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Réforme de santé : les biologistes médicaux souhaitent participer au changement

La Chambre syndicale des biologistes tient ses Rencontres annuelles les 3 et 4 février à Casablanca. Organisé sur le thème «Pour une biologie marocaine du futur», cet événement sera l’occasion pour les professionnels du secteur d’échanger autour de l’actualité de la biologie médicale, mais également de soulever les principales préoccupations de la profession.

Réforme de santé : les biologistes médicaux souhaitent participer au changement

La biologie médicale connaît des évolutions scientifiques et technologiques majeures qui lui confèrent une place importante dans la chaîne des soins. Cependant, les professionnels du secteur déplorent la persistance de certains problèmes qui empêchent les laboratoires d’analyses médicales d’accompagner ces évolutions et constituent ainsi un frein au développement et à la libération du potentiel national de cette discipline. Les rencontres annuelles de Chambre syndicale des biologistes (CSB), qui ont lieu les 3 et 4 février à Casablanca, seront une opportunité pour débattre de ce sujet avec les experts et professionnels de la santé.

D’après les organisateurs, ces journées scientifiques seront l’occasion pour les biologistes d’exprimer leurs doléances, de soulever les freins qui minent la profession et d’explorer les éventuelles pistes pour un exercice optimal, à l’aube de la réforme du système de santé au Maroc. «Les biologistes ambitionnent d'être une partie prenante de ce changement. Nous voulons être une force de proposition. Dans cette optique, nous interpellons le département de la Santé pour ouvrir un dialogue à même de permettre de meilleures conditions de travail pour les professionnels» explique Dr Touzani Otmane, président de la CSB. «C’est un chantier structurant qui permettra de fluidifier et de dématérialiser les processus de prise en charge notamment en mode tiers payant pour permettre à nos concitoyens démunis un accès égal aux analyses de biologie médicale. L’objectif est, en effet, de permettre à tous les patients de bénéficier de toutes les possibilités offertes par les avancées scientifiques et technologiques de la biologie médicale», a-t-il ajouté.
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Dr Otmane Touzani, président de la Chambre syndicale des biologistes : La refonte de la Nomenclature des actes de biologie médicale est aujourd’hui une urgence


Le Matin : La réforme du système national de santé impacte selon vous les laboratoires d'analyses de biologie médicale du secteur privé dans le cadre où vous êtes confrontés à plusieurs défis. Quels sont les défis auxquels vous faites face sur le terrain ?

La refonte du système sanitaire national entreprise sous l’Impulsion de Sa Majesté le Roi Mohammed VI exige que tous les acteurs y jouent pleinement leur rôle. La loi-cadre 6-22 s’articule autour de 11 chapitres dont certains sont au cœur des défis posés aux Laboratoires privés d’analyses de biologie médicales (LABM). Sur la question de l’offre de soins, la nomenclature des actes de biologie médicale est aujourd’hui totalement obsolète et ne permet pas d’accompagner les évolutions scientifiques aussi bien sur le plan du diagnostic que du suivi thérapeutique. Concernant la cartographie sanitaire, les LABM sont confrontés à la problématique de la régulation des installations qui demeurent fortement concentrées sur les axes des grandes métropoles. Une meilleure régulation des implantations des LABM sur le plan régional doit être mise en place en préservant aussi bien la pérennité des structures existantes que le droit des futurs biologistes à un exercice digne de leur profession. Cette régulation doit avoir pour finalité une répartition géographique très large afin de permettre à tous nos concitoyens un accès équitable aux services de la biologie médicale. Un autre élément important est celui de la formation continue. La biologie médicale est une des disciplines médicales dont l’évolution est la plus importante et la plus rapide sur les dernières années, accompagner les biologistes médicaux et les soutenir dans leur effort de maintien et de développement des compétences est indispensable à des soins de qualité pour nos concitoyens. D’un autre côté, il y a également la question de la formation initiale et de la régulation de l’accès à la profession. En effet, certains diplômes de pays étrangers ne remplissent absolument pas les critères exigés par la formation nationale et se voient tout de même octroyer des attestations d’équivalence créant ainsi une situation d’injustice vis-à-vis des lauréats des universités marocaines, mais surtout génèrent un risque important pour la santé de nos concitoyens. Il est fondamental que la procédure d’équivalence des diplômes étrangers soit revue et alignée selon les conditions de la formation nationale. La loi 6-22 aborde également la question de la numérisation. C’est un sujet fondamental pour nos structures. Nous travaillons avec des systèmes d’informations divers qui doivent pouvoir interagir avec les systèmes qui seront proposés ultérieurement afin d’assurer une interopérabilité optimale.

