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Jean Marie Courtois, directeur de l'Ecole de l'acteur de Rabat : «Le théâtre qu'on enseigne est très naturel, très vrai mais très loin du théâtre traditionnel marocain»

Jean Marie Courtois est de ceux qu'on appelle " Marocains de cœur ".
Venu au Maroc pour diriger des stages de formation à la communication, il se laisse séduire par la capitale du Royaume et y monte une école de théâtre et de cinéma.
Depuis quatre

Jean Marie Courtois, directeur de l'Ecole de l'acteur de Rabat : «Le théâtre qu'on enseigne est très naturel, très vrai mais très loin du théâtre traditionnel marocain»
Quels étaient vos objectifs en installant une école de l'acteur à Rabat ?

Au début c'était très simple. J'adorais le Maroc, j'y venais régulièrement pour mes stages de formation à la communication à base de techniques théâtrales, notamment la communication orale. Le rythme que je menais ne m'a jamais permis de faire le touriste ce qui fait que j'ai découvert le Maroc à travers ses gens et à travers Rabat que j'ai connue en premier. Sa médina et son rythme paisible ont achevé de me convaincre.

Et puis il y a aussi une demande et un vide dans ce sens-là qu'il fallait combler. La création de cette école répond aussi à mon désir d'enseigner le théâtre dans un pays que j'aime. On prévoit bientôt l'ouverture d'une école à Casablanca où je suppose que le public sera plus investi, plus dynamique. Il est vrai qu'au début c'était assez difficile de s'imposer parce que le théâtre n'est pas vraiment dans les mœurs. Au Maroc comme partout ailleurs il y a une certaine catégorie qui considère les activités artistiques comme féminisantes. Mais on a vite fait de balayer les préjugés, exemples à l'appui.

Quels sont les points sur lesquels vous rencontrez le plus de réticence ?

Cela fait toujours un peu peur à un parent de voir son enfant délaisser les études pour une carrière artistique et c'est normal d'avoir peur à cet âge-là. Surtout que notre école commence à être connue et qu'elle est devenue le point de mire de réalisateurs et de cinéastes qui viennent y chercher des acteurs. D'autant plus que le théâtre qu'on enseigne est très proche du jeu cinématographique. Très naturel, très vrai et en même temps très loin du théâtre traditionnel marocain. Ça peut faire peur aux parents et c'est arrivé pour le cas de parents dont les enfants étaient sollicités pour jouer dans des films. Il arrive que l'expérience soit réussie, c'est le cas de la petite Mona Constantin qui est douée et qui a tourné dans le premier court-métrage de Rachid El Ouali.

En quoi consiste la formation dispensée à l'école ?

Nous comptons parmi notre staff des talents confirmés tels que Rachid El Ouali et d'autres qui commencent à se faire connaître comme Youssef Britel. Le théâtre est un art où on ne cache rien et où on se montre tel qu'on est. La formation n'a rien de contraignant et on tient à ce que tout se déroule dans la bonne humeur.

Adultes, adolescents ou jeunes enfants rejoignent l'école pour l'amour du théâtre en premier lieu. Un amour qu'on cultive puisqu'il s'avère utile de passer des messages à travers les techniques théâtrales. Un cours-type commence souvent par de la relaxation. C'est nécessaire à l'équilibre psychologique.

Ensuite viennent des exercices corporels à travers lesquels on apprend à exprimer sensations et sentiments et puis beaucoup d'improvisation. L'improvisation permet d'extérioriser les émotions et de développer l'imagination.

Et enfin il y a le travail de groupe qui permet à travers de petites scènes de développer la mémoire et les capacités d'expression. Nos élèves peuvent également travailler devant la caméra qui leur offre la possibilité d'analyser leur jeu. Au bout de chaque année on donne un spectacle. L'année dernière on a pu tourner deux films et cette année on prépare une pièce de théâtre. Cela permet de synthétiser le travail des élèves.

Et pour ce qui est de l'aspect de soutien des plus jeunes à vaincre leur émotivité ?

En inscrivant leurs enfants aux cours de théâtre, les parents cherchent à atteindre un but pratique : développer la langue française chez les plus jeunes et leur permettre d'avoir plus confiance en eux. Mais il est vrai que le théâtre agit sur l'esprit d'un enfant, un adolescent ou même un adulte d'une manière structurante.
Mais j'insiste souvent auprès des parents d'élèves, je leur explique que cet aspect est corollaire. Les changements qui s'opèrent sont imperceptibles qui se fait au bout de quelques mois et il ne faut pas s'attendre à ce que ce soit automatique.

La première chose à savoir est qu'on fait du théâtre pour son plaisir ! Pendant les cours, on fait connaissance avec un groupe, et puis il y a une osmose qui se crée, une connivence entre les élèves ce qui les met à l'aise. C'est par la suite qu'on se rend compte du changement, qu'on prend la parole plus facilement et sans avoir peur du ridicule. Ça se fait petit à petit et selon les personnes…

En tant que créatif, comment gérez-vous votre carrière ?

Parallèlement à mon école, je suis comédien, metteur en scène, producteur de spectacles. En 2001 j'ai réalisé, en co-production avec le Théâtre Mohammed V " Les caprices de Marianne " avec Rachid El Ouali en tête d'affiche. Pièce que j'ai fait adapter en arabe et qui a été vendue à la deuxième chaîne et c'est devenu Lalla Ghita (diffusée en mois de Ramadan 2003).

Cette année on a produit le Papillon Perdu avec l'aide de l'Ambassade de France, le Théâtre Mohammed V et le soutien de plusieurs sponsors. Pièce qu'on va bientôt reprendre en tournée et que je suis d'ailleurs en train d'adapter en arabe.

A chaque représentation le public pourra la suivre dans les deux langues. Plusieurs de ces représentations auront lieu au siège de la Fondation Orient-Occident à Yacoub El Mansour…

D'ailleurs on va réaliser plusieurs projets en collaboration avec la Fondation. Notamment après la création de association Rêve de Film (Oumnia Film en arabe) et dont le président n'est autre que Rachid El Ouali. L'association va aider les autres associations culturelles et les associations de quartier à créer des petits films vidéo avec une vingtaine de jeunes chaque fois encadrés par des professionnels.

Ce sont ces jeunes qui vont écrire leurs films, les réaliser bien sûr avec l'aide d'un réalisateur professionnel, un directeur de production, des spécialistes en montage en éclairage, etc. Mais à chaque fois il y aura un jeune réalisateur bis, un assistant bis et ainsi de suite.

On aimerait qu'ils soient capables de relancer la machine eux-mêmes pour que ça essaime et que l'action ne se limite pas à une dizaine de villes. L'aide des mécènes et de la Fondation sera précieuse pour venir en aide aux jeunes et leur montrer la voie.
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