En quoi le fait d'être parti en France vous a-t-il aidé ?
Je suis venu en France vers la fin de l'année 85 pour acheter du matériel pour mon groupe en Algérie et je comptais y retourner.
Pour cela, je chantais dans trois cabarets à Paris, par nuit. Mais il y a eu le 1er festival de Rai à Bobigny dans la banlieue parisienne et qui a été, pour moi, un tremplin pour sortir des cabarets et enregistrer mon premier disque en France. C'est à ce moment-là que j'ai connu mon manager, Michel Levy, qui s'occupe de ma carrière depuis 18 ans.
Comment se positionne Cheb Mami sur la scène artistique arabe et mondiale ?
Je chante régulièrement dans beaucoup de pays arabes et sur tous les continents. J'étais le 10 juillet dernier à Casablanca par exemple et la veille à Alger. Cela fait partie de mon métier et je suis toujours très heureux de rencontrer mon public sur scène.
Tout comme je chante à Berlin ou à Rome. C'est un grand privilège que je mesure à sa juste valeur.
Votre duo avec Samira Said a été un succès, comment s'est déroulée cette collaboration ?
J'ai été contacté par Mohssen Gaber, le producteur de Samira Said, en Egypte et qui m'a fait parvenir une maquette de la chanson «Youm wara youm».
J'ai tout de suite aimé la mélodie et je connaissais déjà Samira pour l'avoir rencontrée au Maroc.
Je suis venu au Caire pour enregistrer la chanson et tourner le clip. Le succès de la chanson fut immédiat, car elle était bonne et je l'ai même chantée à la télévision française avec Samira, chez Michel Drucker.
«Premier ambassadeur du Rai aux Etats-Unis», que vous confèrent ces titres comme avantages ?
Je n'ai jamais considéré le Rai comme étant une monarchie avec ses titres de gloire et je suis très peu attaché aux honneurs. Pour moi, seul le résultat d'un travail bien fait qui compte et surtout le verdict du public, qui nous fait vivre.
Comment s'est déroulé le retour à Alger ?
Je suis revenu chanter en 99 en Algérie, après les années difficiles qu'a connues mon pays.
C'est un souvenir inoubliable et plein d'émotion que ce retour devant 100000 personnes à Alger.
D'ailleurs, aujourd'hui je vis en Algérie, auprès de ma famille et j'ai mes affaires ici entre Oran et Alger.
Comment voyez-vous l'avenir du Rai ?
Le Rai évolue avec les années, mais il est toujours là. Il se marie avec différents styles et il grandit avec le public d'aujourd'hui.
Il y a en Algérie et au Maroc beaucoup de jeunes chanteurs de Rai, preuve que le style est toujours présent.
Aujourd'hui, vous êtes sûr de votre succès et de votre public, quelle est l'étape suivante dans votre carrière ?
Dans ce métier, on est jamais sûr de rien et surtout pas de succès. Le plus difficile est de durer et cela nécessite de toujours travailler plus et de respecter le public, car il ne vous fera aucun cadeau et il aura raison.
Vous vous estimez porteur d'un message ou la chanson, est-elle un moyen de divertissement ? Et à qui s'adressent vos chansons ?
Je ne suis le porteur de personne et les gens qui m'écoutent ont, plus de moi, une image de quelqu'un qui leur fait vivre un moment agréable le temps d'une chanson ou d'un concert. Je n'ai pas d'autres prétentions.
Mes chansons s'adressent à qui veut bien les écouter. J'espère au plus grand nombre. Je suis très attentif au courrier que je reçois du monde entier et aux messages sur mon site internet : cheb mami.com
D'où puisez-vous cette force de chanter en plusieurs langues et de fondre dans différents moules ?
Je chante principalement en arabe et il m'arrive de chanter quelques phrases en français ou d'interpréter par exemple la chanson que m'a écrite Charles Aznavour «Viens Habibi».
Y-a-t-il un projet de duo avec des Marocains ?
Je ne calcule pas à l'avance mes collaborations, elles sont le fruit de rencontres artistiques, et c'est pour cela que ça marche.
Tout comme j'apprécie beaucoup le jeune chanteur marocain, Hanino, qui a une très belle voix et du charisme. Il fait partie de cette relève et je lui prédis un très bel avenir.
Vos projets d'avenir ?
Je viens d'enregistrer un duo avec le chanteur italien, Zucchero, qui est numéro 1 dans beaucoup de pays.
Sinon, je vais enregistrer un nouvel album en Egypte et faire une tournée mondiale en 2005.
Vous vous sentez plus français ou maghrébin ?
Je suis algérien, donc maghrébin. Je vis pour mon métier entre la France et le Maghreb. Mais ça n'a rien à voir avec ce que je suis au fond de moi et de ma culture maghrébine qui restera jusqu'à ma mort.
Par ailleurs, je suis un citoyen du monde, tolérant et ouvert sur les autres cultures.