Pourquoi certaines analyses sont-elles faites à l’étranger ? S’agit-il d’un problème de compétences ou de moyens ?
La sous-traitance à l’étranger de certaines analyses de biologie médicale ne relève ni d’un manque de moyens ni de compétences dans la quasi-majorité des cas. L’absence d’une réglementation favorisant la mise en commun des moyens entre professionnels, notamment dans le cadre de plateaux techniques, empêche la réalisation de ces analyses entraînant à la fois des retards dans la prise en charge des patients du fait des contraintes logistiques en plus de générer une fuite de devises, estimée en dizaines de millions d’euros, dont notre pays peut tout à fait se passer au regard de l’infrastructure et des compétences dont il dispose aussi bien au niveau du secteur public que privé et qui pourraient faire du Maroc un leader régional en la matière. Aussi, l’absence d’un cadre légal encourageant la mutualisation des moyens dans le secteur privé de même que l’absence de toute passerelle de collaboration entre les secteurs privé et public entrave la localisation de plusieurs analyses totalement réalisables au Maroc, mais qui demeurent sous-traitées faute d’une concentration des investissements et d’une masse critique de tests à réaliser. Nous sommes bien entendu, à la disposition des autorités pour travailler sur ce sujet et apporter des solutions en faveur du développement de notre biologie médicale nationale.

La Nomenclature des actes de biologie médicale date de 2.005. Est-ce que, selon vous, en 2023, le citoyen marocain bénéficie de tout le panier de soins offert par la biologie médicale dans le diagnostic et le suivi thérapeutique ?

Il est clair que le citoyen marocain ne bénéficie pas de toutes les possibilités de prise en charge offertes par les évolutions scientifiques et techniques de la biologie médicale aussi bien sur le plan du diagnostic que du suivi thérapeutique. La Nomenclature marocaine qui date de 2.005 est clairement obsolète. Seuls quelques actes ont pu être introduits dans le circuit de prise en charge au cours des dernières années, et ce par voie d’assimilation à des actes préalablement existants. Si nous voulons avoir une biologie médicale efficiente et une prise en charge optimale de nos concitoyens, la refonte de la Nomenclature des actes de biologie médicale (NABM) est une urgence. Un travail colossal réalisé sur plusieurs années par des référents du secteur aussi bien public que privé et auquel la Chambre syndicale des biologistes a participé d’une façon très active a été remis à la Commission nationale de Nomenclature en décembre 2022. Il s’agit d’une proposition de classification et de Nomenclature des actes de biologie médicale qui, si elle est adoptée par les pouvoirs publics, permettrait d’élargir le panier des soins de 450 actes actuellement reconnus à 1.287 proposés. Ces documents doivent désormais être soumis au ministre de la Santé et de la protection sociale pour approbation en vue d’en faire une base lors des échanges avec l’Agence nationale de l'assurance maladie (ANAM) et les organismes gestionnaires de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO).

Où en êtes-vous concrètement dans vos discussions avec l'ANAM et le ministère de la Santé par rapport à vos revendications ?
Concernant le ministère de la Santé, nous avons demandé une audience au ministre afin de lui faire part de notre engagement dans le chantier de réforme de l’AMO et de notre souhait d’être une force de proposition dans la mise en place des modalités d’application de la loi-cadre 6-22 en ce qui concerne le secteur de la biologie médicale. Malheureusement, nous n’avons pas encore reçu de réponse favorable à notre demande, mais nous sommes conscients des contraintes liées au planning du ministre et avons bon espoir de le rencontrer prochainement.
Pour ce qui est de nos échanges avec l’ANAM, il est important de rappeler que les LABM ont été parmi tous les fournisseurs de soins les premiers signataires en 2006 d’une convention nationale sous l’égide de l’ANAM en concédant sans aucune contrepartie une baisse tarifaire significative de la lettre clé B qui était passée de 1.34 DH à 1.10 DH soit 18% du prix des analyses couvertes par l’AMO. Aujourd’hui, le processus d’échange ne fait que commencer puisque les propositions de classification et de Nomenclature viennent d’être introduites dans le circuit. Par ailleurs, nous nous réjouissons d’avoir été invités par l’ANAM à une série de réunions qui démarreront au cours du mois de février 2023 afin d’aborder la nouvelle méthodologie du conventionnement. Nous sommes confiants qu’un échange responsable et engagé nous permettra de trouver les meilleures solutions pour un accès optimal de nos concitoyens à une biologie médicale de qualité tout en tenant compte des contraintes des différentes parties prenantes.

>> Lire aussi : AMO : la mise à jour de la tarification de référence devient urgente (président du CNOM)

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