Quel rôle peut jouer la science et l'innovation dans les efforts visant à garantir la sécurité alimentaire ? Telle est la principale thématique de la 17e session plénière solennelle annuelle de l'Académie Hassan II des sciences et techniques (du 21 au 23 février à Rabat). Le choix de cette thématique n'est pas fortuit. L'envolée des prix mondiaux des denrées alimentaires déclenchée par la déstructuration des circuits d'approvisionnement, due à la pandémie de Covid-19 et amplifiée par l'impact de la guerre russo-ukrainienne sur les marchés, a remis au goût du jour le débat sur les moyens à mettre en œuvre pour renforcer et préserver la sécurité et la souveraineté alimentaires.
Vers la transformation structurelle de la sécurité et de la souveraineté alimentaires
Le Royaume du Maroc, confronté à ces mêmes aléas que le reste du monde, est appelé à relever d'autres défis liés à la dégradation des ressources en terre et en eau, l'impact négatif du changement climatique sur les écosystèmes et les sécheresse répétitives, d'où l'importance de mettre en place des stratégies préventives pour anticiper ces risques. «Le Maroc se doit d'anticiper ces risques et d'agir sans attendre. Il lui faut une stratégie qui a pour point de départ l'identification raisonnée des options et des opportunités d'action», note le secrétaire perpétuel de l'Académie, Omar Fassi-Fehri, dans son discours d'ouverture de cette 16e session. Justement, la science peut jouer un rôle majeur dans la proposition de solutions à même de renforcer la souveraineté alimentaire. «Les progrès scientifiques, les innovations techniques et l'application des technologies numériques peuvent contribuer à une transformation structurelle à grande échelle dans le domaine de la sécurité et de la souveraineté alimentaires», estime M. Fihri. Selon le secrétaire perpétuel de l'Académie, l'agriculture marocaine peut profiter des technologies nouvelles et existantes pour lutter contre le stress biotique et abiotiques, élever la productivité des cultures et du bétail, améliorer la fertilité des sols et assurer l'approvisionnement en eau, ce qui pourra accroître à long terme la quantité et la qualité des aliments produits.
Parallèlement, des innovations telles que les nouvelles méthodes d'analyse, les biotechnologies de correction de séquence génomique et les nouveaux moyens de produire des aliments peuvent faciliter la mise en place de systèmes alimentaires plus efficaces et plus résilients. Les progrès dans les domaines du stockage, de la réfrigération, des transports et de la transformation des produits agricoles peuvent s'avérer également utiles pour agir sur la composante de l'accès à l'alimentation. M. Fassi-Fihri estime par ailleurs que la révolution numérique pourra apporter de réels services à l'agriculture via l'exploitation de données par le biais du développement de l'intelligence artificielle, permettant ainsi d'optimiser les intrants agricoles et d'assurer par conséquence la sécurité alimentaire.
L'innovation au cœur des priorités de la stratégie «Génération Green»
En effet, tenant compte du rôle que peut jouer la technologie dans le développement de la production agricole et le renforcement de la résilience de l'agriculture, la nouvelle stratégie agricole «Génération Green» place l'innovation au cœur des priorités, comme le souligne le secrétaire général du département de l'Agriculture, Redouane Arrach. Selon M. Arrach, des investissements importants sont mobilisés dans le cadre de la formation, la recherche et l'innovation, qui sont le moteur de la transformation des systèmes alimentaires. «L’innovation figure parmi les piliers de base de la nouvelle stratégie agricole Génération Green. En application des Hautes Directives Royales, la nouvelle vision du secteur agricole accorde la priorité à l’élément humain. Cette feuille de route prévoit par ailleurs un accompagnement sur mesure des projets innovants dans le secteur.
Ainsi, «l’entrepreneuriat des jeunes et l’adoption d’un nouveau modèle pour les organisations professionnelles agricoles seront les principaux ingrédients de cette stratégie qui vise à placer l’agriculture dans l’ère du digital», souligne le même responsable qui rappelle les autres leviers de transformation prévus par cette stratégie pour assurer la sécurité alimentaire. Il s'agit notamment du développement de l'investissement public agricole pour créer une dynamique économique agricole et rurale, l'investissement privé permettant de moderniser les exportations et l'adoption de la technologie pour améliorer la productivité et finalement le financement et l'incitation au développement du partenariat public-privé.
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