies par la DGAPR, on s’attend à ce que le nombre de prisonniers atteigne 104.061 en 2026. Par ailleurs, la délégation prévoit le maintien en 2026 de la tendance haussière du nombre des détenus condamnés par rapport à ceux en détention préventive. On s’attend ainsi à ce que le nombre des détenus condamnés atteigne 63.355 individus en 2026 contre 57.496 enregistré en 2022, tandis que le nombre d’individus en état de détention préventive atteindrait les 40.705, contre 39.708 détenus enregistré au cours de l’année précédente.
Le taux d’encadrement des prisonniers inchangé malgré les recrutements
Pour faire face aux défis engendrés par ces prévisions, la Délégation générale à l'Administration pénitentiaire et à la réinsertion compte poursuivre la mise en œuvre des différents programmes de réforme, parallèlement à la poursuite des efforts de modernisation des prisons et d'augmentation de leur capacité d'accueil, l’enjeu majeur pour la DGAPR étant de permettre aux détenus de purger leur peine dans des conditions humaines.
Dans ce contexte, l'année 2022 a vu l'achèvement des travaux de construction de deux établissements pénitentiaires, parallèlement à la poursuite des travaux de restauration et d'élargissement de plusieurs établissements pénitentiaires et le renforcement et l’équipement des espaces d’hébergement, sachant que la Délégation est également engagée dans l’amélioration des services de nutrition et d'hygiène et des soins de santé, en plus de la promotion d’un meilleur traitement humain des détenus.
Par ailleurs, une attention particulière a été accordée au renforcement des ressources humaines. D’après le rapport, la délégation générale a poursuivi sa politique de recrutement en vue de soutenir l’effectif existant. Dans ce sens, plusieurs concours ont été organisés au cours de l’année 2022 qui ont porté sur diverses spécialités et divers grades, ce qui a permis de recruter pas moins de 628 fonctionnaires, 500 surveillants-éducateurs, 50 officiers-éducateurs et 66 officiers-éducateurs supérieurs, 7 médecins généralistes et 5 médecins-dentistes, ce qui a porté l’effectif global des fonctionnaires dans ce secteur à 12.710 salariés. Malgré ces efforts, le taux d’encadrement des prisonniers qui est resté au même niveau, à savoir un surveillant pour 11 détenus.
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